Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_9/HUG738
Victor HUGO
L'année terrible
1872
AVRIL
VIII
Pendant que la mer gronde | et que les vagues roulent, 6+6 a
Et que sur l'horizon | les tumultes s'écroulent, 6+6 a
Ce veilleur, le poète, | est monté sur sa tour. 6+6 b
Ce qu'il veut, c'est qu'enfin | la concorde ait son tour. 6+6 b
5 Jadis, dans les temps noirs | comme ceux où nous sommes, 6+6 a
Le poète pensif | ne se mêlait aux hommes 6+6 a
Que pour les désarmer | et leur verser son cœur ; 6+6 b
Il aimait le vaincu | sans haïr le vainqueur ; 6+6 b
Il suppliait l'armée, | il suppliait la ville ; 6+6 a
10 Aux vivants aveuglés | par la guerre civile 6+6 a
Il montrait la clarté | du vrai, du grand, du beau, 6+6 b
Étant plus qu'eux tourné | du côté du tombeau ; 6+6 b
Et cet homme, au milieu | d'un monde inexorable, 6+6 a
Était le messager | de la paix vénérable. 6+6 a
15 Il criait : N'a-t-on point | assez souffert, hélas ! 6+6 b
Ne serons-nous pas bons | à force d'être las ? 6+6 b
C'était la fonction | de cette voix qui passe 6+6 a
De demander à tous, | pour tous, Paix ! Pitié ! Grâce ! 6+6 a
Les devoirs sont encor | les mêmes aujourd'hui. 6+6 b
20 Le poète, humble jonc, | a son cœur pour appui. 6+6 b
Il veut que l'homme vive, | il veut que l'homme crée. 6+6 a
Le ciel, cette demeure | inconnue et sacrée, 6+6 a
Prouve par sa beauté | l'éternelle douceur ; 6+6 b
La poésie au front | lumineux est la sœur 6+6 b
25 De la clémence, étant | la sœur de l'harmonie ; 6+6 a
Elle affirme le vrai | que la colère nie, 6+6 a
Et le vrai c'est l'espoir, | le vrai c'est la bonté ; 6+6 b
Le grand rayon de l'art | c'est la fraternité. 6+6 b
A quoi bon aggraver | notre sort par la haine ? 6+6 a
30 Oh ! si l'homme pouvait | écouter la géhenne, 6+6 a
Si l'on savait la langue | obscure des enfers, — 6+6 b
De cette profondeur | pleine du bruit des fers, 6+6 b
De ce chaos hurlant | d'affreuses destinées, 6+6 a
De tous ces pauvres cœurs, | de ces bouches damnées, 6+6 a
35 De ces pleurs, de ces maux | sans fin, de ces courroux, 6+6 b
On entendrait sortir | ce chant sombre : Aimons-nous ! 6+6 b
L'ouragan, l'océan, | la tempête, l'abîme, 6+6 a
Et le peuple, ont pour loi | l'apaisement sublime, 6+6 a
Et, quand l'heure est venue | enfin de s'épouser, 6+6 b
40 Le gouffre éperdu donne | à la terre un baiser ! 6+6 b
Car rien n'est forcené, | terrible, effréné, libre, 6+6 a
Convulsif, effaré, | fou, que pour l'équilibre ; 6+6 a
Car il faut que tout cède | aux branches du compas ; 6+6 b
Car l'indignation | des flots ne dure pas, 6+6 b
45 L'écume est furieuse | et n'est pas éternelle ; 6+6 a
Le plus fauve aquilon | demande à ployer l'aile ; 6+6 a
Toute nuit mène à l'aube, | et le soleil est sûr ; 6+6 b
Tout orage finit | par ce pardon, l'azur. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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