Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
BOU_1/BOU1
Louis BOUILHET
Melænis
conte romain
1857
CHANT PREMIER
De tous ceux qui jamaisont promené dans Rome, 6+6 a
Du quartier de Suburreau mont Capitolin, 6+6 b
Le cothurne à la grecqueet la toge de lin, 6+6 b
Le plus beau fut Paulus ;c'est ainsi que se nomme 6+6 a
5 Le héros de ces vers,et je vous dirai comme 6+6 a
Il fut d'un sénateurle produit clandestin. 6+6 b
« Tout beau ! Dit le censeur,aux poses magistrales, 6+6 a
« Un héros clandestin !C'est une indignité !… » 6+6 b
L'auteur n'est pas de ceuxqui cherchent les scandales, 6+6 a
10 Mais depuis Romulus,bien d'autres l'ont été ; 6+6 b
Qui compta les baisers,au temps des saturnales ? 6+6 a
Qui dira les secretsdes belles nuits d'été ? 6+6 b
La faute en est peut-êtreau soleil d'Italie, 6+6 a
Aux parfums inconnusqui, sur le Tibre épars, 6+6 b
15 Avec le vent du soirmontent au champ de mars ; 6+6 b
Mais il faudrait plutôts'en prendre à la folie 6+6 a
Qui veut que, chaque jour,notre ville s'oublie, 6+6 a
Comme une courtisane,aux débauches des arts ! 6+6 b
Sans doute il est bien douxde voir danser Bathylle, 6+6 a
20 Aux sons entrecoupésdes flûtes de Sicile, 6+6 a
Et, sous la lampe d'oraux mobiles rayons, 6+6 b
Luire le frein d'argentque mordent les lions ; 6+6 b
Mais garder sa pudeurest chose difficile, 6+6 a
Quand on la fait asseoirparmi les histrions. 6+6 b
25 Caton n'avait pas tort :je sais plus d'une femme 6+6 a
Qui de l'hymen, au cirque,égara le lien ; 6+6 b
Là, j'ai vu s'allumerde longs regards de flamme, 6+6 a
Là, plus d'un pied charmantvint effleurer le mien ; 6+6 b
Tous ces jeux, en un mot,sont un usage infâme, 6+6 a
30 Si j'étais empereur,je n'y changerais rien !… 6+6 b
Donc il était bâtard,à quoi bon vous le taire ? 6+6 a
Sans famille, et pourtant,vivait aux rois pareil ; 6+6 b
Qu'importe le berceau,quand l'olympe est vermeil, 6+6 b
Et que d'un pied hardil'on peut frapper la terre ? 6+6 a
35 Le fleuve ne sait pasquelle source est sa mère ! 6+6 a
L'aigle a perdu son nidquand il monte au soleil ! 6+6 b
Paulus avait vingt ans ;noble et beau de figure, 6+6 a
Il laissait son destinflotter à l'aventure 6+6 a
Comme sa toge ; au reste,il suivait les rhéteurs, 6+6 b
40 Et se souciait peude savoir les auteurs 6+6 b
De ses jours, dormant bienaux bouges de Suburre, 6+6 a
Et soupant quelquefoismieux que des sénateurs. 6+6 b
C'est un métier charmantet bien digne d'envie, 6+6 a
Par Castor et Pollux !Quoi qu'en disent les vieux, 6+6 b
45 Que de polir des motsle tour ingénieux, 6+6 b
Et de tordre la phraseavec sa fantaisie, 6+6 a
Comme un serpent marbrédont un jongleur d'Asie 6+6 a
Roule autour de ses flancset déroule les nœuds. 6+6 b
D'ailleurs notre hérosavait en abondance 6+6 a
50 Toutes les qualitésque marquent les auteurs : 6+6 b
L'œil ferme, le poumonsolide, la prestance 6+6 a
Du corps, et la vertuqu'il faut aux orateurs ; 6+6 b
De façon qu'il savait,selon la circonstance, 6+6 a
Toucher par le pathos,ou plaire par les mœurs. 6+6 b
