Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LEC_1/LEC2
Charles-Marie LECONTE DE LISLE
POÈMES BARBARES
1862
La Vigne de Naboth
I
Au fond de sa demeure, | Akhab, l'œil sombre et dur, 6+6 a
Sur sa couche d'ivoire | et de bois de Syrie 6+6 b
Gît, muet et le front | tourné contre le mur. 6+6 a
Sans manger ni dormir, | le roi de Samarie 6+6 b
5 Reste là, plein d'ennuis, | comme, en un jour d'été, 6+6 c
Le voyageur courbé | sur la source tarie. 6+6 b
Akhab a soif du vin | de son iniquité, 6+6 c
Et conjure, en son cœur | que travaille la haine, 6+6 a
La Vache de Béth-El | et l'idole Astarté. 6+6 c
10 Il songe : — Suis-je un roi | si ma colère est vaine ? 6+6 a
Par Baal ! j'ai chassé | trois fois les cavaliers 6+6 b
De Ben-Hadad de Tyr | au travers de la plaine. 6+6 a
J'ai vu ceux de Damas | s'en venir par milliers, 6+6 b
Le sac aux reins, la corde | au cou, dans la poussière, 6+6 c
15 Semblables aux chameaux | devant les chameliers ; 6+6 b
J'ai, d'un signe, en leur gorge | étouffé la prière, 6+6 c
L'écume de leur sang | a rougi les hauts lieux, 6+6 a
Et j'ai nourri mes chiens | de leur graisse guerrière. 6+6 c
Mes prophètes sont très | savants, et j'ai trois Dieux 6+6 a
20 Très puissants, pour garder | mon royaume et ma ville 6+6 b
Et ployer sous le joug | mon peuple injurieux. 6+6 a
Et voici que ma gloire | est une cendre vile, 6+6 b
Et mon sceptre un roseau | des marais, qui se rompt 6+6 c
Aux rires insulteurs | de la foule servile ! 6+6 b
25 C'est le Fort de Juda | qui m'a fait cet affront, 6+6 c
Parce que j'ai dressé, | sous le noir térébinthe, 6+6 a
L'image de Baal, | une escarboucle au front. 6+6 c
Deux fois teint d'écarlate | et vêtu d'hyacinthe, 6+6 a
Comme un soleil, le Dieu | reluit, rouge et doré, 6+6 b
30 Sur le socle de jaspe, | au milieu de l'enceinte. 6+6 a
Mais s'il ne m'a vengé | demain, j'abolirai 6+6 b
Son culte, et l'on verra | se dresser à sa place 6+6 c
Le Veau d'or d'Ephraïm | sur l'autel adoré. 6+6 b
Un désir impuissant | me consume et m'enlace ! 6+6 c
35 Sous la corne du bœuf, | sous le pied de l'ânon, 6+6 a
Je suis comme un lion | mort, qu'on outrage en face. 6+6 c
Quand j'ai dit : Je le veux ! | un homme m'a dit : Non ! 6+6 a
Il vit encor, sans peur | que le glaive le touche. 6+6 b
La honte est dans mon cœur, | l'opprobre est sur mon nom. — 6+6 a
40 Tel, le fils de Hamri | se ronge sur sa couche. 6+6 b
Ses cheveux dénoués | pendent confusément, 6+6 c
Et sa dent furieuse | a fait saigner sa bouche. 6+6 b
Auprès du morne Roi | paraît en ce moment 6+6 c
La fille d'Eth-Baal, | la femme aux noires tresses 6+6 a
45 De Sidon, grande et belle, | et qu'il aime ardemment. 6+6 c
Astarté l'a bercée | aux bras de ses prêtresses ; 6+6 a
Elle sait obscurcir | la lune et le soleil, 6+6 b
Et courber les lions | au joug de ses caresses. 6+6 a
De ses yeux sombres sort | l'effluve du sommeil, 6+6 b
