Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
BOI_2/BOI10
Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX
SATIRES
1666-1716
SATIRE IX
C'est à vous, mon Esprit,à qui je veux parler : 6+6 a
Vous avez des défautsque je ne puis celer ; 6+6 a
Assez et trop longtempsma lâche complaisance 6+6 b
De vos jeux criminelsa nourri l'insolence ; 6+6 b
5 Mais, puisque vous poussezma patience à bout, 6+6 a
Une fois en ma vieil faut vous dire tout. 6+6 a
 On croirait, à vous voirdans vos libres caprices 6+6 b
Discourir en Catondes vertus et des vices, 6+6 b
Décider du mériteet du prix des auteurs, 6+6 a
10 Et faire impunémentla leçon aux docteurs, 6+6 a
Qu'étant seul à couvertdes traits de la satire 6+6 b
Vous avez tout pouvoirde parler et d'écrire ; 6+6 b
Mais, moi, qui dans le fondsais bien ce que j'en crois 6+6 a
Qui compte tous les joursvos défauts par mes doigts, 6+6 a
15 Je ris, quand je vous vois,si faible et si stérile, 6+6 b
Prendre sur vous le soinde réformer la ville, 6+6 b
Dans vos discours chagrinsplus aigre et plus mordant 6+6 a
Qu'une femme en furie,ou Gautier en plaidant. 6+6 a
Mais, répondez un peu.Quelle verve indiscrète 6+6 b
20 Sans l'aveu des neuf Sœursvous a rendu poète ? 6+6 b
Sentiez-vous, dites-moi,ces violents transports 6+6 a
Qui d'un esprit divinfont mouvoir les ressorts ? 6+6 a
Qui vous a pu soufflerune si folle audace ? 6+6 b
Phébus a-t-il pour vousaplani le Parnasse ? 6+6 b
25 Et ne savez-vous pasque, sur ce mont sacré, 6+6 a
Qui ne vole au sommettombe au plus bas degré ; 6+6 a
Et qu'à moins d'être au rangd'Horace et de Voiture, 6+6 b
On rampe dans la fangeavec l'abbé de Pure ? 6+6 b
 Que si tous mes effortsne peuvent réprimer 6+6 a
30 Cet ascendant malinqui vous force à rimer ; 6+6 a
Sans perdre en vains discourstout le fruit de vos veilles, 6+6 b
Osez chanter du Roiles augustes merveilles : 6+6 b
Là, mettant à profitvos caprices divers, 6+6 a
Vous verriez tous les ansfructifier vos vers, 6+6 a
35 Et par l'espoir du gainvotre Muse animée 6+6 b
Vendrait au poids de l'orune once de fumée. 6+6 b
Mais en vain, direz-vous,je pense vous tenter 6+6 a
Par l'éclat d'un fardeautrop pesant à porter : 6+6 a
Tout chantre ne peut pas,sur le ton d'un Orphée, 6+6 b
40 Entonner en grands versla Discorde étouffée ; 6+6 b
Peindre Bellone en feutonnant de toutes parts, 6+6 a
Et le Belge effrayéfuyant sur ses remparts. 6+6 a
Sur un ton si hardi,sans être téméraire, 6+6 b
Racan pourrait chanterau défaut d'un Homère ; 6+6 b
45 Mais, pour Cotin et moi,qui rimons au hasard, 6+6 a
Que l'amour de blâmerfit poètes par art, 6+6 a
Quoiqu'un tas de grimaudsvante notre éloquence, 6+6 b
Le plus sûr est pour nousde garder le silence. 6+6 b
Un poème insipideet sottement flatteur 6+6 a
50 Déshonore à la foisle héros et l'auteur ; 6+6 a
Enfin, de tels projetspassent notre faiblesse. 6+6 b
 Ainsi parle un espritlanguissant de mollesse, 6+6 b
