Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BAN_2/BAN81
Théodore de BANVILLE
Odes funambulesques
1857
ÉVOHÉ
NÉMÉSIS INTÉRIMAIRE
SATIRE QUATRIÈME
ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE
Ô parnasse lyrique ! | Opéra ! Palais d'or ! 6+6 a
Salut ! L'antique muse, | en prenant son essor, 6+6 a
Fait traîner sur ton front | ses robes sidérales, 6+6 b
Et défiler en chœur | les danses sculpturales. 6+6 b
5 Peinture ! Poésie ! | Arts encor éblouis 6+6 a
Des rayons frissonnants | du soleil de Louis ! 6+6 a
Musique, voix divine | et pour les cieux élue, 6+6 b
Ô groupe harmonieux, | beaux-arts, je vous salue ! 6+6 b
Ô souvenirs ! C'est là | le théâtre enchanté 6+6 a
10 Où Molière et Corneille | et Mozart ont chanté. 6+6 a
C'est là qu'en soupirant | la mort a pris Alceste ; 6+6 b
Là, Psyché, toute en pleurs | pour son amant céleste, 6+6 b
A croisé ses beaux bras | sur le rocher fatal ; 6+6 a
Là, naïade orgueilleuse | aux palais de cristal, 6+6 a
15 Versailles, reine encore, | a chanté son églogue ; 6+6 b
Là, parmi les détours | d'un charmant dialogue. 6+6 b
Angélique et Renaud, | Cybèle avec Atys 6+6 a
Ont cueilli la pervenche | et le myosotis, 6+6 a
Et la muse a suivi | d'un long regard humide 6+6 b
20 Les amours d'Amadis | et les amours d'Armide. 6+6 b
Là, Gluck avec Quinault, | Quinault avec Lulli 6+6 a
Ont chanté leurs beaux airs | pour un siècle poli : 6+6 a
Là, Rossini, vainqueur | des lyres constellées, 6+6 b
Fit tonner les clairons | de ses grandes mêlées, 6+6 b
25 Et fit naître à sa voix | ces immortels d'hier, 6+6 a
Ces vieux maîtres : Auber, | Halévy, Meyerbeer. 6+6 a
C'est là qu'Esméralda, | la danseuse bohème, 6+6 b
Par la voix de Falcon | nous a dit son poëme, 6+6 b
Et que chantait aussi | le cygne abandonné 6+6 a
30 Dont le suprême chant | ne nous fut pas donné. 6+6 a
Ici Taglioni, | la fille des sylphides, 6+6 b
A fait trembler son aile | au bord des eaux perfides, 6+6 b
Puis la danse fantasque | auprès des mêmes flots 6+6 a
A fait carillonner | ses grappes de grelots. 6+6 a
35 Ô féerie et musique ! | ô nappes embaumées 6+6 b
Qu'argentent les willis | et les pâles almées ! 6+6 b
Ô temple ! Clair séjour | de la danse et du luth ! 6+6 a
Parnasse ! Palais d'or ! | Grand opéra, salut ! 6+6 a
Le cocher s'est trompé. | Nous sommes au gymnase. 6+6 b
40 Un peuple de bourgeois, | nez rouge et tête rase, 6+6 b
Étale des habits | de Quimper-Corentin. 6+6 a
Un notaire ventru | saute comme un pantin, 6+6 a
Auprès d'un avoué | chauve, une cataracte 6+6 b
D'éloquence ; sa femme | est verte et lit l'entr'acte. 6+6 b
45 Elle arbore de l'or | et du strass à foison, 6+6 a
Et renifle, et sa gorge | a l'air d'une maison. 6+6 a
Auprès de ce sujet, | dont la face verdoie, 6+6 b
S'étalent des cous nus, | pelés comme un cou d'oie 6+6 b
Plumée ; et, pêle-mêle, | au long de tous ces bancs 6+6 a
50 Traînent toute l'hermine | et tous les vieux turbans 6+6 a
Qui, du Rhin à l'Indus, | aient vieilli sur la terre. 6+6 b
J'apprends que l'un des cous | est fille du notaire. 6+6 b
Ô ciel ! Voici, parmi | ces gens à favoris, 6+6 a
Un vieux monsieur qui porte | un habit de Paris. 6+6 a
55 Il a l'air fort honnête | et reste bouche close ; 6+6 b
Adressons-nous à lui | pour savoir quelque chose. 6+6 b
C'est une occasion | qu'il est bon de saisir. 6+6 a
Moi.
