Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_27/HUG1578
Victor HUGO
DERNIÈRE GERBE
1902
XX
Charle, il faut quitter l'ode | et descendre à l'épître ; 6+6 a
On passe en vieillissant | du trépied au pupitre ; 6+6 a
Le feuillet sibyllin | s'envole, et dans la main, 6+6 b
O misère, vous laisse | un blême parchemin 6+6 b
5 Que la strophe, sirène, | ondine, muse, almée, 6+6 a
Égratigne en fuyant | de sa griffe palmée. 6+6 a
On s'accoude à son poêle | au lieu d'aller rêver 6+6 b
Dans les champs et guetter | la lune à son lever ; 6+6 b
Les bons alexandrins | vous viennent, mais sans prismes, 6+6 a
10 Sans aile, et refusant, | de peur de rhumatismes, 6+6 a
De se mouiller les pieds | dans l'herbe et dans le thym ; 6+6 b
Et l'on n'est plus celui | qui va de grand matin, 6+6 b
Pâle, faire sa cour | à l'Aurore, et s'occupe 6+6 a
A regarder trembler | les astres sur sa jupe. 6+6 a
15 On s'alourdit ; le ventre | est votre souverain. 6+6 b
On préfère un turbot, | une truite du Rhin, 6+6 b
Une bonne poularde | accommodée en daube, 6+6 a
Un vin vieux, à l'œillade | enivrante de l'aube. 6+6 a
On murmure tout bas : | jadis, quand nous aimions… 6+6 b
20 D'autres sont les Pâris | et les Endymions 6+6 b
A qui viennent s'offrir, | sous la sombre liane, 6+6 a
La Minerve sacrée | et la grande Diane : 6+6 a
On ne dit plus : ma lyre ; | on dit : mon encrier. 6+6 b
On n'entend plus au bois | la bacchante crier. 6+6 b
25 Votre oreille a présent | jamais ne se régale 6+6 a
De ce que le grillon | raconte à la cigale 6+6 a
Et de ce'que redit | la cigale au grillon, 6+6 b
L'un chantant le foyer | et l'autre le sillon. 6+6 b
Adieu la folle immense | aux chansons infinies, 6+6 a
30 L'imagination, | maîtresse des génies ! 6+6 a
Adieu l'égarement | dans les espaces bleus, 6+6 b
L'extase, et l'idéal, | ce réel fabuleux, 6+6 b
Et les aspects profonds | du rêve ! adieu la cime 6+6 a
Vue à travers l'écume | énorme de l'abîme ! 6+6 a
35 Adieu l'élan superbe | et l'essor factieux ! 6+6 b
Adieu la joute avec | les aigles dans les cieux ! 6+6 b
Adieu les gnomes noirs | aux mitres d'escarboucles, 6+6 a
Et les nymphes ayant | des algues dans leurs boucles, 6+6 a
Et la fée, égrenant | ses colliers de coraux ! 6+6 b
40 On emploie à tracer | des distiques, moraux, 6+6 b
Dignes d'être scandés | aux écoles primaires, 6+6 a
Les doigts, qui caressaient | la gorge des chimères. 6+6 a
Votre hippogriffe las | demande l'abreuvoir ; 6+6 b
Et vos rimes n'ont plus | d'assez bons yeux pour voir, 6+6 b
45 Sous l'étoile agrafée | aux plis blancs de la nue, 6+6 a
Vénus au front divin | sourire toute nue. 6+6 a
C'est fini. L'on devient | bourgeois de l'Hélicon. 6+6 a
On loue au bord du gouffre | un cottage à balcon. 6+6 a
On consent bien, du haut | de sa raison morose, 6+6 b
50 À faire encor des vers, | pourvu qu'ils soient en prose. 6+6 b
De là l'épître. Hélas, | le poëte à vau-l'eau 6+6 c
Est un Orphée éteint | qui finit en Boileau. 6+6 c
mètre profil métrique : 6+6
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