Qui, sous l'humble dehorsd'un respect affecté, 6+6 a
Cache le noir veninde sa malignité. 6+6 a
55 Mais, dussiez-vous en l'airvoir vos ailes fondues, 6+6 b
Ne valait-il pas mieuxvous perdre dans les nues, 6+6 b
Que d'aller sans raison,d'un style peu chrétien, 6+6 a
Faire insulte en rimantà qui ne vous dit rien, 6+6 a
Et, du bruit dangereuxd'un livre téméraire, 6+6 b
60 A vos propres périls,enrichir le libraire ? 6+6 b
 Vous vous flattez, peut-être,en votre vanité, 6+6 a
D'aller, comme un Horace,à l'immortalité ; 6+6 a
Et déjà, vous croyez,dans vos rimes obscures, 6+6 b
Aux Saumaises futurspréparer des tortures. 6+6 b
65 Mais, combien d'écrivains,d'abord si bien reçus, 6+6 a
Sont de ce fol espoirhonteusement déçus ! 6+6 a
Combien, pour quelques mois,ont vu fleurir leur livre, 6+6 b
Dont les vers en paquetse vendent à la livre ! 6+6 b
Vous pourrez voir, un temps,vos écrits estimés 6+6 a
70 Courir de main en mainpar la ville semés ; 6+6 a
Puis, de là, tout poudreux,ignorés sur la terre, 6+6 b
Suivre chez l'épicierNeuf-Germain et la Serre ; 6+6 b
Ou, de trente feuillets,réduits peut-être à neuf, 6+6 a
Parer, demi-rongés,les rebords du Pont-Neuf. 6+6 a
75 Le bel honneur pour vous,en voyant vos ouvrages 6+6 b
Occuper le loisirdes laquais et des pages, 6+6 b
Et souvent, dans un coinrenvoyés à l'écart, 6+6 a
Servir de second tomeaux airs du Savoyard ! 6+6 a
 Mais, je veux, que le sort,par un heureux caprice, 6+6 b
80 Fasse de vos écritsprospérer la malice, 6+6 b
Et qu'enfin, votre livreaille, au gré de vos vœux, 6+6 a
Faire siffler Cotinchez nos derniers neveux : 6+6 a
Que vous sert-il qu'un jourl'avenir vous estime, 6+6 b
Si vos vers aujourd'huivous tiennent lieu de crime, 6+6 b
85 Et ne produisent rien,pour fruit de leurs bons mots, 6+6 a
Que l'effroi du publicet la haine des sots ? 6+6 a
Quel démon vous irrite,et vous porte à médire ? 6+6 b
Un livre vous déplt :qui vous force à le lire ? 6+6 b
Laissez mourir un fatdans son obscurité. 6+6 a
90 Un auteur ne peut-ilpourrir en sûreté ? 6+6 a
Le Jonas inconnusèche dans la poussière ; 6+6 b
Le David imprimén'a point vu la lumière ; 6+6 b
Le Moïse commenceà moisir par les bords ; 6+6 a
Quel mal cela fait-il ?Ceux qui sont morts sont morts : 6+6 a
95 Le tombeau contre vousne peut-il les défendre ? 6+6 b
Et, qu'ont fait tant d'auteurs,pour remuer leur cendre ? 6+6 b
Que vous ont fait Perrin,Bardin, Pradon, Haynaut, 6+6 a
Colletet, Pelletier,Titreville, Quinault, 6+6 a
Dont les noms, en cent lieux,placés comme en leurs niches, 6+6 b
100 Vont de vos vers malinsremplir les hémistiches ? 6+6 b
Ce qu'ils font vous ennuie.O le plaisant détour ! 6+6 a
Ils ont bien ennuyéle Roi, toute la cour, 6+6 a
Sans que le moindre éditait, pour punir leur crime, 6+6 b
Retranché les auteursou supprimé la rime. 6+6 b
105 Écrive qui voudra !Chacun, à ce métier, 6+6 a
Peut perdre impunémentde l'encre et du papier. 6+6 a
Un roman, sans blesserles lois ni la coutume, 6+6 b
