Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
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Charles GILL
Le Cap Éternité
1919
LES ÉTOILES FILANTES
Crémazie
I
Ô Crémazie ! | ô sombre destinée ! 4+6 a
Ô dur exil ! | ô tombe abandonnée !… 4+6 a
Par la Vie et la Mort 6 b
Tu fus trahi ; | car même dans ta cendre, 4+6 c
5 Le Canada | n’a daigné te défendre 4+6 c
Contre le sort. 4 b
Nous te laissions | languir aux gémonies 4+6 a
Malgré tes chants, | malgré les harmonies 4+6 a
Que ta voix modula ; 6 b
10 Mais une basse | et dégradante offense 4+6 c
A cravaché | notre reconnaissance, 4+6 c
Et nous voilà ! 4 b
C’est plus qu’un nom, | c’est toute la Patrie 4+6 a
Que le transfuge | insulteur a flétrie 4+6 a
15 Avec ton souvenir ; 6 b
C’est sur nos cœurs | indignés que retombe 4+6 c
Ce que l’injure | a vomi sur ta tombe 4+6 c
Pour l’avilir. 4 b
Ô trépassé ! | pour toi la Terre est tendre 4+6 a
20 En te donnant | de ne pouvoir entendre 4+6 a
La voix des renégats ; 6 b
Mais par delà | les vagues en démence, 4+6 c
Le cri d’un peuple, | au fond du noir silence 4+6 c
Tu l’entendras ! 4 b
25 Ce vers sublime | accordé sur ta lyre, 4+6 a
Que le drapeau | de Carillon inspire 4+6 a
Au vieillard à genoux, 6 b
Nous le clamons | à ta grande poussière : 4+6 c
« Vous qui dormez | dans votre froide bière, 4+6 c
30 Réveillez-vous ! » 4 b
Assez longtemps, | poète, ta mémoire 4+6 a
A reposé | dans une paix sans gloire. 4+6 a
Sous le laurier fané .... 6 b
Voici venir | l’aurore grandiose ! 4+6 c
35 Réveille-toi | pour ton apothéose : 4+6 c
L’heure a sonné ! 4 b
II
Le premier parmi nous, | aux voûtes souveraines 6+6 a
Il a plané, le front | perdu dans les éclairs ; 6+6 b
Il a fait résonner | la fierté des beaux vers 6+6 b
40 Dans le ciel constellé | des gloires canadiennes. 6+6 a
Et sur notre Parnasse | il reste le plus grand 6+6 a
Par la forme énergique | et la haute pensée 6+6 b
Qui voltige, amplement | limpide et cadencée, 6+6 b
Du frisson triomphal | au sanglot déchirant. 6+6 a
45 Attentif à l’écho | de nos magnificences, 6+6 a
Il a, du drapeau blanc | déroulant les vieux plis, 6+6 b
Salué la splendeur | morte des fleurs de lys, 6+6 b
Et sa Muse a pleuré | sur nos désespérances. 6+6 a
Et comme avec l’épée | altière des aïeux 6+6 a
50 Il a taillé son œuvre | à même notre drame ; 6+6 b
Tout le rêve d’un peuple | a tenu dans son âme 6+6 b
Pareille au lac géant | qui reflète les deux. 6+6 a
Plus tard, il s’est ému | devant le Tricolore, 6+6 a
Étant de ces vaillants | et fidèles soldats 6+6 b
55 Dont l’amour filial | ne se mesure pas 6+6 b
Aux teintes du drapeau | que la Patrie arbore. 6+6 a
Les siècles, de son nom | devront se souvenir, 6+6 a
Si la fatalité | nous ravit à la gloire ; 6+6 b
Il fait revivre en nous | les grandeurs de l’histoire, 6+6 b
60 Et nous vivrons par lui | dans l’immense avenir. 6+6 a
Souvent, au cours de l’âge, | une voix inspirée 6+6 a
Qui vibre, seul écho | d’un peuple enseveli, 6+6 b
Réveille, au fond des temps | comme au fond de l’oubli, 6+6 b
Le passé de ce peuple | et sa langue sacrée. 6+6 a
65 Nous l’aimons pour les chants | auxquels il préluda, 6+6 a
Pour le verbe qui vit | quand meurent les empires, 6+6 b
Nous dont le cœur français | palpite au son des lyres, 6+6 b
Nous l’aimons pour la France | et pour le Canada ! 6+6 a
Le rêveur s’endormit, | emporté par ses ailes 6+6 a
70 Dans les vertigineux | lointains de l’Idéal, 6+6 b
Et tomba brusquement, | sur le pavé banal 6+6 b
Brisant à tout jamais | son bandeau d’étincelles… 6+6 a
Il a sombré dans les | abîmes d’une loi 6−6 a
Qui punit l’imprudence | et sauve l’infamie, 6+6 b
75 Naufragé ballotté | sur une onde ennemie 6+6 b
Où la ruse est boussole | avant la bonne foi. 6+6 a
Il s’est, devant la honte, | enfui dans la misère. 6+6 a
Du même coup, le sort | l’a deux fois exilé, 6+6 b
Puisqu’au scintillement | de l’azur étoilé 6+6 b
80 Sa Muse pour toujours | a fermé sa paupière. 6+6 a
Toute l’affliction, | tout le deuil, tout le fiel 6+6 a
De sa tragique fin | l’a rendu vénérable ; 6+6 b
Non moins que le génie | au souffle impérissable, 6+6 b
La profonde douleur | l’a rapproché du ciel ! 6+6 a
III
85 Les bords du Saint-Laurent | reverront le vieux maître, 6+6 a
Car nous joindrons bientôt, | pour le faire renaître, 6+6 a
La majesté du marbre | à l’éternel airain. 6+6 b
Pour qu’il ne souffre plus | et jamais ne s’envole, 6+6 c
Nous le scellerons bien | dans le double symbole 6+6 c
90 De l’airain qui demeure | et du marbre serein. 6+6 b
Quand il sera debout, | si parfois la poussière 6+6 a
Que soulève le vent | des grands chemins, altère 6+6 a
L’éclat des traits de bronze | ou du blanc piédestal, 6+6 b
L’aube compatissante | aux splendeurs profanées, 6+6 c
95 Avant que l’astre roi | n’éveille les journées, 6+6 c
Lavera cet affront | dans son divin cristal. 6+6 b
Et dans l’immensité | de notre âme fervente, 6+6 a
Nous lui ferons une autre | aurore éblouissante 6+6 a
Dont les pleurs laveront | les taches du passé. 6+6 b
100 Sur sa gloire, à nos yeux | déjà marmoréenne, 6+6 c
Comme sur la statue | où l’aube en pleurs s’égrène 6+6 c
Quelque chose de pur | aura tout effacé. 6+6 b
Immobile à jamais | dans sa noble attitude, 6+6 a
Nous le dresserons haut | devant la multitude, 6+6 a
105 Entre le Mont-Royal | et le fleuve géant ; 6+6 b
Ainsi que dans son œuvre | effleurant les nuages, 6+6 c
Il faut qu’il apparaisse | au long regard des âges, 6+6 c
Enfin maître du sort | et vainqueur du néant. 6+6 b
Nous irons contempler, | par un matin de fête, 6+6 a
110 Le soleil des grands jours | auréolant sa tête, 6+6 a
Comme d’un diadème | auguste de clarté ; 6+6 b
Et tout émus d’avoir | compris le sens des choses, 6+6 c
Nous connaîtrons l’orgueil | de couronner de roses 6+6 c
Un front couronné d’or | par l’immortalité ! 6+6 b
mètre profils métriques : 6, 4, 4+6, 6−6
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