50 Et ceux qu'a terrassés | une mort violente 6+6 c
S'agitent à sa voix | dans la nuit sans réveil. 6+6 b
Elle approche du lit, | majestueuse et lente, 6+6 c
Regarde, et dit : — Qu'a donc | mon Seigneur ? et quel mal 6+6 a
Dompte le cèdre altier | comme une faible plante ? 6+6 c
55 A-t-il vu quelque spectre | envoyé par Baal ? 6+6 a
Le jour tombe. Que mon | Seigneur se lève et mange ! 6−6 b
Parle, ô Chef ! Quel ennui | trouble ton cœur royal ? — 6+6 a
Akhab lui dit : — O femme, | il faut que je me venge ; 6+6 b
Et je ne puis dormir, | ni boire, ni manger, 6+6 c
60 Que le sang de Naboth | n'ait fumé dans la fange. 6+6 b
Sa vigne est très fertile | et touche à mon verger. 6+6 c
Or, j'ai dit à cet homme, | au seuil de sa demeure : 6+6 a
Ceci me plaît ; veux-tu | le vendre ou l'échanger ? 6+6 c
Il m'a dit : C'est mon champ | paternel. Que je meure, 6+6 a
65 Le voudrais-tu payer | par grain un schéqel d'or, 6+6 b
Si je le vends jamais, | fût-ce à ma dernière heure ! 6+6 a
Quand tu me donnerais | la plaine de Phogor, 6+6 b
Ramoth en Galaad, | Seïr et l'Idumée, 6+6 c
Et ta maison d'ivoire, | et ton riche trésor, 6+6 b
70 O Roi, je garderais | ma vigne bien aimée ! 6+6 c
C'est ainsi qu'a parlé | Naboth le vigneron, 6+6 a
Tranquille sur le seuil | de sa porte enfumée. — 6+6 c
— Certes, ce peuple, Akhab, | par le Dieu d'Akkaron ! 6+6 a
Dit Jézabel, jouit, | malgré son insolence, 6+6 b
75 D'un roi très patient, | très docile et très bon. 6+6 a
Que ne le frappais-tu | du glaive ou de la lance ? 6+6 b
L'onagre est fort rétif | s'il ne courbe les reins ; 6+6 c
Qui cède au dromadaire | accroît sa violence. — 6+6 b
— C'est le Jaloux, le Fort | de Juda que je crains, 6+6 c
80 Dit Akhab. C'est le Dieu | de Naboth et d'Élie : 6+6 a
Du peuple furieux | il briserait les freins. 6+6 c
Je verrais s'écrouler | ma fortune avilie, 6+6 a
Et serais comme un bœuf | qui mugit sur l'autel 6+6 b
Pendant que le couteau | s'aiguise et qu'on le lie. 6+6 a
85 Non ! J'attendrai. Les Dieux | de Dan et de Beth-El 6+6 b
Accorderont sans doute | à qui soutient leur cause — 6+6 c
De tuer sûrement | Naboth de Jizréhel. — 6+6 b
— Lève-toi donc et mange, | ô Chef, et te repose, 6+6 c
Dit la Sidonienne | avec un rire amer ; 6+6 a
90 Moi seule je ferai | ce que mon Seigneur n'ose. 6+6 c
Demain, quand le soleil | s'en ira vers la mer, 6+6 a
Sans que ta main royale | ait touché cet esclave, 6+6 b
J'atteste qu'il mourra | sur le mont de Somer. 6+6 a
Et l'homme de Thesbé | pourra baver sa bave 6+6 b
95 Et hurler, du Karmel | à l'Horeb, comme un chien 6+6 c
Affamé, qui s'enfuit | aussitôt qu'on le brave. 6+6 b
Mon Seigneur lui dira : | Qu'ai-je fait, sinon rien ? 6+6 c
A-t-on trouvé ma main | dans ce meurtre, ou mon signe ? — 6+6 a
Akhab, en souriant, | dit : — O femme, c'est bien ! 6+6 c
100 J'aurai le sang de l'homme | et le vin de sa vigne ! — 6+6 a
II
