LA MER |
DIALOGUE DU PÊCHEUR ET DE LA MER |
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L'homme a passé le long de la mer retirée. |
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Elle est si loin, au bord des horizons sans bruit, |
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Qu'il semble que jamais, ni de jour ni de nuit, |
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Ne remontera la marée. |
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Et la mer parle et dit : « Écoute, ô terrien |
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Sans, terre, ô sans maison, sans bétail, sans culture ! |
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Ne veux-tu pas tenter la facile aventure |
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De la mer pleine de trésors, toi qui n'as rien ? |
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« Que craindrais-tu ? Ne suis-je pas paisible et plate ? |
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Vois ! Tu me franchiras toute, tranquillement. |
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Je ne suis qu'un reflet tombé du firmament, |
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Je suis plus douce qu'une agate. |
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« Oisif, sur mes flots gris, tu te promènerais. |
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Mon labour est aisé pour la rame ou l'hélice. |
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Sans bornes, devant toi, s'ouvre l'espace lisse, |
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Viens ! Tu ne trouveras en moi que des attraits. |
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« L'aile de goéland d'une voile est gonflée. |
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On vole sous le ciel et l'on fait la moisson : |
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Tu n'as qu'à, te pencher pour prendre mon poisson |
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Qui te fera riche d'emblée. |
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« Bien d'autres avant toi coururent mes chemins. |
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Ils n'étaient, comme toi, rien que de pauvres hommes, |
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Ils comptent maintenant, dans leurs maisons, les sommes |
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Que la pêche leur mit sans peine clans les mains. » |
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Et l'homme dit : « C'est vrai ! La belle plaine verte, |
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Les coteaux bien boisés, les fruits, les sillons bruns, |
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Tout ce bien naturel n'est que pour quelques-uns, |
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Mais la mer à tous est ouverte. |
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« Tu ne m'as pas en vain parlé. Je partirai ! |
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Je veux puiser en vous, mines inépuisables ! |
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Puisqu'on peut découvrir, dans le secret des sables, |
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Sous les flots gris, un bien frétillant et doré, |
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« À moi, soles, harengs, anguilles repliées, |
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Crevettes par milliers ! À moi, visqueux trésor |
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De la mer ! J'emplirai tous les marchés du port |
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De mes tapageuses criées ! |
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« Oui ! Je m'enrichirai pour ceux qui me sont chers. |
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Un homme n'est pas seul au monde. Ma famille |
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Attend : femme, garçons, et la petite fille, |
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La dernière venue aux immenses yeux clairs. |
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« L'horizon gris en proue et le rivage en poupe, |
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Je partirai tout seul accomplir mon devoir, |
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Pour que la mère des petits, quand vient le soir, |
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Leur trempe une meilleure soupe. |
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« Adieu donc ! Préparons la rame et les réseaux ! |
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Je te quitte aujourd'hui, marâtre terre ferme |
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Qui n'eus jamais pour moi labour, bétail ni ferme, |
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Car je vais devenir le laboureur des eaux ! » |
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Le pêcheur est parti sur la mer tentatrice, |
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Sur la berceuse mer, douce comme un Léthé, |
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Et qui seule ici-bas fut pour sa pauvreté |
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Une pitoyable nourrice. |
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Et voici : Maintenant qu'il navigue sans peur, |
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Toutes voiles au vent et l'âme abandonnée, |
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Un soir, un soir pareil à tous ceux de Tannée, |
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Du fond de l'horizon s'éveille une fureur. |
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La mer dit : « A nous deux ! A présent, je commence ! |
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Jadis, quand tu rôdais, afin de t'attirer, |
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J'ai fait ma marée humble et mon couchant doré ; |
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Ce soir, te voici sans défense ! |
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« Je vais, du bout des quatre points, bondir sur toi. |
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Vois-tu se ramasser au loin la foule verte |
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De mes vagues ?… Chacune, activée à ta perte, |
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Se dresse comme un monstre froid. |
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« Les voici ! Les voici !… De tous côtés, leur crête |
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Se hérisse. — Au galop, mes beaux chevaux marins ! |
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Pour aider contre toi ma bourrasque à tous crins, |
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Le ciel noir est gonflé de foudre qui s'apprête ! » |
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Le pêcheur dit : « O mer ! ô mer ! que t'ai-je fait ? |
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Jadis, sur tes seins bleus, tu m'appelas toi-même. |
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Pourquoi maltraites-tu ton nourrisson qui t'aime ? |
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Pour quelle cause un tel effet ? » |
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La mer dit : « Croyais-tu me connaître, pauvre homme, |
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O voleur qui pensais me piller mon trésor ? |
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Défends-toi, maintenant ! c'est l'heure de ta mort ! |
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Défends-toi ! Car il faut, ce soir, que je t'assomme ! |
