Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
VOL_2/VOL28
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
La Pucelle d'Orléans
1752
CHANT VII
Argument
Comment Dunois sauva Dorothée, condamnée à la mort par l'inquisition.
Lorsque autrefois, | au printemps de mes jours, 4+6 a
Je fus quitté | par ma belle maîtresse, 4+6 b
Mon tendre cœur | fut navré de tristesse, 4+6 b
Et je pensai | renoncer aux amours : 4+6 a
5 Mais d'offenser | par le moindre discours 4+6 a
Cette beauté | que j'avais encensée, 4+6 c
De son bonheur | oser troubler le cours, 4+6 a
Un tel forfait | n'entra dans ma pensée. 4+6 c
Gêner un cœur, | ce n'est pas ma façon. 4+6 d
10 Que si je traite | ainsi les infidèles, 4+6 e
Vous comprenez, | à plus forte raison, 4+6 d
Que je respecte | encor plus les cruelles. 4+6 e
Il est affreux | d'aller persécuter 4+6 f
Un tendre cœur | que l'on n'a pu dompter. 4+6 f
15 Si la maîtresse | objet de votre hommage 4+6 g
Ne peut pour vous | des mêmes feux brûler, 4+6 f
Cherchez ailleurs | un plus doux esclavage, 4+6 g
On trouve assez | de quoi se consoler ; 4+6 f
Ou bien buvez, | c'est un parti si sage. 4+6 g
20 Et plût à Dieu | qu'en un cas tout pareil 4+6 h
Le tonsuré | qu'Amour rendit barbare, 4+6 i
Cet oppresseur | d'une beauté si rare, 4+6 i
Se fût servi | d'un aussi bon conseil ! 4+6 h
Déjà Dunois | à la belle affligée 4+6 c
25 Avait rendu | le courage et l'espoir : 4+6 j
Mais avant tout | il convenait savoir 4+6 j
Les attentats | dont elle était chargée. 4+6 c
« O vous, dit-elle | en baissant ses beaux yeux, 4+6 k
Ange divin | qui descendez des cieux, 4+6 k
30 Vous qui venez | prendre ici ma défense, 4+6 l
Vous savez bien | quelle est mon innocence ! » 4+6 l
Dunois reprit : | « Je ne suis qu'un mortel ; 4+6 h
Je suis venu | par une étrange allure, 4+6 m
Pour vous sauver | d'un trépas si cruel. 4+6 h
35 Nul dans les cœurs | ne lit que l'Éternel. 4+6 h
Je crois votre âme | et vertueuse et pure ; 4+6 m
Mais dites-moi, | pour Dieu, votre aventure. » 4+6 m
Lors Dorothée, | en essuyant les pleurs 4+6 n
Dont le torrent | son beau visage mouille, 4+6 o
40 Dit : « L'amour seul | a fait tous mes malheurs. 4+6 n
Connaissez-vous | monsieur de La Trimouille ? 4+6 o
— Oui, dit Dunois, | c'est mon meilleur ami ; 4+6 p
Peu de héros | ont une âme aussi belle ; 4+6 q
Mon roi n'a point | de guerrier plus fidèle, 4+6 q
45 L'Anglais n'a point | de plus fier ennemi ; 4+6 p
Nul chevalier | n'est plus digne qu'on l'aime. 4+6 r
Il est trop vrai, | dit-elle, c'est lui-même ; 4+6 r
Il ne s'est pas | écoulé plus d'un an 4+6 s
Depuis le jour | qu'il a quitté Milan. 4+6 s
50 C'est en ces lieux | qu'il m'avait adorée ; 4+6 c
Il le jurait, | et j'ose être assurée 4+6 c
Que son grand cœur | est toujours enflammé, 4+6 f
Qu'il m'aime encor, | car il est trop aimé. 4+6 f
— Ne doutez point, | dit Dunois, de son âme ; 4+6 t
55 Votre beauté | vous répond de sa flamme. 4+6 t
Je le connais ; | il est, ainsi que moi, 4+6 u
A ses amours | fidèle comme au roi. » 4+6 u