Vers l'heure où le soleil | allume au noir Liban 6+6 b
Comme autant de flambeaux | les cèdres par les rampes, 6+6 a
Les Anciens sont assis, | hors des murs, sur un banc. 6+6 b
Ce sont trois beaux vieillards, | avec de larges tempes, 6+6 c
105 De grands fronts, des nez d'aigle | et des yeux vifs et doux, 6+6 b
Qui, sous l'épais sourcil, | luisent comme des lampes. 6+6 c
Dans leurs robes de lin, | la main sur les genoux, 6+6 a
Ils siègent, les pieds nus | dans la fraîcheur des sables, 6+6 c
A l'ombre des figuiers | d'où pendent les fruits roux. 6+6 a
110 La myrrhe a parfumé | leurs barbes vénérables ; 6+6 b
Et leurs longs cheveux blancs | sur l'épaule et le dos 6+6 a
S'épandent, aux flocons | de la neige semblables. 6+6 b
Mais leur cœur est plus noir | que le sépulcre clos ; 6+6 c
Leur cœur comme la tombe | est plein de cendre morte ; 6+6 b
115 L'avarice a séché | la moelle de leurs os. 6+6 c
Vils instruments soumis | à la main la plus forte, 6+6 a
Ils foulent à prix d'or | l'équité sainte aux pieds, 6+6 c
Sachant ce que le sang | des malheureux rapporte. 6+6 a
Naboth est devant eux, | debout, les bras liés, 6+6 b
120 Comme pour l'holocauste | un bouc, noire victime 6+6 a
Par qui les vieux péchés | de tous sont expiés. 6+6 b
Deux fils de Bélial, | d'une voix unanime, 6+6 c
Disent : — Voici. Cet homme | est vraiment criminel. 6+6 b
Qu'il saigne du blasphème | et qu'il meure du crime ! 6+6 c
125 Or, il a blasphémé | le nom de l'Éternel. — 6+6 a
Naboth dit : — L'Éternel | m'entend et me regarde. 6+6 c
Je suis pur devant lui, | n'ayant rien fait de tel. 6+6 a
J'atteste le Très-Haut | et me fie en sa garde. 6+6 b
Ceux-ci mentent. Craignez, | Pères, de mal juger, 6+6 a
130 Car Dieu juge à son tour, | qu'il se hâte ou qu'il tarde. 6+6 b
Voyez ! Ai-je fermé | ma porte à l'étranger ? 6+6 c
Ai-je tari le puits | du pauvre pour mon fleuve ? 6+6 b
L'orphelin faible et nu, | m'a-t-on vu l'outrager ? 6+6 c
Qu'ils se lèvent, ceux-là | qui m'ont mis à l'épreuve ! 6+6 a
135 Qu'ils disent : Nous avions | soif et nous avions faim, 6+6 c
L'étranger, l'orphelin, | et le pauvre et la veuve ; 6+6 a
Naboth le vigneron | n'a point ouvert sa main, 6+6 b
Naboth de Jizréhel, | irritant notre plaie, 6+6 a
Sous l'œil des affamés | a mangé tout son pain ! 6+6 b
140 Nul ne dira cela, | si sa parole est vraie. 6+6 c
Or, qui peut blasphémer | étant pur devant Dieu ? 6+6 b
Séparez le bon grain, | mes Pères, de l'ivraie. 6+6 c
Remettez d'un sens droit | toute chose en son lieu. 6+6 a
Si je mens, que le ciel | s'entr'ouvre et me dévore, 6+6 c
145 Que l'Exterminateur | me brûle de son feu ! — 6+6 a
Le plus vieux des Anciens | dit : — Il blasphème encore ! 6+6 b
Allez, lapidez-le, | car il parle très mal, 6+6 a
N'étant plein que de vent, | comme une outre sonore. — 6+6 b
Or, non loin des figuiers, | les fils de Bélial 6+6 c
150 Frappent le vigneron | avec de lourdes pierres ; 6+6 b
