Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LAM_7/LAM100
Alphonse de LAMARTINE
HARMONIES POÉTIQUES ET RELIGIEUSES
1830
LIVRE DEUXIÈME
HARMONIE I
PENSÉE DES MORTS
 Voilà les feuilles sans sève 7 a
 Qui tombent sur le gazon, 7 b
 Voilà le vent qui s'élève 7 a
 Et gémit dans le vallon. 7 b
5  Voilà l'errante hirondelle 7 c
 Qui rase du bout de l'aile 7 c
 L'eau dormante des marais. 7 d
 Voilà l'enfant des chaumières 7 e
 Qui glane sur les bruyères 7 e
10  Le bois tombé des forêts. 7 d
 L'onde n'a plus le murmure 7 a
 Dont elle enchantait les bois ; 7 b
 Sous des rameaux sans verdure 7 a
 Les oiseaux n'ont plus de voix ; 7 b
15  Le soir est près de l'aurore, 7 c
 L'astre à peine vient d'éclore 7 c
 Qu'il va terminer son tour ; 7 d
 il jette par intervalle 7 e
 Une heure de clarté pâle 7 e
20  Qu'on appelle encore un jour. 7 d
 L'aube n'a plus de zéphyre 7 a
 Sous ses nuages dorés, 7 b
 La pourpre du soir expire 7 a
 Sous les flots décolorés, 7 b
25  La mer solitaire et vide 7 c
 N'est plus qu'un désert aride 7 c
  l'œil cherche en vain l'esquif, 7 d
 Et sur la grève plus sourde 7 e
 La vague orageuse et lourde 7 e
30  N'a qu'un murmure plaintif. 7 d
 La brebis sur les collines 7 a
 Ne trouve plus le gazon, 7 b
 Son agneau laisse aux épines 7 a
 Les débris de sa toison, 7 b
35  La flûte aux accords champêtres 7 c
 Ne réjouit plus les hêtres 7 c
 Des airs de joie ou d'amour, 7 d
 Toute herbe aux champs est glanée 7 e
 Ainsi finit une année, 7 e
40  Ainsi finissent nos jours ! 7 d
 C'est la saison tout tombe 7 a
 Aux coups redoublés des vents ; 7 b
 Un vent qui vient de la tombe 7 a
 Moissonne aussi les vivants : 7 b
45  lis tombent alors par mille, 7 c
 Comme la plume inutile 7 c
 Que l'aigle abandonne aux airs, 7 d
 Lorsque des plumes nouvelles 7 e
 Viennent réchauffer ses ailes 7 e
50  A l'approche des hivers. 7 d
 C'est alors que ma paupière 7 a
 Vous vit pâlir et mourir, 7 b
 Tendres fruits qu'à la lumière 7 a
 Dieu n'a pas laissé mûrir ! 7 b
55  Quoique jeune sur la terre, 7 c
 Je suis déjà solitaire 7 c
 Parmi ceux de ma saison, 7 d
 Et quand je dis en moi-même : 7 e
  sont ceux que ton cœur aime ? 7 e
60  Je regarde le gazon. 7 d
 Leur tombe est sur la colline, 7 a
 Mon pied le sait ; la voilà ! 7 b
 Mais leur essence divine, 7 a
 Mais eux, Seigneur, sont-ils là ? 7 b
65  Jusqu'à l'indien rivage 7 c
 Le ramier porte sonun message 7 c
 Qu'il rapporte à nos climats ; 7 d
 La voile passe et repasse, 7 e
 Mais de son étroit espace 7 e
70  Leur âme ne revient pas. 7 d
 Ah ! quand les vents de l'automne 7 a
 Sifflent dans les rameaux morts, 7 b
 Quand le brin d'herbe frissonne. 7 a
 Quand le pin rend ses accords, 7 b
75  Quand la cloche des ténèbres 7 c
 Balance ses glas funèbres, 7 c
 La nuit, à travers les bois, 7 d
 A chaque vent qui s'élève, 7 e
 A chaque flot sur la grève. 7 e
80  Je dis : N'es-tu pas leur voix ? 7 d
 Du moins si leur voix si pure 7 a