L'autre reprit : | « Ah ! monsieur, je vous croi. 4+6 u
O jour heureux | où je le vis paraître, 4+6 v
60 Où des mortels | il était à mes yeux 4+6 k
Le plus aimable | et le plus vertueux, 4+6 k
Où de mon cœur | il se rendit le maître ! 4+6 v
Je l'adorais | avant que ma raison 4+6 d
Eût pu savoir | si je l'aimais ou non. 4+6 d
65 « Ce fut, monsieur, | ô moment délectable ! 4+6 w
Chez l'archevêque, | où nous étions à table, 4+6 w
Que ce héros, | plein de sa passion, 4+6 d
Me fit, me fit | sa déclaration. 4+6 d
Ah ! j'en perdis | la parole et la vue 4+6 x
70 Mon sang brûla | d'une ardeur inconnue : 4+6 x
Du tendre amour | j'ignorais le danger, 4+6 f
Et de plaisir | je ne pouvais manger. 4+6 f
Le lendemain | il me rendit visite : 4+6 y
Elle fut courte, | il prit congé trop vite. 4+6 y
75 Quand il partit, | mon cœur le rappelait ; 4+6 z
Mon tendre cœur | après lui s'envolait. 4+6 z
Le lendemain, | il eut un tête-à-tête 4+6 a
Un peu plus long, | mais non pas moins honnête. 4+6 a
Le lendemain | il en reçut le prix, 4+6 b
80 Par deux baisers | sur mes lèvres ravis. 4+6 b
Le lendemain | il osa davantage ; 4+6 g
Il me promit | la foi de mariage. 4+6 g
Le lendemain | il fut entreprenant ; 4+6 d
Le lendemain | il me fit un enfant. 4+6 d
85 Que dis-je ? hélas ! | faut-il que je raconte 4+6 e
De point en point | mes malheurs et ma honte. 4+6 e
Sans que je sache, | ô digne chevalier, 4+6 f
A quel héros | j'ose me confier ? » 4+6 f
Le chevalier, | par pure obéissance, 4+6 l
90 Dit, sans vanter | ses faits ni sa naissance : 4+6 l
« Je suis Dunois. | » C'était en dire assez. 4+6 f
« Dieu, reprit-elle, | ô Dieu, qui m'exaucez, 4+6 f
Quoi, vos bontés | font voler à mon aide 4+6 f
Ce grand Dunois, | ce bras à qui tout cède ! 4+6 f
95 Ah ! qu'on voit bien | d'où vous tenez le jour, 4+6 g
Charmant bâtard, | cœur noble, âme sublime ! 4+6 h
Le tendre Amour | me faisait sa victime ; 4+6 h
Mon salut vient | d'un enfant de l'Amour. 4+6 g
Le ciel est juste, | et l'espoir me ranime. 4+6 h
100 « Vous saurez donc, | brave et gentil Dunois, 4+6 i
Que mon amant, | au bout de quelques mois, 4+6 i
Fut obligé | de partir pour la guerre, 4+6 j
Guerre funeste, | et maudite Angleterre ! 4+6 j
Il écouta | la voix de son devoir. 4+6 j
105 Mon tendre amour | était au désespoir. 4+6 j
Un tel état | vous est connu sans doute, 4+6 k
Et vous savez, | monsieur, ce qu'il en coûte. 4+6 k
Ce fier devoir | fit seul tous nos malheurs ; 4+6 n
Je l'éprouvais | en répandant des pleurs : 4+6 n
110 Mon cœur était | forcé de se contraindre, 4+6 l
Et je mourais, | mais sans pouvoir me plaindre. 4+6 l
Il me donna | le présent amoureux 4+6 k
D'un bracelet | fait de ses blonds cheveux, 4+6 k
Et son portrait | qui, trompant son absence, 4+6 l
115 M'a fait cent fois | retrouver sa présence. 4+6 l
Un cher écrit | surtout il me laissa, 4+6 m
Que de sa main | le ferme Amour traça. 4+6 m
C'était, monsieur, | une juste promesse, 4+6 b
Un sûr garant | de sa sainte tendresse : 4+6 b