55 Nul ne sut plus à pointdéchirer sa tunique, 6+6 a
Hérisser ses cheveuxà la manière antique, 6+6 a
Tordre ses bras dans l'air,et de l'émotion 6+6 b
Passer à l'ironie,avec gradation ; 6+6 b
Véhément dans la preuve,âpre pour la réplique, 6+6 a
60 Et, d'après le sujet,réglant la passion. 6+6 b
Le vieux Polydamas,son mtre en éloquence, 6+6 a
Malgré ses cheveux blancs,je le dis entre nous, 6+6 b
S'il n'en t été fier,s'en fût montré jaloux ; 6+6 b
En somme il l'adorait,l'ayant vu, dès l'enfance, 6+6 a
65 Chaque jour, à ses pieds,écouter en silence, 6+6 a
Grave, le style en main,la tablette aux genoux. 6+6 b
Quant au docte Paulus,son âme était remplie 6+6 a
Par deux affections,Polydamas d'abord ; 6+6 b
Puis une vieille femme,à la face jaunie, 6+6 a
70 Au front ridé, venant,je crois, de Campanie, 6+6 a
Sorcière, c'est tout dire,et qui, sans nul effort, 6+6 b
Aux lignes de la main,lisait l'arrêt du sort. 6+6 b
Staphyla fut son nom ;vous narrer quelle cause 6+6 a
Avait ainsi courbécette tête morose, 6+6 a
75 D'abord c'est difficile,et puis c'est un talent 6+6 b
De ne pas dire toutdès le commencement, 6+6 b
Horace, dans ses vers,recommande la chose, 6+6 a
Et je l'estime troppour agir autrement. 6+6 b
Pourtant vous apprendrezque la vieille Staphyle, 6+6 a
80 Comme son propre enfantavait nourri Paulus, 6+6 b
‒ Sans doute par pitié,car je n'en sais pas plus ; ‒ 6+6 b
Elle avait entouréson enfance débile 6+6 a
De tendresse et d'amour ;puis dans la grande ville 6+6 a
Un jour l'avait conduit,ses douze ans révolus. 6+6 b
85 Ils vivaient tous les deux,rhéteur, magicienne, 6+6 a
La phrase cadencée,et le philtre amoureux. 6+6 b
Chez Staphyla surtout,deniers pleuvaient sans peine, 6+6 a
Et, quoi que Tulliusen dise, tous les deux, 6+6 b
Quand ils se rencontraientsur la voie Appienne, 6+6 a
90 Se regardaient sans rireet sans baisser les yeux. 6+6 b
Staphyla demeuraitau quartier de Suburre, 6+6 a
Tout près de l'Esquilin,dans une rue obscure ; 6+6 a
Le bouge était désertet par le temps noirci ; 6+6 b
Mais, pour faire au lecteurun chemin raccourci, 6+6 b
95 Précisément le jour je prends l'aventure, 6+6 a
Paulus allait la voir,et nous irons aussi. 6+6 b
Lesbie, et vous, Néère,adorables sirènes, 6+6 a
Quand pour voir un amantjeune ou vieux, bel ou laid, 6+6 b
Vous prenez la litière,ou montez les carènes, 6+6 a
100 D' vous vient cette ardeurétrange, s'il vous plt ? 6+6 b
Hélas ! Je sais le fonddes tendresses humaines : 6+6 a
Une robe de Tyr,un voile de Milet ! 6+6 b
Paulus ne voulait pasde voile, je suppose, 6+6 a
Ni de bracelets d'or,ni de tunique rose ; 6+6 a
105 Sa ceinture était vide,et cet enfant gâté 6+6 b
S'était senti le cœurpar l'amour agité ; 6+6 b
Or, il allait bon pas,et tandis que je cause, 6+6 a
À la porte déjàses deux mains ont heurté. 6+6 b
Staphyla vint ouvrir ;les barres transversales 6+6 a
110 Sonnèrent en tombantavec un bruit d'airain, 6+6 b
Et la vieille apparutune torche à la main ; 6+6 b
Ses cheveux, çà et là,flottaient sur ses traits pâles, 6+6 a