 Est trop vague pour nos sens, 7 b
 Leur âme en secret murmure 7 a
 De plus intimes accents ; 7 b
85  Au fond des cœurs qui sommeillent 7 c
 Leurs souvenirs qui s'éveillent 7 c
 Se pressent de tous côtés, 7 d
 Comme d'arides feuillages 7 e
 Que rapportent les orages 7 e
90  Au tronc qui les a portés ! 7 d
 C'est une mère ravie 7 a
 A ses enfants dispersés, 7 b
 Qui leur tend de l'autre vie 7 a
 Ces bras qui les ont bercés ; 7 b
95  Des baisers sont sur sa bouche, 7 c
 Sur ce sein qui fut leur couche 7 c
 Son cœur les rappelle à soi ; 7 d
 Des pleurs voilent son sourire, 7 e
 Et son regard semble dire : 7 e
100  Vous aime-t-on comme moi ? 7 d
 C'est une jeune fiancée 7 a
 Qui, le front ceint du bandeau, 7 b
 N'emporta qu'une pensée 7 a
 De sa jeunesse au tombeau 7 b
105  Triste, hélas ! dans le ciel même, 7 c
 Pour revoir celui qu'elle aime 7 c
 Elle revient sur ses pas, 7 d
 Et lui dit : Ma tombe est verte ! 7 e
 Sur cette terre déserte 7 e
110  Qu'attends-tu ? Je n'y suis pas ! 7 d
 C'est un ami de l'enfance 7 a
 Qu'aux jours sombres du malheur 7 b
 Nous prêta la Providence 7 a
 Pour appuyer notre cœur ; 7 b
115  Il n'est plus ; notre âme est veuve, 7 c
 Il nous suit dans notre épreuve 7 c
 Et nous dit avec pitié : 7 d
 Ami, si ton âme est pleine, 7 e
 De ta joie ou de ta peine 7 e
120  Qui portera la moitié ? 7 d
 C'est l'ombre pâle d'un père 7 a
 Qui mourut en nous nommant ; 7 b
 C'est une sœur, c'est un frère, 7 a
 Qui nous devance un moment ; 7 b
125  Sous notre heureuse demeure, 7 c
 Avec celui qui les pleure 7 c
 Hélas ! ils dormaient hier ! 7 d
 Et notre cœur doute encore. 7 e
 Que le ver déjà dévore 7 e
130  Cette chair de notre chair ! 7 d
 L'enfant dont la mort cruelle 7 a
 Vient de vider le berceau, 7 b
 Qui tomba de la mamelle 7 a
 Au lit glacé du tombeau ; 7 b
135  Tous ceux enfin dont la vie, 7 c
 Un jour ou l'autre ravie, 7 c
 Emporte une part de nous, 7 d
 Murmurent sous la poussière : 7 e
 Vous qui voyez la lumière, 7 e
140  Vous souvenez-vous de nous ? 7 d
Ah ! vous pleurerest le bonheur suprême, 4+6 a
Mânes chérisde quiconque a des pleurs ! 4+6 b
Vous oublierc'est s'oublier soi-même : 4+6 a
N'êtes-vous pasun débris de nos cœurs ? 4+6 b
145 En avançantdans notre obscur voyage, 4+6 a
Du doux passél'horizon est plus beau, 4+6 b
En deux moitiésnotre âme se partage, 4+6 a
Et la meilleureappartient au tombeau ! 4+6 b
Dieu de pardon !leur Dieu ! Dieu de leurs pères ! 4+6 a
150 Toi que leur bouchea si souvent nommé ! 4+6 b
Entends pour euxles larmes de leurs frères ! 4+6 a
Prions pour eux,nous qu'ils ont tant aimé ! 4+6 b
Ils t'ont priépendant leur courte vie. 4+6 a
Ils ont souriquand tu les as frappés ! 4+6 b
155 Ils ont crié :Que ta main soit bénie ! 4+6 a
Dieu, tout espoir !les aurais-tu trompés ? 4+6 b
Et cependantpourquoi ce long silence ? 4+6 a
Nous auraient-ilsoubliés sans retour ? 4+6 b
N'aiment-ils plus ?Ah ! ce doute t'offense ! 4+6 a