120 On y lisait : | Je jure par l'Amour, 4+6 g
Par les plaisirs | de mon âme enchantée, 4+6 c
De revenir | bientôt en cette cour, 4+6 g
Pour épouser | ma chère Dorothée. 4+6 c
Las ! il partit, | il porta sa valeur 4+6 n
125 Dans Orléans. | Peut-être il est encore 4+6 o
Dans ces remparts | où l'appela l'honneur. 4+6 n
Ah ! s'il savait | quels maux et quelle horreur 4+6 n
Sont, loin de lui, | le prix de mon ardeur ! 4+6 n
Non, juste ciel ! | il vaut mieux qu'il l'ignore. 4+6 o
130 « Il partit donc ; | et moi je m'en allai, 4+6 f
Loin des soupçons | d'une ville indiscrète, 4+6 a
Chercher aux champs | une sombre retraite, 4+6 a
Conforme aux soins | de mon cœur désolé. 4+6 f
Mes parents morts, | libre dans ma tristesse, 4+6 b
135 Cachée au monde, | et fuyant tous les yeux, 4+6 k
Dans le secret | le plus mystérieux 4+6 k
J'ensevelis | mes pleurs et ma grossesse. 4+6 b
Mais par malheur, | hélas ! je suis la nièce 4+6 b
De l'archevêque… | » A ces funestes mots, 4+6 q
140 Elle sentit | redoubler ses sanglots. 4+6 q
Puis vers le ciel | tournant ses yeux en larmes : 4+6 r
« J'avais, dit-elle, | en secret mis au jour 4+6 g
Le tendre fruit | de mon furtif amour ; 4+6 g
Avec mon fils | consolant mes alarmes, 4+6 r
145 De mon amant | j'attendais le retour. 4+6 g
A l'archevêque | il prit en fantaisie 4+6 s
De venir voir | quelle espèce de vie 4+6 s
Menait sa nièce | au fond de ses forêts 4+6 t
Pour ma campagne | il quitta son palais. 4+6 t
150 Il fut touché | de mes faibles attraits : 4+6 t
Cette beauté, | présent cher et funeste, 4+6 u
Ce don fatal, | qu'aujourd'hui je déteste, 4+6 u
Perça son cœur | des plus dangereux traits. 4+6 t
Il s'expliqua : | ciel ! que je fus surprise ! 4+6 v
155 Je lui parlai | des devoirs de son rang, 4+6 w
De son état, | des nœuds sacrés du sang : 4+6 w
Je remontrai | l'horreur de l'entreprise ; 4+6 v
Elle outrageait | la nature et l'Église. 4+6 v
Hélas ! j'eus beau | lui parler de devoir, 4+6 j
160 Il s'entêta | d'un chimérique espoir. 4+6 j
Il se flattait | que mon cœur indocile 4+6 x
D'aucun objet | ne s'était prévenu, 4+6 y
Qu'enfin l'amour | ne m'était point connu, 4+6 y
Que son triomphe | en serait plus facile ; 4+6 x
165 Il m'accablait | de ses soins fatigants, 4+6 z
De ses désirs | rebutés et pressants. 4+6 z
« Hélas ! un jour, | que toute à ma tristesse 4+6 b
Je relisais | cette douce promesse, 4+6 b
Que de mes pleurs | je mouillais cet écrit, 4+6 a
170 Mon cruel oncle | en lisant me surprit. 4+6 a
Il se saisit, | d'une main ennemie, 4+6 s
De ce papier | qui contenait ma vie : 4+6 s
Il lut ; il vit | dans cet écrit fatal 4+6 b
Tous mes secrets, | ma flamme, et son rival. 4+6 b
175 Son âme alors, | jalouse et forcenée, 4+6 c
A ses désirs | fut plus abandonnée. 4+6 c
Toujours alerte, | et toujours m'épiant, 4+6 d
Il sut bientôt | que j'avais un enfant. 4+6 d
Sans doute un autre | en eût perdu courage. 4+6 g
180 Mais l'archevêque | en devint plus ardent ; 4+6 d
Et se sentant | sur moi cet avantage : 4+6 g
