Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
QUI_1/QUI16
Pierre QUILLARD
La lyre héroïque et dolente
1897
DE SABLE ET D'OR
VERS L'AURORE
LE PÈLERINAGE HORS DE L'OMBRE
A Rémy de Gourmont.
I
Âme riche de nuit, | d'étoiles et de rêves 6+6 z
Qui puisas des trésors | aux urnes d'un tombeau 6+6 a
N'abandonneras-tu | jamais tes blêmes grèves 6+6 z
Pour cette ville en fleurs | sous le printemps nouveau ? 6+6 a
5 Âme riche de nuit, | mon âme, tu recèles 6+6 b
Assez d'astres perdus | et de soleils éteints : 6+6 c
Viens connaître la chair | et les lèvres de celles 6+6 b
Qui tendent leurs seins nus | aux pourpres des matins 6+6 c
Et font en souriant | à l'aurore sereine 6+6 d
10 Fluer entre leurs doigts | le sable et leurs cheveux, 6+6 e
Pour que, vivante enfin, | ma bouche amère apprenne 6+6 d
A goûter le miel blond | des heures. Tu le veux, 6+6 e
Âme lasse déjà | des ivresses futures, 6+6 f
Toi qui n'as rien chéri | que les pleurs et la mort : 6+6 g
15 Le vent gonfle d'amour | les voiles toujours pures : 6+6 f
Loin de l'île où la blanche | Hymnis repose et dort, 6+6 g
Pour moi seul, dans le vain | cénotaphe des roses, 6+6 h
Nous irons conquérir | son corps ressuscité ; 6+6 i
Sans doute elle revit | par les métempsycoses 6+6 h
20 Sur le sol oublieux | que parait sa beauté 6+6 i
Et parmi les parfums | sauvages des galères, 6+6 j
Les chiens, les portefaix | qui geignent en marchant, 6+6 k
Elle va, lourde encor | des gloires tumulaires, 6+6 j
Sans que nul ait compris | la douceur de son chant. 6+6 k
II
25 L'écume violée | a neigé de la proue ; 6+6 l
Les mauves qui mouillaient | leurs plumes aux flots noirs 6+6 m
Ont secoué le sel | des vagues sur ma joue. 6+6 l
Le sel des vagues ! Tels | les pleurs d'antiques soirs 6+6 m
Enrichirent jadis | de gemmes dissipées 6+6 n
30 Ces yeux fous aujourd'hui | d'aventure et d'espoirs. 6+6 m
Puis la forêt flamba | de cruelles épées ; 6+6 n
Mais plus d'ombre tombait | des branchages pieux 6+6 e
Pour voiler le sommeil | inquiet des Napées. 6+6 n
Ainsi les âpres bois | ont défendu mes yeux 6+6 e
35 Jadis et quand le jour | en troublait l'eau tranquille, 6+6 o
Ils étalaient dans l'air | leur deuil impérieux. 6+6 e
Or maintenant, voici | les portes de la ville ; 6+6 o
Je franchirai les murs | sans désir de retour 6+6 p
Heureux si dans la solitude | où je m'exile 8+4 o
40 L'ombre descend sur moi | du temple et de la tour. 6+6 p
III
Farouche de voir les aurores 8 q
Et les soleils épanouis, 8 r
L'eau tressaillait dans les amphores 8 q
Sur la marge grise des puits 8 r
45 Et les ténèbres souterraines, 8 s
Les iris de sombre cristal 8 t
Se flétrissaient comme des reines 8 s
Captives d'un soudard brutal. 8 t
Les servantes et les esclaves 8 u
50 Riaient à l'entour ; mais tu vins, 8 c
Et tu voilas de voiles graves 8 u
Les filles des antres divins. 8 c
Protectrice des eaux dolentes 8 v
Qui sais les rites d'autrefois, 8 w
55 J'ai trempé mes lèvres tremblantes 8 v
A la coupe triste où tu bois : 8 w
Souviens-toi d'heures et d'années 8 n
Et de soleils, étends les mains 8 c
Vers les clématites fanées, 8 n
60 Vers les étoiles des jasmins ; 8 c
Et sur la terre des merveilles 8 x
Que pavoisaient de nobles cieux 8 e
Fais refleurir les belles treilles 8 x
De nos jardins silencieux. 8 e
mètre profils métriques : 8, 6=6
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