Métrique en Ligne
VER_1/VER28
Paul VERLAINE
POÈMES SATURNIENS
1866
EAUX-FORTES
II
Cauchemar
J'ai vu passer dans mon rêve 7
– Tel l'ouragan sur la grève, – 7
D'une main tenant un glaive 7
Et de l'autre un sablier, 7
5 Ce cavalier 4
Des ballades d'Allemagne 7
Qu'à travers ville et campagne, 7
Et du fleuve à la montagne, 7
Et des forêts au vallon, 7
10 Un étalon 4
Rouge-flamme et noir d'ébène, 7
Sans bride, ni mors, ni rêne, 7
Ni hop ! ni cravache, entraîne 7
Parmi des râlements sourds 7
15 Toujours ! toujours ! 4
Un grand feutre à longue plume 7
Ombrait son œil qui s'allume 7
Et s'éteint. Tel, dans la brume, 7
Éclate et meurt l'éclair bleu 7
20 D'une arme à feu. 4
Comme l'aile d'une orfraie 7
Qu'un subit orage effraie, 7
Par l'air que la neige raie, 7
Son manteau se soulevant 7
25 Claquait au vent, 4
Et montrait d'un air de gloire 7
Un torse d'ombre et d'ivoire, 7
Tandis que dans la nuit noire 7
Luisaient en des cris stridents 7
30 Trente-deux dents. 4
logo du CRISCO logo de l'université