Une tunique noireenveloppait son sein, 6+6 b
Et, sur son bras livide,un serpent en spirales 6+6 a
115 Se tordait ; la sueurinondait tout son corps ; 6+6 a
Elle avait cet aspecteffrayant, immobile, 6+6 b
Qu'on voit grandir la nuit,dans un songe fébrile, 6+6 b
Quand arrive aux vivantsla visite des morts : 6+6 a
« Qui m'appelle en ces lieux ?» murmura la sibylle. 6+6 b
120 « Paulus, » dit une voixqui venait du dehors. 6+6 a
Par un matin joyeux,quand le soleil éclaire 6+6 a
Le grand manteau glacéqui pèse sur l'Etna, 6+6 b
Avez-vous vu parfoisun rayon de lumière 6+6 a
Passer, comme un sourire,aux lèvres du cratère ? 6+6 a
125 Tel, sous ses blancs cheveux,le front de Staphyla 6+6 b
Resplendit tout à coup,quand Paulus lui parla ; 6+6 b
Et lui tendant la main :« tu peux entrer, dit-elle, 6+6 a
« Nous n'avons pas icide mystères pour toi ; 6+6 b
« Enfant, tu viens bien tard !Quelle cause t'appelle ? 6+6 a
130 « Tu m'oubliais, Paulus,et tu vivais sans moi !… » 6+6 b
Paulus sentit des pleurslui mouiller la prunelle, 6+6 a
Et jeta sur Staphyleun regard plein d'émoi. 6+6 b
Elle était, en effet,bien pâle et bien cassée ; 6+6 a
Quelque poids effrayant,amour, haine ou remords, 6+6 b
135 Avant l'âge, sans doute,avait usé son corps, 6+6 b
Et ployé sans retoursa jeunesse brisée. 6+6 a
‒ Terre, il est des vivantsdont la vie est passée ! 6+6 a
Tombeaux, vous n'avez pastout le peuple des morts ! 6+6 b
Côte à côte, ils marchaient ;la salle était immense, 6+6 a
140 Sur le pavé sonore,on entendait le bruit 6+6 b
De leurs pas inégauxse perdre dans la nuit ; 6+6 b
La lampe, sous la vte,en fumant se balance, 6+6 a
Des ailes battent l'air,des yeux ronds, en silence, 6+6 a
Regardent le rhéteurque la vieille conduit. 6+6 b
145 De bizarres contours,des formes inconnues 6+6 a
Rampent confusémentsur les murailles nues ; 6+6 a
Squelettes grimaçantsqui se donnent la main, 6+6 b
Poignards ensanglantés,cyprès, coupes d'airain, 6+6 b
Plantes aux sucs mortelsde Colchyde venues, 6+6 a
150 Et le jaune safranet le pâle cumin. 6+6 b
Tout se mêle et s'agite ;une flamme bleuâtre 6+6 a
Siffle sur les charbonset sautille dans l'âtre ; 6+6 a
Un renard aux longs poilsglapit au coin du feu, 6+6 b
L'eau lustrale frissonneen son vase d'albâtre, 6+6 a
155 Le serpent se tortille ;on dirait qu'en ce lieu, 6+6 b
Paulus est un amique l'on connt un peu. 6+6 b
La caverne s'ébat ;la sorcière est joyeuse ; 6+6 a
Hélas ! Son cœur aussi,retraite ténébreuse, 6+6 a
Dans ses mille recoins,voit ramper, loin du jour, 6+6 b
160 Tout un monde hideuxqui grouille en son séjour, 6+6 b
Rêves morts, noirs pensers,vengeance tortueuse ; 6+6 a
Mais, quand Paulus arrive,elle en fait de l'amour ! 6+6 b
À l'ombre du foyer,sur un vieux banc de chêne, 6+6 a
Ils s'assirent longtemps,groupe mystérieux 6+6 b
165 Que la torche rougeâtreéclairait de ses feux ; 6+6 b
Paulus était charmant,sous sa toge de laine, 6+6 a
Staphyle souriait,et respirant à peine, 6+6 a
L'entourait tout entierd'un regard de ses yeux. 6+6 b
