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Sébastien-Roch-Nicolas de CHAMFORT
ŒUVRES COMPLÈTES
(POÉSIES)
1851
ÉPITRES
ÉPITRE SUR LA VANITÉ DE LA GLOIRE
Tu n’vetulæ auriculis alienis collegis esc as ?
C’en est donc fait,et ton âme sensible 4+6 z
A ses vrais gtsva se livrer enfin ! 4+6 a
Tu suis, ami,la pente irrésistible 4+6 z
Qui des beaux artst’applanit le chemin. 4+6 a
5 Tu sais trop bienqu’une plume immortelle 4+6 b
Nous a tracéles dégts, les hasards, 4+6 c
Qu’en cette liceouverte à nos regards 4+6 c
Sème souventla fortune cruelle. 4+6 b
Oui, des destinsla jalouse fureur, 4+6 d
10 Osant mêlerl’absynthe à l’ambroisie, 4+6 e
A poursuivil’aimable poésie, 4+6 e
Et du nectaraltéré la douceur. 4+6 d
Mais, cher ami,cette muse badine, 4+6 f
Vive autrefois,alors un peu chagrine, 4+6 f
15 Sur un fond noirdétrempa ses couleurs ; 4+6 g
Et cette abeille,en volant sur les fleurs, 4+6 g
Avait sentila pointe d’une épine : 4+6 f
Pour moi, je veux,aux yeux de mon ami, 4+6 h
En badinant,combattre sa chimère ; 4+6 i
20 Faut-il des dieuxemprunter le tonnerre 4+6 i
Pour écraserun si faible ennemi ? 4+6 h
Je t’obéis.Tu m’ordonnes de croire 4+6 j
Que ton esprit,et même ta raison, 4+6 k
N’écoute icique l’instinct de la gloire, 4+6 j
25 Et ne se rendqu’à son noble aiguillon. 4+6 k
Des vanitésde la nature humaine, 4+6 l
Dis-tu, la gloireest encor la moins vaine ; 4+6 l
Et du trépasje veux sauver mon nom. 4+6 k
Quoi ! ta raison,quoi ! cet esprit si sage 4+6 m
30 Conserve encorce préjugé falot ! 4+6 n
Quoi ! de la mortton être est le partage ! 4+6 m
Et tu prétendslui dérober un mot ! 4+6 n
Ton nom ! quel estcet étonnant langage ! 4+6 m
Quoi ! ce désir,vrai fléau de ton âge, 4+6 m
35 Va tourmentertes jours infortunés, 4+6 o
Pour illustrerce frivole assemblage 4+6 m
De signes vainspar le sort combinés ! 4+6 o
Écoute au moinsces argumens célèbres 4+6 p
Qui de l’écoleont percé les ténèbres. 4+6 p
40 Ce qui n’est rienpeut-il avoir un nom ? 4+6 k
Que veux-tu dire ?et quelle illusion ! 4+6 k
Peux-tu forcerton âme fugitive 4+6 q
A s’échapperde l’éternelle nuit ? 4+6 r
Peux-tu rentre ?et quand l’arbre est détruit, 4+6 r
45 Pourquoi vouloirqu’une feuille y survive ? 4+6 q
Quoi ! du néantune ombre veut jouir ! 4+6 s
Mais supposonsque ces vains caractères, 4+6 t
Que le hasarda voulu réunir 4+6 s
Pour distinguer,pour désigner tes pères, 4+6 t
50 Vainqueurs du temps,perceront l’avenir. 4+6 s
Par quelle voieet quel canal fidèle, 4+6 b
Pour te transmettreune atteinte immortelle, 4+6 b
Jusques à toipourront-ils parvenir ? 4+6 s
Ce grand Romain,père de l’éloquence, 4+6 u
55 Père de Romeet consul orateur, 4+6 d
Dans son printempsadora cette erreur. 4+6 d
Mais à la fin,rempli d’indifférence, 4+6 u
Sur ce vain songeil composa, dit-on, 4+6 k
Un beau traitécontre cette démence, 4+6 u
60 Cette fureurd’éterniser son nom, 4+6 k
Traité modeste,et signé Cicéron. 4+6 k