Monsieur, voudriez-vous | me faire le plaisir 6+6 a
De me dire quels sont | ces cous d'oie et ces hommes 6+6 b
60 Jaunes, et dans quel lieu | de la terre nous sommes ? 6+6 b
Je me suis égaré, | cette dame est ma sœur. 6+6 a
Où suis-je ?
Le Monsieur Qui A L'Air Honnête.
À l'opéra. |
Moi.
Vous êtes un farceur ! 6+6 a
Le Notaire Ventru.
Oui, biche, le rideau | que tu vois représente 6+6 b
Le roi Louis Quatorze | en seize cent soixante 6+6 b
65 Douze. Il portait, ainsi | que l'histoire en fait foi, 6+6 a
Une perruque avec | des rubans. Le grand roi, 6+6 a
Entouré des seigneurs | qui forment son cortège, 6+6 b
Donne à Lulli, devant | sa cour, le privilège 6+6 b
De l'opéra, qu'avait | auparavant l'abbé 6+6 a
Perrin.
Un Des Cous.
70 Papa, je crois | que mon gant est tombé. 6+6 a
Le Notaire Ventru.
ça se nettoie avec | de la gomme élastique. 6+6 b
L'Avoué.
Oui, madame, j'assigne, | et voilà ma tactique. 6+6 b
Un Avocat.
On l'appelait au Mans | maître Pichu minor 6+6 a
Et moi maître Pichu | major.
M Josse.
Le Koh-innor… 6+6 a
Un Lampiste à Lunettes D'Or.
Silence !
Le Bâton Du Régisseur.
pan ! Pan ! Pan ! |
L'Avoué.
75 Je ne suis pas leur dupe ! 6+6 b
Second cou.
Maman, ce gros monsieur | veut s'asseoir sur ma jupe. 6+6 b
La Dame Verte.
Pince-le.
Le Notaire Ventru.
Je ne sais | où sera le nouvel 6+6 a
Opéra. C'est, dit-on, | à l'ancien que Louvel… 6+6 a
L'Orchestre.
Tra, la, la, la, la ; ta, | la, la, la, lère.
Moi.
Qu'est-ce 6+6 b
80 Que ce bruit-là, monsieur ? | Qu'a donc la grosse caisse 6+6 b
Contre ces violons | enrhumés du cerveau ? 6+6 a
Et pourquoi préluder | à l'opéra nouveau 6+6 a
Par j'ai du bon tabac ? |
Le Monsieur Qui A L'Air Honnête.
Monsieur, c'est l'ouverture 6+6 b
De Guillaume Tell.
Moi.
Ah ! |
L'Avocat.
Madame, la nature 6+6 b
85 De la pomme de terre | est d'aimer les vallons. 6+6 a
Elle atteint dans le Puy | la grosseur des melons. 6+6 a
Premier Cou.
Mon corset me fait mal. |
M Canaple Sur La Scène.
« il chante et l'Helvétie 6+6 b
pleure sa liberté ! | »
L'Avocat.
Que la démocratie 6+6 b
S'organise, on verra | tous les partis haineux 6+6 a
Fondre leurs intérêts. |
Chœur Général Sur La Scène.
90 « célébrons les doux nœuds ! » 6+6 a
Second Cou.
Mon cothurne est cassé. |
M Don Juan Dans La Loge Infernale.
Veux-tu nous aimer, Gothe ? 6+6 b
Soupons-nous à l'anglais ? |
Mlle Gothe Sur La Scène.
Non, c'est une gargote. 6+6 b
Chœur Des Suisses Sur La Scène.
« courons armer nos bras ! | »
Un Triangle Égaré.
ktsin !
Une Clarinette Retardataire.
trum !
Chœur De Femmes Sur La Scène.
« toi que l'oiseau 6+6 a
ne suivrait pas ! »
L'Avoué.
Monsieur, | ma femme est un roseau 6+6 a
Pour la douceur.
Un Violon Méchant.
vzrumz ! Vzrumz ! |
M Arnous Sur Le Théâtre.
hou ! Hou !