Puis, sur ses cheveux noirsposant sa main flétrie, 6+6 a
170 Comme fait une mèreauprès de son enfant, 6+6 b
Elle lui rappelaitles jours de Campanie, 6+6 a
Les rires et les pleurs,à l'aube de la vie, 6+6 a
Tous ses rêves passés ;‒ mais le point important 6+6 b
C'est que Paulus avaitvingt drachmes en partant ! 6+6 b
175 Il allait, et ses pieds,sur les pavés antiques, 6+6 a
Jetaient un bruit étrangeà l'écho des portiques ; 6+6 a
L'ombre silencieuseondulait alentour ; 6+6 b
Tout dormait, hors ces feux,étoiles impudiques, 6+6 a
Qu'on voit trembler en fouleau fond du carrefour, 6+6 b
180 Foyers étincelants veille, nuit et jour, 6+6 b
Comme à ceux de Vesta,la prêtresse éternelle, 6+6 a
La débauche au sein nu,posant en liberté 6+6 b
Ses deux pieds triomphantsau front de la cité ! 6+6 b
Rayons du temple immense viennent pêle-mêle 6+6 a
185 Les hommes et les dieuxs'abriter sous ton aile, 6+6 a
Ô puissance inconnue,ardente volupté ! 6+6 b
Il allait, il allait ;dans leur cellule assises, 6+6 a
Des femmes en passantl'appelaient de la main ; 6+6 b
Parfois on entendaitmonter un chœur lointain, 6+6 b
190 Et le rouge fanalque tourmentent les brises 6+6 a
Faisait danser aux mursdes formes indécises ; 6+6 a
Mais Paulus était sageet suivait son chemin, 6+6 b
Plus sage qu'Hippolyte,à ce que dit l'histoire, 6+6 a
Honorant la vertucomme au temps des aïeux, 6+6 b
195 ‒ Selon la circonstanceet le jour et les lieux ; ‒ 6+6 b
Or, sans se retourner,il fendait l'ombre noire, 6+6 a
Ayant, cette nuit-là,pour défendre sa gloire, 6+6 a
Le besoin de dormiret la crainte des dieux ! 6+6 b
Mais, outre le fatum, la puissance suprême, 6+6 a
200 La seule déitéque l'on n'adore pas, 6+6 b
Tant de dieux opposéss'attachent à nos pas, 6+6 b
Que l'esprit haletantretombe sur lui-même ; 6+6 a
Mercure avec Thémisa d'étranges débats, 6+6 b
Bacchus veut qu'on s'enivreet Vénus veut qu'on aime. 6+6 a
205 Donc, je ne sais quel dieuvint égarer Paulus : 6+6 a
Les étroits carrefoursse succédaient dans l'ombre, 6+6 b
Croisant de toutes partsleurs dédales sans nombre ; 6+6 b
Chaque pas qu'il faisaitle perdait encor plus, 6+6 a
Comme la mouche priseà quelque réseau sombre, 6+6 b
210 S'épuise, pour sortir,en efforts superflus. 6+6 a
J'aime la nuit qui tombeen une frche idylle, 6+6 a
Et les pasteurs assissur le bord du ruisseau, 6+6 b
Chantant au clair de lune,ou dormant sous l'ormeau ; 6+6 b
Mais je crois qu'un bon gîte,aux champs comme à la ville, 6+6 a
215 Pour le somme est meilleurque l'herbe de Virgile, 6+6 a
Et tous les beaux gazons broute le troupeau. 6+6 b
Il est plus triste encorde coucher dans la rue, 6+6 a
Ainsi jugeait Paulus.Il s'était arrêté, 6+6 b
Interrogeant des yeuxl'ombre sans cesse accrue, 6+6 a
220 Quand soudain un doux bruitpar la brise porté, 6+6 b
Son frémissant de luth,voix de femme inconnue, 6+6 a
Vint le frapper au frontcomme un souffle d'été ! 6+6 b
Je suis désespéréde vous dire la chose ; 6+6 a
J'eusse aimé mieux le voir,près du mont Palatin, 6+6 b