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Tous ceux que j'ai tentés ont appris mon secret |
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Terrible. Apprends-le donc ! — A la barque !… A la barque |
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Quand l'horizon entier s'avance, s'enfle, s'arque, |
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Homme et bateau, tout disparaît ! » |
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Le pêcheur dit : « Tu m'as menti comme une femme ! |
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Je suis seul, maintenant, abandonné de tout, |
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Seul avec mon bateau parmi ton spasme fou, |
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Seul avec mon bateau contre ta mauvaise âme. |
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« Pourtant je t'ai connue aussi douce qu'un pré !… |
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De tous côtés, ce soir, tu m'attaques, barbare ? |
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Ainsi soit-il !… A moi ma voile, à moi ma barre ! |
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Ce soir, je te labourerai ! |
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« Rage ! Bondis ! Tu crois être mon maître, esclave ? |
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De bâbord à tribord et d'amont en aval, |
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Cabre-toi ! Je te monterai comme un cheval, |
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J'humilierai ton flot qu'écarte mon étrave ! » |
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« Tous ceux qui, comme moi, ce soir, étaient partis, |
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Sont rentrés. Mon bateau gémit dans son écorce. |
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Mais au fond de mon cœur, pour soutenir ma force, |
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J'ai ma femme et j'ai mes petits. |
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« Je n'ai pas peur de toi !. Je connais la manœuvre ! |
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Tes mottes d'eau sauront le tranchant de mon soc. |
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Conduis-nous au salut, mon brave petit foc ! |
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Va ! … Nous laisserons-nous étreindre par la pieuvre ? » |
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Il lutte et rit. L'embrun l'aveugle. L'ouragan, |
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Dans la voile, a moulé sa forme furibonde. |
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Tout craque. Et. voici que, dansant comme une ronde, |
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Siffle un cyclone extravagant. |
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Le pêcheur dit : « A moi !… Seraient-ce des sirènes ? |
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Es-tu hantée, ô mer ? Réponds-moi ! Réponds-moi ! |
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Car je sens m'étrangler maintenant, fou d'effroi, |
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Des cheveux glacials et plus longs que des traînes ! » |
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La mer dit : « Tu te meurs malgré tout ton orgueil ! |
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Autour de toi, ce sont les cheveux de mes lames. |
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Oui ! Passionnément elles perdent les âmes |
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Pour que les pays soient en deuil. |
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« Je me venge sur toi de ta race abhorrée, |
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Qui, dans un bout de lin, capte l'effort des vents |
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Et blesse chaque jour, avec ses durs avants, |
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Les sirènes que roule, en montant, la marée. |
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«Meurs parmi le tumulte. effroyable des eaux. |
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Car mes lames de fond, ces sirènes secrètes, |
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Ont quitté pour ta mort, hurlant comme des bêtes, |
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Leurs ténèbres et leurs coraux. |
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« Meurs ! Je me ris de tout, phare, signal ou havre ! |
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Perdu, seul, insulté par mes soufflets salins, |
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Écoute jusqu'ici pleurer tes orphelins, |
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Toi dont je ne voulais que le prochain cadavre ! |
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« Meurs ! Meurs ! que le grand cri de mille goélands, |
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A travers mon fracas lézarde l'ombre noire, |
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Afin quêtes petits apprennent la victoire |
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Des sirènes aux cheveux blancs ! |
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« Meurs ! Tu seras péché bientôt, pêcheur de soles ! |
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Meurs ! Que ton corps sombré, pris parmi les filets, |
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Nourrisse mes poissons qu'autrefois tu volais, |
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Et qu'il s grouillent, vivants, au creux de tes chairs molles ! » |
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Et le pêcheur a dit : « Au secours ! Je me meurs ! |
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Je sens toute la mer qui m'entre dans la gorge ! |
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Je descends, je descends dans les cruelles fleurs |
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Dont le dessous des eaux regorge ! |
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C'est fini…-De longs jours, j'aurais peine', sué, |
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Et je n'aurais jamais été rien qu'un pauvre homme. |
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Je n'ai pas eu ma part de terre ferme, en somme, |
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Et la mer m'a nourri, mais elle m'a tué. |
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« Adieu, vous tous, adieu, ma petite dernière, |
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Mes yeux bleus ! On te porte encore dans les bras, |
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Et demain, au réveil, tu ne comprendras pas |
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Que tu viens de perdre ton père. |
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« Et vous mes fils, voués à l'horizon peu sûr, |
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Pêcheurs futurs, connaîtrez-vous ce paroxysme, |
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Et mourrez-vous aussi dans l'obscur héroïsme |
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De payer de sa vie un peu de pain moins dur ? |
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« Adieu ! La mer m'emporte, elle achève son crime. |
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Je meurs seul, loin des miens, dans l'horreur et le noir |
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Mais ma pauvre âme ira rejoindre sur la cime |
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Ceux qui sont morts pour leur devoir ! » |
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