M Obin Sur Le Théâtre.
tra, tra.
Premier Cou.
95 Titine, 6+6 b
Le monsieur met son pied | le long de ma bottine. 6+6 b
M Arnoux Sur Le Théâtre.
la hou, la hou, la ha. |
M Obin Sur Le Théâtre.
tra trou, trou tra, trou, trou ! 6+6 a
Le Notaire Ventru.
Monsieur, que pensez-vous | du Genest de Rotrou ? 6+6 a
Chœur Des Suisses Sur La Scène.
« le glaive arme nos bras ! | »
L'Avoué.
Mais ! La pièce est baroque 6+6 b
100 Ce n'est plus tout à fait | dans les mœurs de l'époque. 6+6 b
Elle aurait eu besoin | d'un bon coup de ciseau. 6+6 a
Le Notaire Ventru.
Hum ! C'est selon.
M Arnoux Sur Le Théâtre.
hou ! Hou ! |
M Obin Sur Le Théâtre.
tra ! Tra !
Chœur De Femmes Sur La Scène.
« toi que l'oiseau… ! » 6+6 a
Chœur De Femmes Sur La Scène.
« toi qui n'es pas… »
M Arnoux Sur Le Théâtre.
hou ! Hou ! |
M Obin Sur Le Théâtre.
tra ! Tra !
La Dame Verte.
J'ai chaud aux joues. 6+6 b
Le Triangle Égaré.
ktsin !
La Clarinette Retardataire.
trum !
Le Notaire Ventru.
Bibiche, c'est | le morceau que tu joues 6+6 b
Sur ton piano.
Premier Cou.
ça ! |
L'Avoué.
105 J'ai dit à Ducluzeau 6+6 a
Ce que c'est que l'affaire. |
M Arnoux Sur Le Théâtre.
hou ! Hou !
Chœur De Femmes Sur La Scène.
« toi que l'oiseau ! … » 6+6 a
Ô ma blonde Évohé, | ma muse au chant de cygne, 6+6 b
Regarde ce qu'ils font | de ce théâtre insigne. 6+6 b
Ô pudeur ! Autrefois, | dans ces décors vivants 6+6 a
110 Où l'œil voyait courir | le souffle ailé des vents, 6+6 a
L'eau coulait en ruisseaux | dans les conques de marbre, 6+6 b
Et le doigt du zéphyr | pliait les feuilles d'arbre. 6+6 b
L'orchestre frémissant | envoyait à la fois 6+6 a
Son harmonie à l'air | comme une seule voix ; 6+6 a
115 Tout le corps de ballet | marchait comme une armée : 6+6 b
Les déesses du chant, | troupe jeune et charmée, 6+6 b
Belles comme Ophélie | et comme Alaciel, 6+6 a
Avaient dans le gosier | tous les oiseaux du ciel ; 6+6 a
La danse laissait voir | tous les trésors de Flore 6+6 b
120 Sous les plis des maillots, | vermeils comme l'aurore ; 6+6 b
C'était la vive Elssler, | ce volcan adouci, 6+6 a
Lucile et Carlotta, | celle qui marche aussi 6+6 a
Avec ses pieds charmants, | armés d'ailes hautaines, 6+6 b
Sur la cime des blés | et l'azur des fontaines. 6+6 b
125 L'audace d'une femme, | arrêtant ce concours, 6+6 a
A remis une bande | au bas des jupons courts 6+6 a
Et plongé les ténors | au sein de la banlieue. 6+6 b
Cruelle Éris, déesse | à chevelure bleue, 6+6 b
Déesse au dard sanglant, | déesse au fouet vainqueur, 6+6 a
130 Change mon encre en fiel ; | mets autour de mon cœur 6+6 a
L'armure adamantine, | et dans mon front évoque, 6+6 b
Mètre de clous armé, | l'ïambe d'Archiloque ! 6+6 b
L'ïambe est de saison, | l'ïambe et sa fureur, 6+6 a
Pour peindre dignement | ces spectacles d'horreur 6+6 a
135 Et les sombres détails | de ce cloaque immense. 6+6 b
Vous, mesdames, prenez | vos flacons, je commence. 6+6 b
Un fantôme d'Habneck, | honteux de son déchet, 6+6 a
Agite tristement | un fantôme d'archet ; 6+6 a
L'harmonieux vieillard | est quinteux et morose : 6+6 b
140 Il est devenu gai | comme Louis Monrose. 6+6 b