225 Dans le docte faubourgdormir jusqu'au matin ; 6+6 b
Mais nous formons des vœuxdont le hasard dispose : 6+6 a
Près de là rayonnaitun logis clandestin, 6+6 b
Paulus, sans hésiter,heurta la porte close. 6+6 a
« Qui frappe ? ‒ ouvrez. ‒ ton nom ?‒ qu'importe ! ‒ tout est plein 6+6 a
230 « Comme le ventre rondd'un prêtre salien, 6+6 a
« Les chambres et les lits ;une ombre, par Hercule ! 6+6 b
« Ne s'y logerait pas ;bonsoir ! » le vestibule 6+6 b
S'éclaira cependant,et Paulus pensa bien 6+6 a
Que le son des écuslèverait tout scrupule. 6+6 b
235 Ruisselant de sueuret tout pétri de fard, 6+6 a
Un homme vint ouvrir ;de son regard cupide 6+6 b
Il parcourut Paulus ;son visage blafard 6+6 a
Suintait sous sa peinture,ainsi qu'un mur humide, 6+6 b
Et le myrte, en festons,de sa tempe livide 6+6 b
240 Montait dans ses cheveuxretroussés avec art. 6+6 a
Paulus, pour tout discours,fit sonner sa ceinture, 6+6 a
Prenant avec raison,dans cette conjoncture, 6+6 a
L'exorde insinuant.C'était un orateur 6+6 b
Habile à se plierau gt de l'auditeur. 6+6 b
245 La cause fut gagnée,et, sans plus de murmure : 6+6 a
« Les gens se presseront,dit l'hôte, entrez, seigneur ! » 6+6 b
Paulus suivit son guideau fond d'un réduit sombre, 6+6 a
les lampes mouraienten pétillant dans l'ombre, 6+6 a
, sur les lits épars,pêle-mêle étendus, 6+6 b
250 Hommes, femmes, enfantstordaient leurs membres nus ; 6+6 b
Tous criaient, bruissaient,et des buveurs sans nombre 6+6 a
Vidaient les pots d'argileaux cloisons suspendus. 6+6 b
Plus d'un groupe envieux,accroupi sur la terre, 6+6 a
Jetait aux lits trop pleinsdes regards de colère ; 6+6 a
255 Un poëte rêvait,sur son coude engourdi, 6+6 b
D'autres, dans leurs manteaux,se perdaient à demi, 6+6 b
Ou dormaient, appuyésaux murailles de pierre, 6+6 a
En balançant leur frontpar l'ivresse alourdi. 6+6 b
Mais comme un astre d'ordans la nuit ténébreuse, 6+6 a
260 Comme la fleur écloseaux fentes des vieux murs, 6+6 b
Une femme était làqui, jeune et radieuse, 6+6 a
Se détachait en blancsur les groupes obscurs ; 6+6 b
D'un sistre recourbésa main capricieuse, 6+6 a
Comme un essaim d'oiseaux,éveillait les sons purs. 6+6 b
265 Elle était belle ainsi ;la pourpre qui la noue 6+6 a
De sa jambe arrêtaitles contours onduleux, 6+6 b
Un sourire flottaitde sa lèvre à ses yeux, 6+6 b
Des sourcils longs et noirscouraient jusqu'à sa joue, 6+6 a
Et ses cheveux bouclés la brise se joue 6+6 a
270 Voltigeaient sur son frontétroit et gracieux. 6+6 b
Sa tunique aux longs plismontait comme un nuage 6+6 a
Autour d'elle, en dansant :le reflet inégal 6+6 b
De la lampe fumeuseou du jaune fanal 6+6 b
Parfois d'un vif éclairsillonnait son visage ; 6+6 a
275 Et, sur sa gorge nue,un collier de métal 6+6 b
Sonnait comme la grêleen une nuit d'orage ! 6+6 a
Retenant son haleine,et la couvant des yeux, 6+6 a
Le rhéteur palpitait,comme en un songe heureux, 6+6 a
Craignant de réveillerson âme confiante 6+6 b
280 Et de perdre à jamaisla vision charmante ; 6+6 b
Quand soudain près de lui,s'arrêtant dans ses jeux, 6+6 a