Dans un écrit,voyez-vous ce grand homme 4+6 v
Vanter, prôner,même assez bassement, 4+6 w
Un petit Grec,un sophiste de Rome ; 4+6 v
65 Recommander,et très-expressément, 4+6 w
Au vain portierdu temple de Mémoire 4+6 j
De lui donnerbonne place en l’histoire ? 4+6 j
Le Grec le fit ;mais savez-vous comment 4+6 w
La vanitése vit bien confondue ? 4+6 x
70 La lettre resteet l’histoire est perdue. 4+6 x
Mais admirezcomment, fiers d’être fous, 4+6 y
Devant l’idoleils se prosternent tous ! 4+6 y
Oui, disent-ils,ce sentiment sublime 4+6 z
Qui fait chériret la gloire et l’estime, 4+6 z
75 Par la vertufut imprimé dans nous. 4+6 y
D’une grande âmeil est l’heureux partage ; 4+6 m
Dans notre cœuril descend le premier, 4+6 a
Survit à tous,dispart le dernier. 4+6 a
Il est, dit-on,la chemise du sage : 4+6 m
80 S’il est ainsi,qu’il aille donc tout nu. 4+6 b
Quoi ! vous oseztransformer en vertu 4+6 b
Cette folie,et tirer avantage 4+6 m
De ce délireà d’autres inconnu ! 4+6 b
Et selon vous,tous ces mortels volages, 4+6 m
85 Pour être fous,ne sont point assez sages ! 4+6 m
Je quitte, ami,ce ton de Juvénal : 4+6 d
Permets qu’au moinsma muse plus légère 4+6 i
Ose à tes yeux,sur un prisme moral, 4+6 d
Analysantun préjugé fatal, 4+6 d
90 Décomposerta brillante chimère. 4+6 i
Pardonnez-moi,rare et sublime Homère, 4+6 i
L’air cavalieret le frivole ton 4+6 k
Dont j’ose iciproférer votre nom. 4+6 k
Vous savez bienque mon cœur vous révère. 4+6 i
95 Ai-je oubliéque Samos, Colophon, 4+6 k
Et Clazomène,et Smyrne, et l’Ionie, 4+6 e
Ont disputéjadis avec chaleur 4+6 d
La gloire uniqueet l’immortel honneur 4+6 d
D’avoir produitun si vaste génie ? 4+6 e
100 Vrai créateurde l’art le plus divin, 4+6 a
J’avrais bienque, quand vous y passâtes, 4+6 e
Et qu’on vous vit,aveugle pélerin, 4+6 a
Brillant de gloire,un bourdon à la main, 4+6 a
Du violonvainement vous raclâtes. 4+6 e
105 Chaque pays,même l’heureux séjour 4+6 f
Qui, selon lui,vous a donné le jour, 4+6 f
Peut s’écrier,pour appuyer sa thèse : 4+6 g
Couvert d’honneuret chargé de mal-aise, 4+6 g
Ceint de lauriers,partant manquant de pain, 4+6 a
110 Homère icipensa mourir de faim. 4+6 a
Or, réponds-moi,gueux et divin Homère 4+6 i
(Car maintenantje puis te tutoyer, 4+6 a
Puisqu’il est sûrqu’on a vu ta misère 4+6 i
Ramper, languirdans le double métier 4+6 a
115 De mendiant,et même de poète), 4+6 h
Quand un savant,payé pour te louer, 4+6 a
Te va prônantd’une bouche indiscrète, 4+6 h
Et sans un cœurosant t’apprécier, 4+6 a
Par vanité,par coutume t’admire, 4+6 i
120 Et, t’ayant lu,te vante par oui-dire ; 4+6 i
Son vain encensdescend-il chez les morts 4+6 j
De ton espritcaresser les ressorts ? 4+6 j
Et toi, brillantet fertile génie, 4+6 e
Toi, son rivalet son imitateur, 4+6 d
125 Ainsi que lui,fuyant de ta patrie, 4+6 e
Non pour aller,besacier, voyageur, 4+6 d
Piéton modeste,et pélerin poète, 4+6 h
Faire aux passansune prière honnête ; 4+6 h