160 El toi, mon Dieu !n'es-tu pas tout amour ? 4+6 b
Mais, s'ils parlaientà l'ami qui les pleure, 4+6 a
S'ils nous disaientcomment ils sont heureux, 4+6 b
De tes desseinsnous devancerions l'heure, 4+6 a
Avant ton journous volerions vers eux. 4+6 b
165 vivent-ils ?quel astre à leur paupière 4+6 a
Répand un jourplus durable et plus doux ? 4+6 b
Vont-ils peuplerces îles de lumière ? 4+6 a
Ou planent-ilsentre le ciel et nous ? 4+6 b
Sont-ils noyésdans l'éternelle flamme ? 4+6 a
170 Ont-ils perduces doux noms d'ici-bas, 4+6 b
Ces noms de sœuret d'amante et de femme ? 4+6 a
A ces appelsne répondront-ils pas ? 4+6 b
Non, non, mon Dieu,si la céleste gloire 4+6 a
Leur t ravitout souvenir humain, 4+6 b
175 Tu nous auraisenlevé leur mémoire ; 4+6 a
Nos pleurs sur euxcouleraient-ils en vain ? 4+6 b
Ah ! dans ton seinque leur âme se noie ! 4+6 a
Mais garde-nousnos places dans leur cœur ; 4+6 b
Eux qui jadisont gté noire joie, 4+6 a
180 Pouvons-nous êtreheureux sans leur bonheur : 4+6 b
Étends sur euxla main de la clémence, 4+6 a
Ils ont péché ;mais le ciel est un don ! 4+6 b
Ils ont souffert ;c'est une autre innocence ! 4+6 a
Ils ont aimé ;c'est le sceau du pardon ! 4+6 b
185  Ils furent ce que nous sommes, 7 a
 Poussière, jouet du vent ! 7 b
 Fragiles comme des hommes, 7 a
 Faibles comme le néant ! 7 b
 Si leurs pieds souvent glissèrent, 7 c
190  Si leurs lèvres transgressèrent 7 c
 Quelque lettre de ta loi, 7 d
 O Père ! ô Juge suprême ! 7 e
 Ah ! ne les vois pas eux-mème, 7 e
 Ne regarde en eux que toi ! 7 d
195  Si tu scrutes la poussière, 7 a
 Elle s'enfuit à ta voix ! 7 b
 Si tu touches la lumière. 7 a
 Elle ternira tes doigts ! 7 b
 Si ton œil divin les sonde, 7 c
200  Les colonnes de ce monde 7 c
 Et des cieux chancelleront ! 7 d
 Si tu dis à l'innocence : 7 e
 Monte et plaide en ma présence ! 7 e
 Tes vertus se voileront. 7 d
205  Mais toi, Seigneur, tu possèdes 7 a
 Ta propre immortalité ! 7 b
 Tout le bonheur que tu cèdes 7 a
 Accrt ta félicité ! 7 b
 Tu dis au soleil d'éclore, 7 c
210  Et le jour ruisselle encore ! 7 c
 Tu dis au temps d'enfanter, 7 b
 Et l'éternité docile, 7 d
 Jetant les siècles par mille. 7 d
 Les répand sans les compter ! 7 b
215  Les mondes que tu répares 7 a
 Devant loi vont rajeunir. 7 b
 Et jamais tu ne sépares 7 a
 Le passé de l'avenir ; 7 b
 Tu vis ! et tu vis ! les âges. 7 c
220  Inégaux pour tes ouvrages. 7 c
 Sont tous égaux sous ta main ; 7 d
 Et jamais ta voix ne nomme. 7 e
 Hélas ! ces trois mots de l'homme 7 e
 Hier, aujourd'hui, demain ! 7 d
225  O Père de la nature, 7 a
 Source, abîme de tout bien, 7 b
 Rien à toi ne se mesure. 7 a
 Ah ! ne te mesure à rien ! 7 b
 Mets, ô divine clémence, 7 c
230  Mets ton poids dans la balance, 7 c
 Si tu pèses le néant ! 7 d
 Triomphe, ô vertu suprême ! 7 e
 En le contemplant toi-même, 7 e
 Triomphe en nous pardonnant ! 7 d
mètre profils métriques : 7, 4+6
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