« Ah ! me dit-il, | n'est-ce donc qu'avec moi 4+6 u
« Que vous avez | la fureur d'être sage ? 4+6 g
« Et vos faveurs | seront le seul partage 4+6 g
185 « De l'étourdi | qui ravit votre foi ! 4+6 u
« Osez-vous bien | me faire résistance ? 4+6 l
« Y pensez-vous ? | Vous ne méritez pas 4+6 c
« Le fol amour | que j'ai pour vos appas : 4+6 c
« Cédez sur l'heure, | ou craignez ma vengeance. » 4+6 l
190 Je me jetai | tremblante à ses genoux ; 4+6 d
J'attestai Dieu, | je répandis des larmes. 4+6 r
Lui, furieux | d'amour et de courroux, 4+6 d
En cet état | me trouva plus de charmes. 4+6 r
Il me renverse, | et va me violer ; 4+6 f
195 A mon secours | il fallut appeler : 4+6 f
Tout son amour | soudain se tourne en rage. 4+6 g
D'un oncle, ô ciel, | souffrir un tel outrage ! 4+6 g
De coups affreux | il meurtrit mon visage. 4+6 g
On vient au bruit ; | mon oncle au même instant 4+6 d
200 Joint à son crime | un crime encor plus grand : 4+6 d
« Chrétiens, dit-il, | ma nièce est une impie ; 4+6 s
« Je l'abandonne, | et je l'excommunie : 4+6 s
« Un hérétique, | un damné suborneur, 4+6 n
« Publiquement | a fait son déshonneur ; 4+6 n
205 « L'enfant qu'ils ont | est un fruit d'adultère. 4+6 j
« Que Dieu confonde | et le fils et la mère 4+6 j
« Et puisqu'ils ont | ma malédiction, 4+6 d
« Qu'ils soient livrés | à l'inquisition ! » 4+6 d
« Il ne fit point | une menace vaine ; 4+6 f
210 Et dans Milan | le traître arrive à peine, 4+6 f
Qu'il fait agir | le grand inquisiteur. 4+6 n
On me saisit, | prisonnière on m'entraîne 4+6 f
Dans des cachots, | où le pain de douleur 4+6 n
Était ma seule | et triste nourriture : 4+6 m
215 Lieux souterrains, | lieux d'une nuit obscure, 4+6 m
Séjour des morts, | et tombeau des vivants ! 4+6 z
Après trois jours | on me rend la lumière, 4+6 j
Mais pour la perdre | au milieu des tourments. 4+6 z
Vous les voyez, | ces brasiers dévorants 4+6 z
220 C'est là qu'il faut | expirer à vingt ans. 4+6 z
Voilà mon lit | à mon heure dernière ! 4+6 j
C'est-là, c'est-là, | sans votre bras vengeur, 4+6 n
Qu'on m'arrachait | la vie avec l'honneur ! 4+6 n
Plus d'un guerrier | aurait, selon l'usage, 4+6 g
225 Pris ma défense, | et pour moi combattu ; 4+6 y
Mais l'archevêque | enchaîne leur vertu : 4+6 y
Contre l'Église | ils n'ont point de courage. 4+6 g
Qu'attendre, hélas ! | d'un cœur italien ? 4+6 g
Ils tremblent tous | à l'aspect d'une étole ; 4+6 h
230 Mais un Français | n'est alarmé de rien, 4+6 g
Et braverait | le pape au Capitole. » 4+6 h
A ces propos, | Dunois piqué d'honneur, 4+6 n
Plein de pitié | pour la belle accusée, 4+6 c
Plein de courroux | pour son persécuteur, 4+6 n
235 Brûlait déjà | d'exercer sa valeur, 4+6 n
Et se flattait | d'une victoire aisée. 4+6 c
Bien surpris fut | de se voir entouré 4+6 f
De cent archers, | dont la cohorte fière 4+6 j
L'investissait | noblement par derrière. 4+6 j
240 Un cuistre en robe, | avec bonnet carré, 4+6 f
Criait d'un ton | de vrai miserere : 4+6 f
« On fait savoir, | de par la sainte Église, 4+6 v