Mais pour donnerbals, concerts et cadeaux, 4+6 k
130 Pièce nouvelleet spectacles nouveaux, 4+6 k
le cœur sentlorsque l’esprit s’élève ; 4+6 l
Pour transporterAthènes à Genève, 4+6 l
T’y consoler,dans le sein du repos, 4+6 m
Et de la haineet de l’encens des sots ; 4+6 m
135 Je l’avrai,quand un mortel sincère, 4+6 i
De tes écritsardent admirateur, 4+6 d
Vante Arouet,il a flatté Voltaire ; 4+6 i
Mais quand la mort,au gré de maint auteur, 4+6 d
De maint jaloux,surtout de maint libraire, 4+6 i
140 T’aura frappéde sa faux meurtrière ; 4+6 i
Sous cette tombe,eh bien ! parle, réponds, 4+6 n
Mortel fameux :lequel de ces deux noms, 4+6 n
Ces noms vantés,Arouet ou Voltaire, 4+6 i
Dans ton sommeil,par un plus sûr pouvoir, 4+6 o
145 Ranimerates cendres réveillées ? 4+6 p
Lequel des deuxsaura mieux émouvoir 4+6 o
De ton cerveaules fibres ébranlées ? 4+6 p
Auquel, enfin,devons-nous envoyer 4+6 a
Ce fade encensd’un éloge unanime ? 4+6 z
150 Noble fuméeet tribut légitime 4+6 z
Qu’à tes travauxl’univers doit payer ? 4+6 a
Du sort jalouxun caprice ordinaire 4+6 i
A mon valetdonna le nom d’Hector. 4+6 q
L’entendez-vous,désœuvré téméraire, 4+6 i
155 Estropier,en insultant Homère, 4+6 i
Les noms sacrésd’Ulysse et de Nestor ; 4+6 q
Et de Dacier,dans ses nobles emphases, 4+6 r
Faire ronflerles éternelles phrases ? 4+6 r
Quand de Priamle fils infortuné, 4+6 a
160 Le nom d’Hector,ce fléau de la Grèce, 4+6 g
S’en vient frapperson esprit étonné, 4+6 a
Avez-vous vuredoubler son ivresse, 4+6 g
Et sur son front,de joie enluminé, 4+6 a
Étincelersa grotesque allégresse ? 4+6 g
165 Je sonne ; il vientd’un air de dignité : 4+6 a
Et le héros,en me versant à boire, 4+6 j
Plus sûr que moide vivre dans l’histoire, 4+6 j
Savoure en paixson immortalité. 4+6 a
Lorsque la mort,sans toucher à sa gloire, 4+6 j
170 Rassemblerasous ses voiles épais 4+6 s
L’Hector de Troyeavec l’Hector laquais, 4+6 s
Et qu’un des deuxquittera ma livrée 4+6 t
Pour endossercelle du vieux Pluton ; 4+6 k
Que sais-je, moi,si son âme enivrée 4+6 t
175 Par les vapeursdont jadis ce grand nom 4+6 k
A chatouillésa cervelle timbrée, 4+6 t
Dans son erreurn’ira point partager 4+6 a
Les vains honneursdus au rival d’Achille ; 4+6 u
Si le Troyenardent à se venger, 4+6 a
180 Dont cet outrageéchauffera la bile 4+6 u
D’un coup de poingvaillamment asséné 4+6 a
Tout à l’instard’Ulysse dans Homère, 4+6 i
Ne voudra pointtrancher en sa colère 4+6 i
Ce grand débat,noblement terminé ? 4+6 a
185 Six Annibalsont illustré Carthage ; 4+6 m
De tous jadison vanta le courage ; 4+6 m
Deux sont encorconnus par leurs exploits, 4+6 v
Et de la gloireont enroué la voix. 4+6 v
L’un, des Romainsl’ennemi redoutable, 4+6 x
190 Pendant treize ansd’un sénat éperdu 4+6 b
Fut la terreur ;et l’autre plus traitable, 4+6 x
Nous dit l’histoire,avait été pendu. 4+6 b
Vous, pensez-vousqu’Annibal morfondu 4+6 b
Dort à part soi,rempli d’indifférence, 4+6 u
