Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAM_10/LAM170
Alphonse de LAMARTINE
RECUEILLEMENTS POÉTIQUES
1839
IV
A M. DE GENOUDE
SUR SON ORDINATION
1835
Du sein expirant d'une femme 8 a
Qui te montra le ciel | du geste de l'adieu, 6+6 b
Une nuit de douleur | déracine ton ame, 6+6 a
Et du lit nuptial | jette ta vie à Dieu, 6+6 b
5 Comme un vase où l'enfant | distrait se désaltère, 6+6 c
Frappé d'un coup trop fort | laisse fuir sa liqueur, 6+6 d
Ton ame laisse fuir | les eaux de notre terre 6+6 c
Et la mort a fêlé ton cœur ! 8 d
Tu ne boiras plus de notre onde, 8 a
10 Tu ne tremperas plus | tes lèvres ni tes mains 6+6 b
A ces courans troublés | où les ruisseaux du monde 6+6 a
Versent tant d'amertume | ou d'ivresse aux humains ; 6+6 b
L'ame du prêtre en vain | à notre air exposée 6+6 c
Est la peau de brebis | qu'étendait Gédéon : 6+6 d
15 On trouvait le matin | sèche de la rosée 6+6 c
La miraculeuse toison ! 8 d
Dieu seul remplira ton calice 8 a
Des pleurs tombés d'en haut | pour laver le péché, 6+6 b
De la sueur de sang, | et du fiel du supplice, 6+6 a
20 Et de l'eau de l'égout | par l'éponge séché ; 6+6 b
Comme ces purs enfans | qu'à l'autel on élève, 6+6 c
Laissent tondre leurs fronts | jusqu'au dernier cheveu, 6+6 d
Tu couperas du fer | les rejets de ta sève 6+6 c
Pour jeter ta couronne à Dieu ! 8 d
25 Tu détacheras de nos voies 8 a
Tes pieds nus qui suivront | leurs sentiers à l'écart, 6+6 b
Dans nos courtes douleurs, | dans nos trompeuses joies 6+6 a
De noire pain du jour | tu laisseras ta part ; 6+6 b
Tu ne combattras plus | sous l'aube et sous l'étole ; 6+6 c
30 C'est la paix du Seigneur | que ta main doit tenir ; 6+6 d
Tu n'élèveras plus | en glaive de parole 6+6 c
La voix qui ne doit que bénir ! 8 d
Tu chercheras, le long du fleuve, 8 a
Les rencontres du Christ, | ou du Samaritain ; 6+6 b
35 L'infirme, le lépreux, | l'orphelin et la veuve 6+6 a
Viendront sous ton figuier | s'asseoir dès le matin ; 6+6 b
Ton cœur vide de soins | se remplira des nôtres. 6+6 c
Ton manteau, si j'ai froid, | l'hiver sera le mien, 6+6 b
Et pour prendre et porter | tous les fardeaux des autres 6+6 c
40 Ton bras déposera le tien ! 8 b
Comme le jardinier mystique 8 a
Qui suivait d'Emmaüs, | en rêvant, le chemin, 6+6 b
Et relevant les fleurs | au soleil symbolique, 6+6 a
Marchait en émondant | les tiges de la main, 6+6 b
45 Tu prendras dans chaque ame | et dans chaque pensée, 6+6 c
Ce qui la fane aux bords | ou la ronge au milieu, 6+6 d
Ce qui l'incline à terre | ou la tient affaissée, 6+6 c
Et tu lèveras tout à Dieu ! 8 d
Cependant trois enfans sans mère 8 a
50 Te suivront du regard | et du pied aux autels, 6+6 b
Et se diront entre eux : | Ce saint fut notre père 6+6 a
Quand il portait son nom | d'homme chez les mortels ; 6+6 b
Et les peuples émus | penseront en eux-mêmes, 6+6 c
Voyant leurs bras pendus | à tes robes de lins, 6+6 d
55 De l'amour du Seigneur | combien il faut qu'on aime 6+6 c
Pour laisser ses fils orphelins ! 8 d
C'est ainsi que Sion contemple 8 a
Le cèdre du Liban, | taillé pour le saint lieu, 6+6 b
Qui soutient la charpente | et parfume le temple, 6+6 a
60 Incorruptible appui | de la maison de Dieu, 6+6 b
Tandis que les rejets | de ses propres racines 6+6 c
Reverdissent aux lieux | qu'il ombrageait avant, 6+6 d
Et se multipliant | sur les rudes collines, 6+6 c
Souffrent le soleil elle vent. 8 d
