Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LOU_1/LOU3
Pierre LOUŸS
ŒUVRES COMPLÈTES
TOME XIII
POÉSIES
1888-1920
PREMIERS VERS
LE SOIR À LA CAMPAGNE
Tout est silence et calme, | et les vents sont tombés. 6+6 a
Les arbres onduleux | ont étendu leurs branches, 6+6 b
Et le soleil, dardant | ses rayons orangés, 6+6 a
Incendie au couchant | les longues fermes blanches. 6+6 b
5 Les ombres sur le sol | rampent démesurées ; 6+6 a
Et les filles des champs, | revenant du lavoir, 6+6 b
Foulent de leurs pieds nus | les terres labourées, 6+6 a
Alanguissant le pas | dans le calme du soir. 6+6 b
Les humides prairies | au couchant étendues 6+6 a
10 Se voilent de vapeurs | qui montent lentement 6+6 b
Et vont couvrir bientôt | les terres disparues 6+6 a
Sous les brouillards bleuis | qui tremblent faiblement. 6+6 b
Le ciel est rose tendre | et l’azur sans frissons. 6+6 a
Au ras du sol mouillé | l’ardent soleil flamboie, 6+6 b
15 Et la nuit toute grise | envahit les sillons 6+6 a
Et atteint chaque chose | et la baigne et la noie. 6+6 b
Oh ! quel bonheur tranquille ! |… Hélas ! est il possible 6+6 a
Que ce que je sens là | se soit toujours senti, 6+6 b
Que tous les jeunes gens | au cœur tendre et sensible 6+6 a
20 Au spectacle du soir | se soient émus aussi ! 6+6 b
Que mon enthousiasme | ardent et poétique 6+6 a
Pour tout ce que je sens | ne soit pas même à moi, 6+6 b
S’étant développé | de manière identique 6+6 a
Chez tous les jeunes gens | d’après la même loi ! 6+6 b
25 Oh ! rien d’original ! | Rien de nouveau !… J’enrage ! 6+6 a
Rien qui ne se soit vu ! | Rien qui ne se soit dit ! 6+6 b
Et pas un sentiment | qui n’ait eu son langage ! 6+6 a
Pas un état d’esprit | qu’un penseur n’ait traduit ! 6+6 b
Hélas ! Je suis banal | quand je veux exprimer 6+6 a
30 Que le printemps est doux, | que les filles sont belles, 6+6 b
Que j’ai besoin de jouir, | que j’ai besoin d’aimer, 6+6 a
Et que les nuits d’été | semblent surnaturelles ! 6+6 b
L’amour, brutalité ! | Le printemps, lieu commun ! 6+6 a
Eh bien ! moi, j’ai besoin | de parler de ces choses, 6+6 b
35 Des immenses forêts, | de leur âcre parfum, 6+6 a
De la nuit et du soir, | des femmes et des roses ! 6+6 b
Et je veux découvrir | des accents inconnus 6+6 a
Pour peindre les bonheurs | énormes de la vie 6+6 b
Et pour chanter enfin | mes désirs éperdus, 6+6 a
40 Mes enthousiasmes fous | et ma joie infinie. 6+6 b
La jeunesse et l’amour | débordent de mon âme, 6+6 a
Et la sève envahit | mon corps de dix-sept ans, 6+6 b
Et j’ai besoin d’aimer, | d’adorer une femme, 6+6 a
Car mon âme s’emplit | des souffles du printemps ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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