Par monseigneur, | pour la gloire de Dieu, 4+6 i
A tous chrétiens | que le ciel favorise, 4+6 v
245 Que nous venons | de condamner au feu 4+6 i
Cet étranger, | ce champion profane, 4+6 j
De Dorothée | infâme chevalier, 4+6 f
Comme infidèle, | hérétique, et sorcier ; 4+6 f
Qu'il soit brûlé | sur l'heure avec son âne. » 4+6 j
250 Cruel prélat, | Busiris en soutane, 4+6 j
C'était, perfide, | un tour de ton métier ; 4+6 f
Tu redoutais | le bras de ce guerrier ; 4+6 f
Tu t'entendais | avec le saint-office 4+6 v
Pour opprimer, | sous le nom de justice, 4+6 v
255 Quiconque eût pu | lever le voile affreux 4+6 k
Dont tu cachais | ton crime à tous les yeux. 4+6 k
Tout aussitôt | l'assassine cohorte, 4+6 k
Du saint-office | abominable escorte, 4+6 k
Pour se saisir | du superbe Dunois, 4+6 i
260 Deux pas avance, | et recule de trois ; 4+6 i
Puis marche encor ; | puis se signe, et s'arrête. 4+6 a
Sacrogorgon, | qui tremblait à leur tête, 4+6 a
Leur crie : « Allons, | il faut vaincre ou périr ; 4+6 l
De ce sorcier | tâchons de nous saisir. » 4+6 l
265 Au milieu d'eux | les diacres de la ville, 4+6 x
Les sacristains | arrivent à la file : 4+6 x
L'un tient un pot, | et l'autre un goupillon ; 4+6 d
Ils font leur ronde, | et de leur eau salée 4+6 c
Benoîtement | aspergent l'assemblée. 4+6 c
270 On exorcise, | on maudit le démon ; 4+6 d
Et le prélat, | toujours l'âme troublée, 4+6 c
Donne partout | sa bénédiction. 4+6 d
Le grand Dunois, | non sans émotion, 4+6 d
Voit qu'on le prend | pour envoyé du diable : 4+6 w
275 Lors saisissant | de son bras redoutable 4+6 w
Sa grande épée, | et de l'autre montrant 4+6 d
Un chapelet, | catholique instrument, 4+6 d
De son salut | cher et sacré garant : 4+6 d
« Allons, dit-il, | venez à moi, mon âne. » 4+6 j
280 L'âne descend, | Dunois monte, et soudain 4+6 g
Il va frappant, | en moins d'un tour de main, 4+6 g
De ces croyants | la cohorte profane. 4+6 j
Il perce à l'un | le sternum et le bras ; 4+6 c
Il atteint l'autre | à l'os qu'on nomme atlas ; 4+6 c
285 Qui voit tomber | son nez et sa mâchoire, 4+6 m
Qui son oreille, | et qui son humérus ; 4+6 n
Qui pour jamais | s'en va dans la nuit noire, 4+6 m
Et qui s'enfuit | disant ses oremus. 4+6 n
L'âne, au milieu | du sang et du carnage, 4+6 g
290 Du paladin | seconde le courage ; 4+6 g
Il vole, il rue, | il mord, il foule aux pieds 4+6 o
Ce tourbillon | de faquins effrayés. 4+6 o
Sacrogorgon, | abaissant sa visière, 4+6 j
Toujours jurant, | s'en allait en arrière ; 4+6 j
295 Dunois le joint, | l'atteint à l'os pubis : 4+6 b
Le fer sanglant | lui sort par le coccix : 4+6 b
Le vilain tombe, | et le peuple s'écrie : 4+6 s
« Béni soit Dieu ! | le barbare est sans vie. » 4+6 s
Le scélérat | encor se débattait 4+6 z
300 Sur la poussière, | et son cœur palpitait, 4+6 z
Quand le héros | lui dit : « Âme traîtresse, 4+6 b
L'enfer t'attend ; | crains le diable, et confesse 4+6 b
Que l'archevêque | est un coquin mitré, 4+6 f
Un ravisseur, | un parjure avéré ; 4+6 f