Peut conduire un hérosau dixième volume. 6+6 b
De là vient que Parisvoit chez lui de tout temps 6+6 a
110 Les auteurs à grands flotsdéborder tous les ans, 6+6 a
Et n'a point de portail, jusques aux corniches, 6+6 b
Tous les piliers ne soientenveloppés d'affiches. 6+6 b
Vous seul, plus dégté,sans pouvoir et sans nom, 6+6 a
Viendrez régler les droitset l'État d'Apollon ! 6+6 a
115  Mais, vous, qui raffinezsur les écrits des autres, 6+6 b
De quel œil pensez-vousqu'on regarde les vôtres ? 6+6 b
Il n'est rien en ce tempsà couvert de vos coups, 6+6 a
Mais savez-vous aussicomme on parle de vous ? 6+6 a
 « Gardez-vous, dira l'un,de cet esprit critique : 6+6 b
120 On ne sait bien souventquelle mouche le pique. 6+6 b
Mais c'est un jeune fouqui se croit tout permis, 6+6 a
Et qui, pour un bon mot,va perdre vingt amis. 6+6 a
Il ne pardonne pasaux vers de la Pucelle, 6+6 b
Et croit régler le mondeau gré de sa cervelle. 6+6 b
125 Jamais dans le barreautrouva-t-il rien de bon ? 6+6 a
Peut-on si bien prêcherqu'il ne dorme au sermon ? 6+6 a
Mais, lui, qui fait icile régent du Parnasse, 6+6 b
N'est qu'un gueux revêtudes dépouilles d'Horace. 6+6 b
Avant lui, Juvénalavait dit en latin 6+6 a
130 Qu'on est assis à l'aiseaux sermons de Cotin ; 6+6 a
L'un et l'autre avant luis'étaient plaints de la rime ; 6+6 b
Et c'est aussi sur euxqu'il rejette son crime. 6+6 b
Il cherche à se couvrirde ces noms glorieux. 6+6 a
J'ai peu lu ces auteurs,mais tout n'irait que mieux, 6+6 a
135 Quand de ces médisantsl'engeance tout entière 6+6 b
Irait la tête en basrimer dans la rivière. » 6+6 b
 Voilà comme on vous traite ;et le monde effrayé 6+6 a
Vous regarde déjàcomme un homme noyé. 6+6 a
En vain, quelque rieur,prenant votre défense, 6+6 b
140 Veut faire au moins, de grâce,adoucir la sentence ; 6+6 b
Rien n'apaise un lecteurtoujours tremblant d'effroi, 6+6 a
Qui voit peindre en autruice qu'il remarque en soi. 6+6 a
 Vous ferez-vous toujoursdes affaires nouvelles ? 6+6 b
Et faudra-t-il sans cesseessuyer des querelles ? 6+6 b
145 N'entendrai-je qu'auteursse plaindre et murmurer ? 6+6 a
Jusqu'à quand vos fureursdoivent-elles durer ? 6+6 a
Répondez, mon Esprit ;ce n'est plus raillerie ; 6+6 b
Dites Mais, direz-vous,pourquoi cette furie ? 6+6 b
Quoi ! pour un maigre auteurque je glose en passant, 6+6 a
150 Est-ce un crime, après tout,et si noir et si grand ? 6+6 a
Et qui, voyant un fats'applaudir d'un ouvrage 6+6 b
la droite raisontrébuche à chaque page, 6+6 b
Ne s'écrie aussitôt :« L'impertinent auteur ! 6+6 a
L'ennuyeux écrivain !Le maudit traducteur ! 6+6 a
155 A quoi bon mettre au jourtous ces discours frivoles, 6+6 b
Et ces riens enfermésdans de grandes paroles ? » 6+6 b
 Est-ce donc là médire,ou parler franchement ? 6+6 a
Non, non, la médisancey va plus doucement. 6+6 a
Si l'on vient à chercher,pour quel secret mystère 6+6 b
160 Alidor à ses fraisbâtit un monastère : 6+6 b