195 Sur ses lauriersou bien sur sa potence ? 4+6 u
Apprenez doncque lorsqu’en vos récits 4+6 y
Vous célébrezle fier vainqueur de Rome 4+6 v
Trop vaguement,en termes peu précis, 4+6 y
Le cher pendu,qui croit être un grand homme, 4+6 v
200 Prend pour son compteun éloge indécis. 4+6 y
Quatre Platonsont honoré la Grèce ; 4+6 g
Mais d’un surtouton célèbre le nom. 4+6 k
Lorsque ma voix,pour prix de sa sagesse, 4+6 g
A dit un motde l’immortel Platon, 4+6 k
205 Apprenez-moicomment, par quelle adresse, 4+6 g
Par quelle voieet quels secrets rapports, 4+6 j
Ce triste mot,dans la foule des morts, 4+6 j
Du vrai Platonpeut-il trouver l’adresse ? 4+6 g
Platon ! Platon !voyez comme à ma voix 4+6 v
210 Tous les Platonsaccourent à la fois ! 4+6 v
Voyez, voyez,comme chacun s’empresse ! 4+6 g
Chaque Platon,prenant le nom pour soi, 4+6 z
Vole, et s’écrieen écartant la presse : 4+6 g
Çà, rangez-vous ;place, messieurs, c’est moi. 4+6 z
215 Le vrai Platonreste seul immobile : 4+6 u
Mais j’apeoisvenir d’un pas agile 4+6 u
Et le sophisteet le grammairien : 4+6 a
J’y suis, monsieur,que voulez-vous ? — Moi ! rien. 4+6 a
Chaque paysa produit son Hercule, 4+6 a
220 Réparateurdes torts, vengeur des droits ; 4+6 v
Mais un surtout,impérieux émule, 4+6 a
De ses rivauxa conquis les exploits. 4+6 v
Un seul, malgréla docte académie, 4+6 e
Malgré Saumaiseet malgré son génie, 4+6 e
225 Malgré Bardus,et Lipse, et Scaliger, 4+6 a
Fait aux savansles honneurs de l’enfer. 4+6 a
Or, qui ne croitqu’un jour, dans leur colère, 4+6 i
Pour se vengerd’un odieux confrère, 4+6 i
L’Égyptien,l’Africain, le Gaulois, 4+6 v
230 Dans l’intérêtdont le nœud les rassemble, 4+6 c
Contre le Grecne se liguent ensemble, 4+6 c
Et sur son dosne tombent à la fois ? 4+6 v
Peut-être aussiqu’un jour dans l’Élysée, 4+6 t
Signant la paix,devenus bons amis, 4+6 y
235 Tranquillement,près de Mégère assis, 4+6 y
Tous en commundémêlant la fusée, 4+6 t
Édifierontles mânes attendris. 4+6 y
Sans nul malheurla dispute appaisée 4+6 t
Sur ces grands pointspourra nous réunir ; 4+6 s
240 Et nous sauronsà quoi nous en tenir. 4+6 s
Alors chez nousla vérité reçue 4+6 x
Saura fixer,distinguer pour jamais 4+6 s
Et leur pays,et leur siècle, et leurs faits, 4+6 s
Et du fuseauséparer la massue. 4+6 x
245 Ce n’est pas tout :par un funeste sort 4+6 d
Une syllabe,une lettre éclipsée, 4+6 t
Par le hasard,par le temps effacée, 4+6 t
Suffit souventpour nous rendre à la mort. 4+6 d
Ce Grec fougueux,l’immortel Alexandre, 4+6 e
250 Lequel un soir,au gré d’une catin, 4+6 a
Ivre d’amouret de gloire et de vin, 4+6 a
Mit par plaisirPersépolis en cendre : 4+6 e
Héros jaloux,de qui la vanité 4+6 a
Avait pleurésur les lauriers d’un père 4+6 i
255 Dont il craignaitque la postérité 4+6 a
Ne laissât plusà sa témérité 4+6 a
De grands exploits,de sottises à faire ; 4+6 i
A ce vengeurde son peuple outragé, 4+6 a
A ce guerrierchacun doit son suffrage. 4+6 m