65 Toi pourtant qui dans ta poitrine. 8 a
Oses prendre et porter | l'aigle des vieilles lois 6+6 b
Comme Paul à Tarsys | prit, l'œuf de la doctrine 6+6 a
Et le portait éclore | aux soleils d'autrefois. 6+6 b
Ses ailes d'aujourd'hui | les as-tu regardées ? 6+6 c
70 Sais-tu si deux mille ans | l'oiseau n'a pas grandi ? 6+6 d
Sais-tu quelle heure il est | au cadran des idées ? 6+6 c
Et si l'aurore est le midi ?… 8 d
Si l'oiseau retourne à son aire ? 8 a
Si l'œuf des vérités | qu'il ne peut contenir 6+6 b
75 N'est pas éclos plus loin | et n'a pas changé l'ère ; 6+6 a
D'où son jour plus parfait | datera l'avenir ? 6+6 b
Sais-tu quel vol nouveau | son œil divin mesure. ? 6+6 c
De quel nuage il veut | s'abattre ? et sur quels bords ? 6+6 d
Et jusqu'au soir des temps | pour qu'il se transfigure, 6+6 c
80 Combien il lui faut de Thabors ?.. 8 d
Quand le Fils de l'Homme au Calvaire, 8 a
Premier témoin de Dieu, | sur sa croix expira, 6+6 b
Le rideau ténébreux | du sombre sanctuaire 6+6 a
Dans le temple ébranlé | du coup se déchira, 6+6 b
85 Le jour entra tout pur | dans l'ombre des symboles, 6+6 c
Les fantômes sacrés | d'Oreb et de Sina 6+6 b
Pâlirent aux éclairs | des nouvelles paroles, 6+6 c
Et le passé s'illumina ! 8 b
O Christ ! n'était-ce pas ton signe ? 8 a
90 N'était-ce pas pour dire | à l'antique maison 6+6 b
Que dévoiler le jour | nulle arche n'était digne ? 6+6 a
Qu'une aube se levait | sans ombre à l'horizon ? 6+6 b
Que Dieu ne resterait | caché dans nul mystère ? 6+6 c
Que tout rideau jaloux | se fendrait devant toi ? 6+6 d
95 Que ton verbe brûlait | son voile ? et que la terre 6+6 c
N'aurait que ton rayon pour foi ? 8 d
Nouveaux fils des saintes demeures, 8 a
Dieu parle ! regardez | le signe de sa main, 6+6 b
Des pas, encor des pas | pour avancer ses heures ; 6+6 a
100 Le siècle a fait vers vous | la moitié du chemin ! 6+6 b
Comprenez le prodige ! | imitez cet exemple. 6+6 c
Déchirez ces lambeaux | des voiles du saint lieu ! 6+6 d
Laissez entrer le jour | dans cette nuit du temple ! 6+6 c
Plus il fait clair, mieux on voit Dieu ! 8 d
105 Voyez se presser à la porte 8 a
Cette foule en rumeur | d'adorateurs sans voix 6+6 b
Qui court après ces dieux | que la raison emporte, 6+6 a
Comme autrefois Laban | après ses dieux de bois ! 6+6 b
Ne tirez plus les siens | de l'arche des symboles, 6+6 c
110 Mais dites-lui qu'aux sens | le temps les a repris, 6+6 d
Que tous ces dieux de chair | n'étaient que des idoles, 6+6 c
Et d'aller au Dieu des esprits ! 8 d
Hâtez cette heure fortunée 8 a
Où tout ce qui languit | de la soif d'adorer 6+6 b
115 Sous l'arche du Très-Haut, | d'astres illuminée, 6+6 a
Pour aimer et bénir | viendra se rencontrer ! 6+6 b
Que le mystère entier | s'éclaire et se consomme ! 6+6 c
Le Verbe où s'incarna | l'antique vérité 6+6 b
Se transfigure encor ; | le Verbe s'est fait homme, 6+6 c
120 Le Verbe est fait humanité. 8 b
La foi n'a-t-elle point d'aurore ? 8 a
Avant qu'à l'horizon | l'astre des cieux ait lui 6+6 b
Dans ces foyers des nuits | qu'un jour lointain colore, 6+6 a
On croit le reconnaître | à ces feux teints de lui ; 6+6 b
125 Mais lui-même noyant | lès phares de ses plages 6+6 c
Dans des flots de splendeur | et de sérénité, 6+6 d
Efface en avançant | ses multiples images 6+6 c
Sous sa rayonnante unité 8 d
mètre profils métriques : 8, 6+6
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