« Alidor ! dit un fourbe,il est de mes amis ; 6+6 a
Je l'ai connu laquaisavant qu'il fût commis. 6+6 a
C'est un homme d'honneur,de piété profonde, 6+6 b
Et qui veut rendre à Dieuce qu'il a pris au monde. » 6+6 b
165 Voilà jouer d'adresse,et médire avec art, 6+6 a
Et c'est avec respectenfoncer le poignard. 6+6 a
Un esprit né sans fard,sans basse complaisance, 6+6 b
Fuit ce ton radoucique prend la médisance. 6+6 b
Mais, de blâmer des versou durs, ou languissants, 6+6 a
170 De choquer un auteurqui choque le bon sens, 6+6 a
De railler d'un plaisantqui ne sait pas nous plaire, 6+6 b
C'est ce que tout lecteureut toujours droit de faire. 6+6 b
 Tous les jours, à la cour,un sot de qualité 6+6 a
Peut juger de traversavec impunité, 6+6 a
175 A Malherbe, à Racan,préférer Théophile, 6+6 b
Et le clinquant du Tasseà tout l'or de Virgile. 6+6 b
 Un clerc, pour quinze sous,sans craindre le holà, 6+6 a
Peut aller au parterreattaquer Attila, 6+6 a
Et, si le roi des Hunsne lui charme l'oreille, 6+6 b
180 Traiter de visigothstous les vers de Corneille. 6+6 b
 Il n'est valet d'auteur,ni copiste à Paris, 6+6 a
Qui, la balance en main,ne pèse les écrits. 6+6 a
Dès que l'impressionfait éclore un poète, 6+6 b
Il est esclave néde quiconque l'achète ; 6+6 b
185 Il se soumet lui-mêmeaux caprices d'autrui, 6+6 a
Et ses écrits tout seulsdoivent parler pour lui ; 6+6 a
Un auteur, à genoux,dans une humble préface, 6+6 b
Au lecteur qu'il ennuiea beau demander grâce ; 6+6 b
Il ne gagnera riensur ce juge irrité, 6+6 a
190 Qui lui fait son procèsde pleine autorité. 6+6 a
 Et je serai le seulqui ne pourrai rien dire ! 6+6 b
On sera ridicule,et je n'oserai rire ! 6+6 b
Et qu'ont produit mes versde si pernicieux, 6+6 a
Pour armer contre moitant d'auteurs furieux ? 6+6 a
195 Loin de les décrier,je les ai fait partre ; 6+6 b
Et souvent, sans ces versqui les ont fait conntre, 6+6 b
Leur talent dans l'oublidemeurerait caché. 6+6 a
Et qui saurait sans moique Cotin a prêché ? 6+6 a
La satire ne sertqu'à rendre un fat illustre ; 6+6 b
200 C'est une ombre au tableau,qui lui donne du lustre ; 6+6 b
En les blâmant enfinj'ai dit ce que j'en croi, 6+6 a
Et tel qui m'en reprenden pense autant que moi. 6+6 a
 « Il a tort, dira l'un ;pourquoi faut-il qu'il nomme ? 6+6 b
Attaquer Chapelain !ah ! c'est un si bon homme ! 6+6 b
205 Balzac en fait l'élogeen cent endroits divers. 6+6 a
Il est vrai, s'il m't cru,qu'il n't point fait de vers. 6+6 a
Il se tue à rimer :que n'écrit-il en prose ? » 6+6 b
Voilà ce que l'on dit.Et que dis-je autre chose ? 6+6 b
En blâmant ses écrits,ai-je, d'un style affreux, 6+6 a
210 Distillé sur sa vieun venin dangereux ? 6+6 a
Ma Muse en l'attaquant,charitable et discrète, 6+6 b
Sait de l'homme d'honneurdistinguer le poète. 6+6 b
Qu'on vante en lui la foi,l'honneur, la probité ; 6+6 a
Qu'on prise sa candeuret sa civilité ; 6+6 a
215 Qu'il soit doux, complaisant,officieux, sincère ; 6+6 b
