Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
HUG_8/HUG95
Victor HUGO
Odes et Ballades
1826
BALLADES
1823-1828
BALLADE HUITIÈME
LES DEUX ARCHERS
à M. Louis Boulanger
Dames, oyez un conte lamentable.
BAÏF.
C'était l'instant funèbre la nuit est si sombre, 6+6 a
Qu'on tremble à chaque pasde réveiller dans l'ombre 6+6 a
Un démon, ivre encordu banquet des sabbats ; 6+6 b
Le moment , liantà peine sa prière, 6+6 c
5 Le voyageur se hâteà travers la clairière ; 6+6 c
 C'était l'heure l'on parle bas ! 8 b
Deux francs archers passaientau fond de la vallée, 6+6 a
Là-bas ! vous voyezune tour isolée, 6+6 a
Qui, lorsqu'en Palestineallaient mourir nos rois, 6+6 b
10 Fut bâtie en trois nuits,au dire de nos pères, 6+6 c
Par un ermite saintqui remuait les pierres 6+6 c
 Avec le signe de la croix. 8 b
Tous deux, sans craindre l'heure,en ce lieu taciturne 6+6 a
Allumèrent un feupour leur repas nocturne ; 6+6 a
15 Puis ils vinrent s'asseoiren déposant leur cor, 6+6 b
Sur un saint de granit,dont l'image grossière, 6+6 c
Les mains jointes, le frontcouché dans la poussière, 6+6 c
 Avait l'air de prier encor. 8 b
Cependant sur la tour,les monts, les bois antiques, 6+6 a
20 L'ardent foyer jetaitdes clartés fantastiques ; 6+6 a
Les hiboux s'effrayaientau fond des vieux manoirs ; 6+6 b
Et les chauves-sourisque tout sabbat réclame, 6+6 c
Volaient, et par momentsépouvantaient la flamme 6+6 c
 De leur grande aile aux ongles noirs ! 8 b
25 Le plus vieux des archersalors dit au plus jeune : 6+6 a
« Portes-tu le cilice ?Observes-tu le jne ? » 6+6 a
Reprit l'autre, et leur rireaccompagna leur voix. 6+6 b
D'autres rires de lointout à coup s'entendirent. 6+6 c
Le val était désert,l'ombre épaisse ; ils se dirent : 6+6 c
30  « C'est l'écho qui rit dans les bois. » 8 b
Soudain à leurs regardsune lueur rampante 6+6 a
En bleuâtres sillonssur la hauteur serpente ; 6+6 a
Les deux blasphémateurs,hélas ! sans s'effrayer, 6+6 b
Jetèrent au brasierd'autres branches de chênes, 6+6 c
35 Disant : « C'est, au miroirdes cascades prochaines 6+6 c
 >Le reflet de notre foyer. » 8 b
Or cet écho (d'effroiqu'ici chacun s'incline !) 6+6 a
C'était Satan, rianttout haut sur la colline ! 6+6 a
Ce reflet, émanédu corps de Lucifer, 6+6 b
40 C'était le pâle jourqu'il trne en nos ténèbres, 6+6 c
Le rayon sulfureuxqu'en des songes funèbres 6+6 c
 Il nous apporte de l'enfer ! 8 b
Aux profanes éclatsde leur coupable joie, 6+6 a
Il était accourucomme un loup vers sa proie. 6+6 a
45 Sur les archers dans l'ombreerraient ses yeux ardents. 6+6 b
— « Riez et blasphémezdans vos heures oisives. 6+6 c
Moi, je ferai passervos bouches convulsives 6+6 c
 Du rire au grincement de dents ! » 8 b
À l'aube du matin,un peu de cendre éteinte 6+6 a
50 D'un pied large et fourchuportait l'étrange empreinte. 6+6 a
Le val fut tout le jourdésert, silencieux. 6+6 b
Mais, au lieu du foyer,à minuit même, un pâtre 6+6 c
Vit soudain appartreune flamme bleuâtre 6+6 c
 Qui ne montait pas vers les cieux ! 8 b
55 Dès qu'au sol attachéeelle rampa livide, 6+6 a
De longs rires soudainéclatant dans le vide, 6+6 a
Glacèrent le bergerd'un grand effroi saisi ; 6+6 b
Il ne vit point Satanet ceux de l'autre monde, 6+6 c
Et ne put concevoir,dans sa terreur profonde, 6+6 c
60  Ce qu'ils souffraient pour rire ainsi ! 8 b
Dès lors, toutes les nuits,aux monts, aux bois antiques, 6+6 a
L'ardent foyer jetases clartés fantastiques ; 6+6 a
Des rires effrayaientles hiboux des manoirs ; 6+6 b
Et les chauves-sourisque tout sabbat réclame, 6+6 c
65 Volaient, et par momentsépouvantaient la flamme 6+6 c
 De leur grande aile aux ongles noirs. 8 b
Rien, avant le rayonde l'aube matinale, 6+6 a
Enfants, rien n'éteignaitcette flamme infernale. 6+6 a
Si l'orage, à grands flotstombant, grondait dans l'air, 6+6 b
70 Les rires éclataientaussi haut que la foudre, 6+6 c
La flamme en tournoyants'élançait de la poudre, 6+6 c
 Comme pour s'unir à l'éclair ! 8 b
Mais enfin une nuit,vêtu de scapulaire, 6+6 a
Se leva du vieux saintle marbre séculaire ; 6+6 a
75 Il fit trois pas, arméde son rameau bénit ; 6+6 b
De l'effrayant prodigeeffrayant exorciste, 6+6 c
De ses lèvres de pierreil dit : « Que Dieu m'assiste ! » 6+6 c
 En ouvrant ses bras de granit ! 8 b
Alors tout s'éteignit,flammes, rires, phosphore, 6+6 a
80 Tout ! et le lendemain,on trouva dès l'aurore 6+6 a
Les deux gens d'armes mortssur la statue assis ; 6+6 b
On les ensevelit ;et, suivant sa promesse, 6+6 c
Le seigneur du hameau,pour fonder une messe, 6+6 c
 Légua trois deniers parisis. 8 b
85 Si quelque enseignementse cache en cette histoire, 6+6 a
Qu'importe ! il ne faut pasla juger, mais la croire. 6+6 a
La croire ! Qu'ai-je dit ?ces temps sont loin de nous ! 6+6 b
Ce n'est plus qu'à demiqu'on se livre aux croyances. 6+6 c
Nul, dans notre âge aveugleet vain de ses sciences, 6+6 c
90  Ne sait plier les deux genoux ! 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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