305 Que Dorothée | est l'innocence même, 4+6 r
Qu'elle est fidèle | au tendre amant qu'elle aime, 4+6 r
Et que tu n'es | qu'un sot et qu'un fripon. 4+6 d
— Oui, monseigneur, | oui, vous avez raison : 4+6 d
Je suis un sot, | la chose est par trop claire, 4+6 j
310 Et votre épée | a prouvé cette affaire. » 4+6 j
Il dit : son âme | alla chez le démon. 4+6 d
Ainsi mourut | le fier Sacrogorgon. 4+6 d
Dans l'instant même, | où ce bravache infâme 4+6 t
A Belzébuth | rendait sa vilaine âme, 4+6 t
315 Devers la place | arrive un écuyer, 4+6 f
Portant salade | avec lance dorée : 4+6 c
Deux postillons | à la jaune livrée 4+6 c
Allaient devant. | C'était chose assurée 4+6 c
Qu'il arrivait | quelque grand chevalier. 4+6 f
320 A cet objet, | la belle Dorothée, 4+6 c
D'étonnement | et d'amour transportée : 4+6 c
« Ah, Dieu puissant ! | se mit-elle à crier, 4+6 f
Serait-ce lui ! | serait-il bien possible ! 4+6 p
A mes malheurs | le ciel est trop sensible. » 4+6 p
325 Les Milanais, | peuple très-curieux, 4+6 k
Vers l'écuyer | avaient tourné les yeux. 4+6 k
Eh ! cher lecteur, | n'êtes vous pas honteux 4+6 k
De ressembler | à ce peuple volage, 4+6 g
Et d'occuper | vos yeux et votre esprit 4+6 a
330 Du changement | qui dans Milan se fit ? 4+6 a
Est-ce donc là | le but de mon ouvrage ? 4+6 g
Songez, lecteurs, | aux remparts d'Orléans, 4+6 z
Au roi de France, | aux cruels assiégeants, 4+6 z
A la Pucelle, | à l'illustre amazone, 4+6 q
335 La vengeresse | et du peuple et du trône, 4+6 q
Qui, sans jupon, | sans pourpoint ni bonnet, 4+6 z
Parmi les champs | comme un centaure allait, 4+6 z
Ayant en Dieu | sa plus ferme espérance, 4+6 l
Comptant sur lui | plus que sur sa vaillance, 4+6 l
340 Et s'adressant | à monsieur saint Denys, 4+6 c
Qui cabalait | alors en paradis 4+6 c
Contre saint George | en faveur de la France. 4+6 l
Surtout, lecteur, | n'oubliez point Agnès, 4+6 t
Ayez l'esprit | tout plein de ses attraits : 4+6 t
345 Tout honnête homme, | à mon gré, doit s'y plaire. 4+6 j
Est-il quelqu'un | si morne et si sévère, 4+6 j
Que pour Agnès | il soit sans intérêt ? 4+6 z
Et franchement | dites-moi, s'il vous plaît, 4+6 z
Si Dorothée | au feu fut condamnée ; 4+6 c
350 Si le Seigneur, | du haut du firmament, 4+6 d
Sauva le jour | à cette infortunée : 4+6 c
Semblable cas | advient très-rarement. 4+6 d
Mais que l'objet | où votre cœur s'engage, 4+6 g
Pour qui vos pleurs | ne peuvent s'essuyer, 4+6 f
355 Soit dans les bras | d'un robuste aumônier, 4+6 f
Ou semble épris | pour quelque jeune page, 4+6 g
Cet accident | peut être est plus commun ; 4+6 r
Pour l'amener | ne faut miracle aucun. 4+6 r
Je l'avouerai, | j'aime toute aventure 4+6 m
360 Qui tient de près | à l'humaine nature ; 4+6 m
Car je suis homme, | et je me fais honneur 4+6 n
D'avoir ma part | aux humaines faiblesses ; 4+6 s
J'ai dans mon temps | possédé des maîtresses. 4+6 s
Et j'aime encor | à retrouver mon cœur. 4+6 n
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