260 Sur notre encens,sur l’éternel hommage 4+6 m
De l’universconquis et ravagé, 4+6 a
Il a des droits,puisqu’il l’a saccagé : 4+6 a
Quels sont souventles transports de sa rage, 4+6 m
Quand les honneursqu’on lui doit accorder 4+6 a
265 Sont, au Mogol,prodigués à Scander ? 4+6 a
Faut-il convaincreun esprit indocile 4+6 u
Qu’un caractère,une lettre futile, 4+6 u
Pour tout gâter,hélas ! suffit trop bien ! 4+6 a
Montagne est tout,et Montaigne n’est rien ; 4+6 a
270 Si quelque jourune âme charitable 4+6 x
Dans les enfersne daigne l’informer 4+6 a
Que des Françaisla langue variable 4+6 x
Détruit son nom,voulant le réformer. 4+6 a
L’auteur charmant,et qui, l’auteur ! non, l’homme, 4+6 v
275 Par notre encensn’est jamais chatouillé, 4+6 a
Et dans l’oublidormant d’un profond somme, 4+6 v
Par un vain bruitn’est jamais éveillé. 4+6 a
Ah ! j’ai bien peurque trompé par la rime, 4+6 z
Malgré mes soins,l’historien Dion 4+6 k
280 N’ose usurpercette offrande d’estime 4+6 z
Que mon cœur paieau délicat Bion ; 4+6 k
Et de leurs nomsmaudissant l’imposture, 4+6 f
Maints froids auteurs,maints héros oubliés 4+6 o
Offrent souventaux mânes égayés, 4+6 o
285 D’un quiproquola comique aventure. 4+6 f
Du même nomcent rois ont hérité : 4+6 a
Tous ont vécupour la postérité ; 4+6 a
Tous ont vouluconsacrer leur mémoire. 4+6 j
Mais vous, mortels !votre légèreté, 4+6 a
290 Par un oublitrop funeste à leur gloire, 4+6 j
En les nommantne les désigne point : 4+6 g
C’est donc en vainqu’ils vivent dans l’histoire. 4+6 j
Ignorez-vousqu’il faut de point en point, 4+6 g
Pour les atteindreau ténébreux empire, 4+6 i
295 Pour que l’élogeait sur eux son effet, 4+6 h
Fixer les temps,les lieux, marquer, détruire 4+6 i
Leurs nom, surnom,numéro, sobriquet ? 4+6 h
Sans tous ces soins,le vengeur de la Prusse, 4+6 i
Le fier vainqueurde l’Allemand, du Russe, 4+6 i
300 Héros du siècleet célèbre à la fois 4+6 v
Par les combats,par la flûte et les lois ; 4+6 v
Lui qu’Arouetannonçait à la terre, 4+6 i
Et que depuisa chansonné Voltaire ; 4+6 i
Ce Frédéric,Dieu ! quel affront cruel ! 4+6 j
305 Peut voir un joursa grande âme avilie 4+6 e
Humer l’odeurd’un encens éternel, 4+6 j
Faut-il le dire ?avec un vil mortel, 4+6 j
Un Frédéric,baron de Silésie, 4+6 e
Lequel voudra,comme dans son château, 4+6 k
310 Donnant aux mortsun spectacle nouveau, 4+6 k
Porter partout,sur la rive infernale, 4+6 l
Et ses quartiers,et sa voix chapitrale 4+6 l
Il est bien vraique, pour prendre un détour. 4+6 f
Le mot flatteur,quittant les grandes routes, 4+6 m
315 Descend moins viteau ténébreux séjour ; 4+6 f
Que le héros,attentif aux écoutes, 4+6 m
Dans son cerveaumoins prompt à s’ébranler 4+6 a
Ne peut sentirqu’une atteinte légère. 4+6 i
Que feriez-vous ?Il faut s’en consoler ; 4+6 a
320 Et du destinquel est l’arrêt sévère ! 4+6 i
Les plaisirs purspour nous ne sont point faits ; 4+6 s