La danseuse en sueurvint tomber haletante. 6+6 b
Paulus avec un crila reçut dans ses bras ; 6+6 a
Il baisait, éperdu,sa tête parfumée, 6+6 b
285 Et pressait doucementses membres délicats ; 6+6 a
Se gonflant comme une onde,et de perles semée, 6+6 b
Sa gorge bondissaitpar la danse animée ; 6+6 b
Elle le regardaitet ne lui parlait pas !… 6+6 a
Comme nous l'avons ditau début de l'histoire, 6+6 a
290 Paulus était parfait ;sa chevelure noire 6+6 a
Ondulait sur son front,son regard plein de feu 6+6 b
Étincelait parfoiscomme celui d'un dieu ; 6+6 b
Il avait un sourireaux belles dents d'ivoire : 6+6 a
Ni grand, ni trop petit,il tenait le milieu. 6+6 b
295 Elle le regardaitmollement inclinée, 6+6 a
Puis craintive et vers luisoulevant ses grands yeux : 6+6 b
« Ô jeune homme inconnu,qui t'amène en ces lieux ? 6+6 b
« Tu contemples de loincette troupe avinée, 6+6 a
« Sans boire et sans dormir,et sembles soucieux, 6+6 b
300 « Apprends-moi ton pays,ton nom, ta destinée ! 6+6 a
« Ton sein est large et fort,ton regard plein d'ardeur, 6+6 a
« Es-tu soldat aux camps,ou lutteur dans l'arène ? 6+6 b
« Perces-tu, sans pâlir,une poitrine humaine ? 6+6 b
« Dit-on, quand tu parais :c'est un gladiateur ?… » 6+6 a
305 Paulus, en souriant,prit ses mains dans la sienne : 6+6 b
« Je sais tuer aussi,dit-il, je suis rhéteur ! » 6+6 a
Mot profond, en effet ;j'ignore si la belle 6+6 a
Comprit notre héros,mais il était charmant, 6+6 b
Et présentait à l'œill'étoffe d'un amant 6+6 b
310 Solide, en faut-il plusaux femmes ? » on m'appelle 6+6 a
« Melænis, j'ai vingt anset je t'aime, » dit-elle. 6+6 a
Pour Paulus, il nageaitdans le ravissement. 6+6 b
Advienne que pourra !C'est chose délectable, 6+6 a
Qu'un bon gîte la nuitet qu'une fille aimable ! 6+6 a
315 Elle avait sur son coujeté ses bras de lait : 6+6 b
« Ami, je danserai,si ma danse te plt, 6+6 b
« tes pieds passeront,je baiserai le sable, 6+6 a
« Car tes grands yeux sont doux !Quand ta bouche parlait, 6+6 b
« Je me sentais mourir !Oh ! Mon âme est blessée 6+6 a
320 « D'un amour inconnuqui ne s'éteindra pas ! 6+6 b
« Parle ! Veux-tu quelqu'unqui s'attache à tes pas ? 6+6 b
« Qui, le jour, qui, la nuit,t'étreigne en sa pensée ? 6+6 a
« Une esclave fidèle,une femme insensée 6+6 a
« Qui donnera son sangpour dormir dans tes bras ? 6+6 b
325 « ‒ Je t'aime ! » dit Paulus.Les lampes dans l'espace 6+6 a
Répandaient çà et làleur reflet incertain 6+6 b
Sur les buveurs couchésparmi les flots de vin. 6+6 b
Chaque groupe dormaitimmobile à sa place ; 6+6 a
La danseuse bonditvers une porte basse, 6+6 a
330 En faisant au rhéteurun signe de la main. 6+6 b
Paulus franchit la salleet partit avec elle, 6+6 a
Bénissant les destinsqui le servaient ainsi ; 6+6 b
Ils montèrent tous deuxle long du mur noirci : 6+6 b
Melænis demeuraità la troisième échelle ; 6+6 a
335 ‒ Paulus avait vingt ans,Melænis était belle ! 6+6 a
Magnanimes lecteurs,n'en prenez de souci ! 6+6 b
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