La cervelle et le sang | souillent ce lieu fatal. 6+6 c
Et Naboth rend l'esprit. | Les bêtes carnassières 6+6 a
Viendront, la nuit, hurler | sur le corps encor chaud, 6+6 c
Et les oiseaux plonger | leurs becs dans ses paupières. 6+6 a
155 En ce temps, Jézabel, | attentive au plus haut 6+6 b
Du palais, dit au Roi : | — Seigneur, la chose est faite : 6+6 a
Naboth est mort. O Chef, | monte en ton chariot. 6+6 b
Aux sons victorieux | des cymbales de fête, 6+6 c
Viens visiter ta vigne, | ô royal vigneron ! — 6+6 b
160 Et du sombre palais | tous deux quittent le faîte. 6+6 c
Ils vont. Et la trompette | éclate, et le clairon, 6+6 a
Et le sistre, et la harpe, | et le tambour. La foule 6+6 c
S'ouvre sous le poitrail | des chevaux de Sidon. 6+6 a
Le chariot de cèdre, | aux moyeux d'argent, roule ; 6+6 b
165 Et le peuple, saisi | de peur, s'est prosterné 6+6 a
Au passage du couple | abhorré qui le foule. 6+6 b
Mais voici. Sur le seuil | du juste assassiné, 6+6 c
Croisant ses bras velus | sur sa large poitrine, 6+6 b
Se dresse un grand vieillard, | farouche et décharné. 6+6 c
170 Son crâne est comme un roc | couvert d'herbe marine ; 6+6 a
Une sueur écume | à ses cheveux pendants, 6+6 c
Et le poil se hérisse | autour de sa narine. 6+6 a
Du fond de ses yeux creux | flambent des feux ardents. 6+6 b
D'un orteil convulsif, | comme un lion sauvage, 6+6 a
175 Il fouille la poussière | et fait grincer ses dents. 6+6 b
Sur le cuir corrodé | de son âpre visage 6+6 c
On lit qu'il a toujours | marché, toujours souffert, 6+6 b
Toujours vécu, plus fort | au sein du même orage ; 6+6 c
Qu'il a dormi cent nuits | dans l'antre noir ouvert 6+6 a
180 Aux gorges de l'Horeb ; | auprès des puits sans onde, 6+6 c
Qu'il a hurlé de soif | dans le feu du désert ; 6+6 a
Et qu'en ce siècle impur, | en qui le mal abonde, 6+6 b
Son maître a flagellé | d'un fouet étincelant 6+6 a
Et poussé sur les Rois | sa course vagabonde. 6+6 b
185 Or, les chevaux, soudain, | se cabrent, reculant 6+6 c
D'horreur devant ce spectre. | Ils courent, haut la tête, 6+6 b
Ivres, mâchant le mors, | et l'épouvante au flanc. 6+6 c
Arbres, buissons, enclos, | rocs, rien ne les arrête : 6+6 a
Ils courent, comme un vol | des démons de la nuit, 6+6 c
190 Comme un champ d'épis mûrs | fauchés par la tempête. 6+6 a
Tel, dans un tourbillon | de poussière et de bruit, 6+6 b
Malgré les cavaliers | pleins d'une clameur vaine, 6+6 a
Le cortège effaré | se disperse et s'enfuit. 6+6 b
L'attelage, ébranlant | le chariot qu'il traîne, 6+6 c
195 Se couche, les naseaux | dans le sable, et le Roi 6+6 b
Sent tournoyer sa tête | et se glacer sa veine. 6+6 c
Lentement il se lève, | et, tout blême d'effroi, 6+6 a
Regarde ce vieillard | sombre, que nul n'oublie, 6+6 c
Immobile, appuyé | contre l'humble paroi. 6+6 a
200 Akhab, avec un grand | frisson, dit : — C'est Élie 6+6 b
III