Même en enfer,ils sont tous imparfaits. 4+6 s
Or maintenant,qu’un censeur téméraire, 4+6 i
Un bel esprit,volage papillon, 4+6 k
325 Vienne fronderce travail salutaire 4+6 i
Qui, pour changer,pour rétablir un nom, 4+6 k
Dans cette nuitapportant la lumière, 4+6 i
Va compilantde vieux compilateurs, 4+6 g
Des manuscritset d’antiques auteurs. 4+6 g
330 Sans un talent,sans de si dignes veilles, 4+6 n
Tous les héros,leurs noms et leurs merveilles, 4+6 n
Les vains exploitsde cent mortels fameux, 4+6 o
Vivant pour nous,seraient perdus pour eux. 4+6 o
Quel nom donnerà la folle imprudence 4+6 u
335 De ces humainsqui, dans leur déraison, 4+6 k
Après avoiravec inconséquence 4+6 u
Tout immolépour anoblir leur nom, 4+6 k
Et qui, vieillisdans leur culte frivole, 4+6 p
N’ont rien omispour orner leur idole, 4+6 p
340 L’osent détruire,et dont l’aveugle erreur 4+6 d
Y substitueun fantôme imposteur, 4+6 d
De qui jamaiscette gloire n’approche ? 4+6 q
Quoi ! Du Terrail,parrain du roi François, 4+6 v
Ami des preux,chevalier sans reproche, 4+6 q
345 Au bon Bayardcède tous ses exploits ! 4+6 v
Et ne crois pasqu’avec plus d’indulgence 4+6 u
Je traite encorcette autre vanité 4+6 a
Qui, des climatsrapprochant la distance, 4+6 u
Entrne au loinnotre esprit emporté. 4+6 a
350 Enseigne-moiquelle est la différence. 4+6 u
Qu’importe enfinà ta félicité 4+6 a
Que dans mille anstes vers se fassent lire, 4+6 i
Ou que Stockholmaujourd’hui les admire ? 4+6 i
Du Nord jalouxle souffle impétueux 4+6 o
355 Dissiperacet encens si frivole ; 4+6 p
Et sa fureurira, loin de tes yeux, 4+6 o
Le déposerdans les antres d’Éole. 4+6 p
De près au moins,l’éloge plus flatteur, 4+6 d
Voisin de toi,descendrait dans ton cœur ; 4+6 d
360 Et le zéphyr,sur son aile légère, 4+6 i
Jusqu’à tes sensdaignerait apporter 4+6 a
Une vapeur,hélas ! bien passagère, 4+6 i
Que tes espritspourraient au moins gter. 4+6 a
Ah ! que le sort,pour moi plein d’indulgence, 4+6 u
365 Sur le présentborne son influence, 4+6 u
Et de mes joursmarque chaque moment 4+6 w
Par un plaisir,ou par un sentiment : 4+6 w
De l’avenir,ami, je le dispense. 4+6 u
Je veux sentir,je veux jouir enfin : 4+6 a
370 Et mon esprit,dans son indifférence, 4+6 u
D’aucun absentn’est le contemporain. 4+6 a
Pauvres humains !quelle est votre inconstance ! 4+6 u
Qu’est-ce que l’hommeà soi-même livré ? 4+6 a
Oui, cher ami,moi de qui l’imprudence 4+6 u
375 Vient de traiterde fièvre, de démence, 4+6 u
Ce beau désirpar les temps consacré, 4+6 a
De réunirla double jouissance 4+6 u
D’un nom pourtantà jamais révéré ; 4+6 a
Que sais-je, hélas !si mon inconséquence, 4+6 u
380 Par une sotteet double vanité, 4+6 a
Ne prétend pointfranchir l’espace immense 4+6 u
De l’universet de l’éternité ; 4+6 a
Et si des tempspeant la nuit obscure, 4+6 f
Je ne veux pointaller, dans un Mercure, 4+6 f
385 Au bout du monde,à l’immortalité ? 4+6 a
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