Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
BAN_3/BAN164
Théodore de BANVILLE
Les Exilés
1867
LA BELLE AUDE
En arrivant dans sa ville aux cent tours, 4+6 a
Charles s'écrie : « ah ! Cœurs pleins d'artifice ! 4+6 b
Ah ! Mécréants ! Pourvoyeurs de vautours ! 4+6 a
Il faut enfin qu'on vous anéantisse. 4+6 b
5 Que tous les pairs de ma cour de justice 4+6 b
Viennent, dit-il, me trouver sans délais : 4+6 c
Je veux qu'on parte et qu'on les avertisse. » 4+6 b
Mais en passant le seuil de son palais, 4+6 c
Sous un habit d'argent où l'émeraude 4+6 a
10 Jette ses feux près du rubis sanglant, 4+6 b
Il voit venir près de lui la belle Aude 4+6 a
Aux fins cheveux d'or pâle et ruisselant. 4+6 b
« Sire, dit-elle au roi pâle et tremblant 4+6 b
Que le désir de la vengeance affame, 4+6 c
15 Où donc est-il votre neveu Roland, 4+6 b
Qui m'a juré de me prendre pour femme ? » 4+6 c
À ce discours le puissant empereur, 4+6 a
Le vieux lion couronné, le grand chêne, 4+6 b
Baisse la tête et frémit de terreur. 4+6 a
20 De larges pleurs brûlants, des pleurs de haine, 4+6 b
Tombent à flots dans sa barbe hautaine : 4+6 b
« Hélas ! Dit-il, ce faiseur de travaux, 4+6 c
Cet artisan d'exploits, mon capitaine, 4+6 b
Le bon Roland, est mort à Roncevaux. 4+6 c
25 Mais, ô ma sœur ! Amie au col du cygne, 4+6 a
Je te promets un époux, fils d'aïeux 4+6 b
Fiers de lignage et de valeur insigne 4+6 a
Pour te servir à la face des cieux. 4+6 b
Il séchera les larmes de tes yeux 4+6 b
30 Qui pleureraient toujours de chers fantômes. 4+6 c
C'est mon Louis, je ne puis dire mieux : 4+6 b
Il est mon fils, il aura mes royaumes. » 4+6 c
Aude sourit. Vite, un rayon charmant 4+6 a
Fleurit sa lèvre austère que l'on vante : 4+6 b
35 « Je le vois bien, dit-elle doucement 4+6 a
À l'empereur tout glacé d'épouvante, 4+6 b
Vous vouliez donc railler votre servante ! 4+6 b
Vous m'avez dit ces choses-là par jeu ! 4+6 c
Que, Roland mort, Aude reste vivante ! 4+6 b
40 Cela ne plaise à notre seigneur Dieu ! » 4+6 c
Elle pâlit. Comme dans la campagne 4+6 a
Se brise un lys, la jeune fille ainsi 4+6 b
Se laisse choir aux pieds de Charlemagne, 4+6 a
Le cœur brisé par un si grand souci. 4+6 b
45 Sa lèvre est blême et son cœur est transi, 4+6 b
La voilà morte et froide et son front penche 4+6 c
Morte à toujours ! Dieu lui fasse merci 4+6 b
Et dans les cieux prenne son âme blanche ! 4+6 c
L'empereur tremble et tressaille ; d'abord 4+6 a
50 Il ne la croit que pâmée ; il la frôle ; 4+6 b
Il la soulève en tremblant, lui si fort ! 4+6 a
La tête, hélas ! Retombe sur l'épaule. 4+6 b
Va, c'en est fait, ô perle de la Gaule ! 4+6 b
Ses longs cheveux, tandis qu'elle s'endort, 4+6 c
55 Tombent pareils à des branches de saule : 4+6 b
C'est bien le doigt farouche de la mort. 4+6 c
Charles, pensif, navré dans ses tristesses, 4+6 a
Ayant connu cette vaillante amour, 4+6 b
Au même instant mande quatre comtesses 4+6 a
60 Qu'il fit venir en grand deuil à sa cour 4+6 b
Pour veiller Aude aux bras blancs nuit et jour. 4+6 b
Et puis elle eut sa place aux pieds des anges, 4+6 c
Dans un moutier de nonnains, doux séjour 4+6 b
Où de Marie on chante les louanges. 4+6 c
65 Sa blanche tombe est sous un noir buisson 4+6 a
Où l'aubépine étend ses longues branches. 4+6 b
Le rossignol en suave chanson 4+6 a
Y vient la nuit jeter ses notes franches ; 4+6 b
La violette et les sombres pervenches 4+6 b
70 Semblent gémir sur un trépas si beau, 4+6 c
Et l'on verra des roses toutes blanches 4+6 b
Pendant mille ans fleurir sur son tombeau. 4+6 c
Car elle est morte, aimable entre les vierges ! 4+6 a
Et Ganelon attend son jugement, 4+6 b
75 Vil, enchaîné, meurtri, fouetté de verges. 4+6 a
Mais Aude morte égale son amant. 4+6 b
Dans le sépulcre elle dort fièrement, 4+6 b
Et Charles pleure encor cette pucelle 4+6 c
Qui fut sans tache ainsi qu'un diamant, 4+6 b
80 Et brave cœur et gente demoiselle. 4+6 c
mètre profil métrique : 4+6
logo du CRISCO logo de l'université