Alors, comme un torrent | fougueux, des monts tombé, 6+6 a
Qui roule flots sur flots | son bruit et sa colère, 6+6 b
Voici ce qu'à ce Roi | dit l'Homme de Thesbé : 6+6 c
— Malheur ! l'aigle a crié | de joie au bord de l'aire ; 6+6 b
205 Il aiguise son bec, | sachant qu'un juste est mort. 6+6 c
Le chien montre les dents, | hurle dans l'ombre et flaire. 6+6 a
Malheur ! l'aigle affamé | déchire et le chien mord, 6+6 c
Car la pierre du meurtre | est toute rouge et fume. 6+6 a
Donc, le Seigneur m'a dit : | Va ! je suis le Dieu fort ! 6+6 b
210 Je me lève dans la | fureur qui me consume ; 6−6 a
Le monde est sous mes pieds, | la foudre est dans mes yeux, 6+6 b
La lune et le soleil | nagent dans mon écume. 6+6 c
Va ! dis au meurtrier | qu'il appelle ses Dieux 6+6 b
A l'aide, car je suis | debout sur les nuées, 6+6 c
215 Et la vapeur du crime | enveloppe les cieux. 6+6 a
Dis-lui : Malheur, ô Chef | des dix prostituées, 6+6 c
Akhab, fils de Hamri, | le fourbe et le voleur ! 6+6 a
Les vengeances d'en haut | se sont toutes ruées. 6+6 b
A toi qui fais du sceptre | un assommoir, malheur ! 6+6 a
220 Auprès de la fournaise | ardente où tu trébuches 6+6 b
Le four chauffé sept fois | est sombre et sans chaleur. 6+6 c
L'ours plein de ruse est pris | dans ses propres embûches, 6+6 b
Et le vautour s'étrangle | avec l'os avalé, 6+6 c
Et le frelon s'étouffe | avec le miel des ruches. 6+6 a
225 Tu songeais : Tout est bien, | car je n'ai point parlé. 6+6 c
Allons ! Naboth est mort ; | sa vigne est mon partage. 6+6 a
Le Dieu d'Élie est sourd, | le Fort est aveuglé ! 6+6 b
Qui dira que ce meurtre | inique est mon ouvrage ? 6+6 a
Le lion de Juda | rugit et te répond. 6+6 b
230 Le Seigneur t'attendait | au seuil de l'héritage ! 6+6 c
O renard, ô voleur, | voici qu'au premier bond 6+6 b
Il te prend, te saisit | à la gorge, et se joue 6+6 c
De ta peur, l'œil planté | dans ta chair qui se fond. 6+6 a
Vermine d'Israël, | le Dieu fort te secoue 6+6 c
235 Des haillons de ce peuple, | et les petits enfants 6+6 a
Te verront te débattre | et grouiller dans la boue. 6+6 b
Le Seigneur dit : Je suis | l'effroi des triomphants, 6+6 a
Je suis le frein d'acier | qui brise la mâchoire 6+6 b
Des Couronnés, mangeurs | de biches et de faons. 6+6 c
240 Je fracasse leurs chars, | je souffle sur leur gloire ; 6+6 b
Ils sont tous devant moi | comme un sable mouvant, 6+6 c
Et j'enfouis leurs noms | perdus dans la nuit noire. 6+6 a
Donc, le sang de Naboth | crie en vous poursuivant, 6+6 c
Akhab de Samarie, | et toi, vile idolâtre ! 6+6 a
245 Le spectre de Naboth | sanglote dans le vent. 6+6 b
Dans le puits du désert | où filtre l'eau saumâtre, 6+6 a
Entre vos murs de cèdre | et sous l'épais figuier, 6+6 b
Dans les clameurs de fête | et dans les bruits de l'âtre 6+6 c
Dans le hennissement | de l'étalon guerrier, 6+6 b
250 Dans la chanson du coq | et de la tourterelle, 6+6 c