On le veut, j'y souscris,et suis prêt de me taire. 6+6 b
Mais, que pour un modèleon montre ses écrits ; 6+6 a
Qu'il soit le mieux rentéde tous les beaux esprits ; 6+6 a
Comme roi des auteurs,qu'on l'élève à l'empire ; 6+6 b
220 Ma bile alors s'échauffe,et je brûle d'écrire, 6+6 b
Et, s'il ne m'est permisde le dire au papier, 6+6 a
J'irai creuser la terre,et, comme ce barbier, 6+6 a
Faire dire aux roseauxpar un nouvel organe : 6+6 b
« Midas, le roi Midasa des oreilles d'âne. » 6+6 b
225 Quel tort lui fais-je enfin ?Ai-je par un écrit 6+6 a
Pétrifié sa veineet glacé son esprit ? 6+6 a
Quand un livre au Palaisse vend et se débite, 6+6 b
Que chacun par ses yeuxjuge de son mérite, 6+6 b
Que Bilaine l'étaleau deuxième pilier, 6+6 a
230 Le dégt d'un censeurpeut-il le décrier ? 6+6 a
En vain, contre le Cidun ministre se ligue ; 6+6 b
Tout Paris pour Chimènea les yeux de Rodrigue : 6+6 b
L'Académie en corpsa beau le censurer, 6+6 a
Le public révoltés'obstine à l'admirer. 6+6 a
235 Mais, lorsque Chapelainmet une œuvre en lumière, 6+6 b
Chaque lecteur d'abordlui devient un Linière ; 6+6 b
En vain, il a reçul'encens de mille auteurs, 6+6 a
Son livre en paraissantdément tous ses flatteurs. 6+6 a
Ainsi, sans m'accuser,quand tout Paris le joue, 6+6 b
240 Qu'il s'en prenne à ses versque Phébus désavoue ; 6+6 b
Qu'il s'en prenne à sa Museallemande en françois ;… 6+6 a
Mais laissons Chapelainpour la dernière fois. 6+6 a
 La Satire, dit-on,est un métier funeste, 6+6 b
Qui plt à quelques gens,et choque tout le reste ; 6+6 b
245 La suite en est à craindre ;en ce hardi métier 6+6 a
La peur plus d'une foisfit repentir Regnier. 6+6 a
Quittez ces vains plaisirsdont l'appât vous abuse, 6+6 b
A de plus doux emploisoccupez votre Muse ; 6+6 b
Et laissez à Feuilletréformer l'univers. 6+6 a
250 Et sur quoi donc faut-ilque s'exercent mes vers ? 6+6 a
Irai-je dans une ode,en phrases de Malherbe, 6+6 b
« Troubler dans ses roseauxle Danube superbe ; 6+6 b
Délivrer de Sionle peuple gémissant ; 6+6 a
Faire trembler Memphis,ou pâlir le Croissant ; 6+6 a
255 Et, passant du Jourdainles ondes alarmées, 6+6 b
Cueillir « mal à propos »les palmes Idumées ? » 6+6 b
Viendrai-je en une églogue,entouré de troupeaux, 6+6 a
Au milieu de Parisenfler mes chalumeaux, 6+6 a
Et, dans mon cabinetassis au pied des hêtres, 6+6 b
260 Faire dire aux échosdes sottises champêtres ? 6+6 b
Faudra-t-il de sang-froid,et sans être amoureux, 6+6 a
Pour quelque Iris en l'airfaire le langoureux, 6+6 a
Lui prodiguer les nomsde Soleil et d'Aurore, 6+6 b
Et, toujours bien mangeant,mourir par métaphore ? 6+6 b
265 Je laisse aux doucereuxce langage affété, 6+6 a
s'endort un espritde mollesse hébété. 6+6 a
 La Satire, en leçons,en nouveautés fertile, 6+6 b
Sait seule assaisonnerle plaisant et l'utile, 6+6 b
Et, d'un vers qu'elle épureaux rayons du bon sens, 6+6 a
270 Détromper les espritsdes erreurs de leur temps. 6+6 a
