Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
MON_1/MON162
Robert de Montesquiou
LES HORTENSIAS BLEUS
1896
IV
CHAMBRE OBSCURE
NÉNIES
A Ghislaine de CARAMAN-CHIMAY.
CLXI
Princesse en qui le ciel mit un esprit si doux.
RACINE.
Le front pareil au front | de Psyché de Capoue 6+6 a
Purement étalait | son modelé serein ; 6+6 b
Avec, autour, l'anneau | de nattes qui se noue, 6+6 a
Sur le blanc du Paros | tressant un blond d'airain ; 6+6 b
5 Au point, que, sous le doigt | de l'ange noir qui tue, 6+6 a
Et dont le geste glace, | et dont l'étreinte mord, 6+6 b
On pensait voir, plutôt, | s'étendre une statue, 6+6 a
Un marbre qui sommeille, | un albâtre qui dort. 6+6 b
Païenne par la forme | et sainte par la flamme ; 6+6 a
10 Ange par le regard, | déesse par les yeux ; 6+6 b
Minerve par le front, | et Maria par l'âme ; 6+6 a
A demi de l'Olympe, | à moitié dans les cieux. 6+6 b
Le vol harmonieux | des mains spirituelles 6+6 a
Qui faisaient résonner | l'âme des clavecins, 6+6 b
15 Sous tes gestes raidis, | garderont, virtuelles, 6+6 a
Les chansons, dans leurs doigts, | encloses par essaims. 6+6 b
Hélas ! c'en est donc fait | des extases divines 6+6 a
Que versait le doigté | mélodique et subtil 6+6 b
Des phalanges, aussi | candides, aussi fines 6+6 a
20 Que des lys dont le rythme | eût été le pistil. 6+6 b
Mais non ; l'œil de l'esprit | qui vite se dessille 6+6 a
Te voit remplir aux cieux | un office pareil, 6+6 b
Où tu vas alterner | avec Sainte Cécile 6+6 a
Sur le clavier divin | des rayons du soleil ! 6+6 b
25 Tu me pardonneras | peut-être ma faiblesse 6+6 a
Toi qui, dans ce vil monde, | étais la pureté, 6+6 b
En jugeant ce que m'a | conféré de noblesse 6+6 a
La compréhension | de toute ta clarté. 6+6 b
Tu fus Celle qui passe, | incorruptible et pure, 6+6 a
30 Parmi le groupe affreux | des laideurs d'ici-bas, 6+6 b
Que ta candeur voilait | comme d'une guipure ; 6+6 a
Et qui, ne faisant pas | le mal, n'y croyait pas. 6+6 b
C'est ainsi qu'observant | ta mort qui m'intimide, 6+6 a
Et qui pèse d'en haut | notre fragilité, 6+6 b
35 J'ai senti sur mon front, | de ton regard humide, 6+6 a
S'épandre encor l'absoute | et couler la bonté. 6+6 b
Un mot encor pour toi, | Muse à la fois et Sainte, 6+6 a
Que de tes cheveux blonds | je revois toujours ceinte 6+6 a
Sous ton profil de vierge, | et ton air étoilé 6+6 b
40 Que pas un seul oubli, | dans nos cœurs, n'a voilé. 6+6 b
Diadème natté | de tes deux nobles tresses 6+6 a
Qu'on aimait contempler | dans les jours de détresses, 6+6 a
Ébauchant ici-bas | l'auréole d'or pur 6+6 b
Dont ton front aujourd'hui | se nimbe, dans l'azur, 6+6 b
45 Pour ta candeur, gardée | au milieu de nos fanges, 6+6 a
Par-dessus les berceaux | de tes fils, et leurs langes : 6+6 a
Prorogée au delà | de la maternité, 6+6 b
Et rapportée entière | à ton éternité. 6+6 b
Elle n'eût pas aimé | vous voir sans fin morose : 6+6 a
50 Elle n'eût pas voulu | nous voir toujours pleurer ; 6+6 b
Elle savait que c'est | le devoir d'une rose 6+6 a
D'être rose ; et la loi | d'un astre, d'éclairer. 6+6 b
Comme elle connaissait | que le regret empire 6+6 a
La vie, assez déjà | triste sans qu'il advint ; 6+6 b
55 Je crois qu'elle eut rêvé | que d'Elle on se souvînt 6+6 b
Ainsi que d'une fleur | cueillie, et qu'on respire. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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