Akhab et Jézabel, | vous l'entendrez crier ! 6+6 a
Naboth est mort ! Les chiens | mangeront la cervelle 6+6 c
Du couple abominable | en son crime têtu ; 6+6 a
Ma fureur fauchera | cette race infidèle : 6+6 b
255 Comme un bon moissonneur, | de vigueur revêtu, 6+6 a
Qui tranche à tour de bras | les épis par centaines, 6+6 b
Je ferai le sol ras | jusqu'au moindre fétu. 6+6 c
Dis-leur : Voici le jour | des sanglots et des haines, 6+6 b
Où l'exécration | se gonfle, monte et bout, 6+6 c
260 Et, comme un vin nouveau, | jaillit des cuves pleines. 6+6 a
Car je suis plein de rage | et j'écraserai tout ! 6+6 c
Et l'on verra le sang | des rois, tel qu'une eau sale, 6+6 a
Déborder des toits plats | et rentrer dans l'égout. 6+6 b
Va ! ceins tes reins, Akhab, | excite ta cavale, 6+6 a
265 Fuis, comme l'épervier, | vers les bords Libyens, 6+6 b
Enfonce-toi vivant | dans la nuit sépulcrale… 6+6 c
Tu ne sortiras pas, | ô Roi ! de mes liens, 6+6 b
Et je te châtîrai | dans ta chair et ta race, 6+6 c
O vipère, ô chacal, | fils et père de chiens ! — 6+6 a
270 Akhab, poussant un cri | d'angoisse par l'espace, 6+6 c
Dit : — J'ai péché ; ma vie | est un fumier bourbeux. — 6+6 a
Il déchire sa robe | et se meurtrit la face. 6+6 b
De fange et de graviers | il souille ses cheveux, 6+6 a
Disant : — Gloire au Très-Fort | de Juda ! Qu'il s'apaise ! 6+6 b
275 Sur l'autel du Jaloux | j'égorgerai cent bœufs ! 6+6 c
Que suis-je à sa lumière ? | Un fétu sur la braise. 6+6 b
La rosée au soleil | est moins prompte à sécher ; 6+6 c
Moins vite le bois mort | flambe dans la fournaise. 6+6 a
Je suis comme le daim, | au guet sur le rocher, 6+6 c
280 Qui geint de peur, palpite | et dans l'herbe s'enfonce, 6+6 a
Parce qu'il sent venir | la flèche de l'archer. 6+6 b
Mais, par le Très-Puissant | que l'épouvante annonce, 6+6 a
Je briserai le Veau | de Béth-El ! Je promets 6+6 b
D'ensevelir Baal | sous la pierre et la ronce ! — 6+6 c
285 L'Homme de Thesbé dit : | — O fourbe ! désormais 6+6 b
Tu ne renîras plus | la clameur de tes crimes : 6+6 c
Ils ont rugi trop haut | pour se taire jamais. 6+6 a
Comme un nuage noir | qui gronde sur les cimes, 6+6 c
Voici venir, pour la | curée, ô Roi sanglant, 6−6 a
290 La meute aux crocs aigus | que fouettent tes victimes. 6+6 b
Va ! crie et pleure, attache | un cilice à ton flanc, 6+6 a
Brise sur les hauts lieux | l'Idole qui flamboie… 6+6 b
Les vengeurs de Naboth | arrivent en hurlant ! 6+6 c
Ouvre l'œil et l'oreille. | Ils bondissent de joie, 6+6 b
295 Ayant vu dans la vigne | Akhab et Jézabel, 6+6 c
Et de l'ongle et des dents | se partagent leur proie ! — 6+6 a
Or, ayant dit cela, | l'Homme de l'Éternel, 6+6 c
Renouant sur ses reins | sa robe de poil rude, 6+6 a
Par les sentiers pierreux | qui mènent au Carmel, 6+6 c
300 S'éloigne dans la nuit | et dans la solitude. 6+6 a
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