Elle seule, bravantl'orgueil et l'injustice, 6+6 b
Va jusque sous le daisfaire pâlir le vice ; 6+6 b
Et souvent sans rien craindre,à l'aide d'un bon mot, 6+6 a
Va venger la raisondes attentats d'un sot. 6+6 a
275 C'est ainsi que Lucile,appuyé de Lélie, 6+6 b
Fit justice en son tempsdes Cotins d'Italie ; 6+6 b
Et qu'Horace, jetantle sel à pleines mains, 6+6 a
Se jouait aux dépensdes Pelletiers romains. 6+6 a
C'est elle, qui m'ouvrantle chemin qu'il faut suivre, 6+6 b
280 M'inspira dès quinze ansla haine d'un sot livre ; 6+6 b
Et sur ce Mont fameux, j'osai la chercher, 6+6 a
Fortifia mes paset m'apprit à marcher. 6+6 a
C'est pour elle, en un mot,que j'ai fait vœu d'écrire. 6+6 b
 Toutefois, s'il le faut,je veux bien m'en dédire, 6+6 b
285 Et, pour calmer enfintous ces flots d'ennemis, 6+6 a
Réparer en mes versles maux qu'ils ont commis. 6+6 a
Puisque vous le voulez,je vais changer de style. 6+6 b
Je le déclare donc :Quinault est un Virgile ; 6+6 b
Pradon comme un soleilen nos ans a paru ; 6+6 a
290 Pelletier écrit mieuxqu'Ablancourt , ni Patru ; 6+6 a
Cotin, à ses sermonstrnant toute la terre, 6+6 b
Fend les flots d'auditeurspour aller à sa chaire ; 6+6 b
Saufal est le phénixdes esprits relevés ; 6+6 a
Perrin… — Bon, mon esprit !courage ! poursuivez ! 6+6 a
295 Mais, ne voyez-vous pasque leur troupe en furie 6+6 b
Va prendre encor ces verspour une raillerie ? 6+6 b
Et Dieu sait, aussitôt,que d'auteurs en courroux, 6+6 a
Que de rimeurs blessés,s'en vont fondre sur vous ! 6+6 a
Vous les verrez bientôt,féconds en impostures, 6+6 b
300 Amasser contre vousdes volumes d'injures, 6+6 b
Traiter en vos écritschaque vers d'attentat, 6+6 a
Et d'un mot innocentfaire un crime d'État. 6+6 a
Vous aurez beau vanterle Roi dans vos ouvrages, 6+6 b
Et de ce nom sacrésanctifier vos pages, 6+6 b
305 Qui méprise Cotinn'estime point son Roi, 6+6 a
Et n'a, selon Cotin,ni Dieu, ni foi, ni loi. 6+6 a
 — Mais quoi ! répondrez-vous,Cotin nous peut-il nuire ? 6+6 b
Et par ses cris enfinque saurait-il produire ? 6+6 b
Interdire à mes vers,dont peut-être il fait cas, 6+6 a
310 L'entrée aux pensions, je ne prétends pas ? 6+6 a
Non ; pour louer un Roique tout l'univers loue, 6+6 b
Ma langue n'attend pointque l'argent la dénoue ; 6+6 b
Et, sans espérer riende mes faibles écrits, 6+6 a
L'honneur de le louerm'est un trop digne prix. 6+6 a
315 On me verra toujours,sage dans mes caprices, 6+6 b
De ce même pinceaudont j'ai noirci les vices 6+6 b
Et peint, du nom d'auteurtant de sots revêtus, 6+6 a
Lui marquer mon respect,et tracer ses vertus. 6+6 a
— Je vous crois ; mais pourtanton crie, on vous menace. 6+6 b
320 — Je crains peu, direz-vous,les braves du Parnasse. 6+6 b
— Hé ! mon Dieu, craignez toutd'un auteur en courroux, 6+6 a
Qui peut… — Quoi ? — Je m'entends.— Mais encor ? — Taisez-vous. » 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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