Ses violons fameux | que l'on voyait, dit-on, 6+6 a
Pleins d'une ardeur si noble, | obéir au bâton, 6+6 a
L'archet morne à présent | et la corde lâchée, 6+6 b
Semblent se conformer | à sa mine fâchée ; 6+6 b
145 Et tout l'orchestre, avec | ses cuivres en chaudrons, 6+6 a
Ainsi qu'un vieux banquier | poursuivant les tendrons, 6+6 a
Ou qu'un vers enjambant | de césure en césure, 6+6 b
Lui-même se poursuit | de mesure en mesure. 6+6 b
La musique sauvage | et le drôle de cor 6+6 a
150 Qui guide au premier mai | la famille Bouthor ; 6+6 a
Chez notre Deburau, | les trois vieillards épiques 6+6 b
Qui font grincer des airs | pointus comme des piques ; 6+6 b
Le concert souterrain | des aveugles ; enfin 6+6 a
L'antique piano | qui grogne à Séraphin 6+6 a
155 Et l'orchestre des chiens | qu'on montre dans les foires, 6+6 b
Auprès de celui-là | charment leurs auditoires. 6+6 b
Mais si rempli qu'il soit | de grincements de dents, 6+6 a
Quels que soient les canards | qui barbotent dedans, 6+6 a
Si féroce qu'il semble | à toute oreille tendre, 6+6 b
160 Il vaut mieux que le chant | qu'il empêche d'entendre. 6+6 b
Les choristes, rangés | en affreux bataillons, 6+6 a
Marchent ad libitum | en traînant des haillons ; 6+6 a
Les femmes, effrayant | le dandy qu'elles visent, 6+6 b
Chantent faux des vers faux ; | même, elles improvisent ! 6+6 b
165 Ô ruines ! Leurs dents | croulent comme un vieux mur, 6+6 a
Et ces divinités, | toutes d'un âge mûr, 6+6 a
Dont la plus séduisante | est horriblement laide, 6+6 b
Font rêver par leurs os | aux dagues de Tolède. 6+6 b
Leurs jupons évidés | marchent à grands frous-frous, 6+6 a
170 Et leur visage bleu, | percé de mille trous, 6+6 a
S'étale avec orgueil | comme une vieille cible. 6+6 b
Les hommes sont plus laids | encor, si c'est possible. 6+6 b
Triste fin ! Si l'on songe, | en voyant ces objets, 6+6 a
Que ce chœur endurci | vaut les premiers sujets ! 6+6 a
175 Plus de ténors ! Leur si | demande un cataplasme, 6+6 b
Et l'ut, le fameux ut, | tombe dans le marasme. 6+6 b
En vain Pillet tremblant | envoya ses zélés 6+6 a
Parcourir l'Italie | avec leurs pieds ailés ; 6+6 a
En vain ils ont fouillé | Rome, ville papale, 6+6 b
180 Naple, où sous l'oranger | des femmes au front pâle 6+6 b
Donnent des rendez-vous | aux jeunes cavaliers, 6+6 a
Et, courtisane avec | des palais en colliers, 6+6 a
Venise, où lord Byron, | deux fois vainqueur des ondes, 6+6 b
Poussait son noir coursier | le long des vagues blondes, 6+6 b
185 Et Florence, où l'Arno, | parmi ses flots tremblants, 6+6 a
Mêle l'azur du ciel | avec les marbres blancs ; 6+6 a
Jusqu'au golfe enchanteur | qu'un paradis limite, 6+6 b
L'ut ne veut plus lutter, | le ténor est un mythe. 6+6 b
Seul, ô Duprez ! Toujours | plus grand, toujours vainqueur, 6+6 a
190 Toujours lançant au ciel | ton chant qui sort du cœur, 6+6 a
Fièrement appuyé | sur ta large méthode 6+6 b
Qui reste, comme l'art, | au-dessus de la mode, 6+6 b
Ô Duprez ! ô Robert ! | Arnold ! Éléazar ! 6+6 a
En voyant les cailloux | qu'on met devant ton char, 6+6 a
195 Et les rivaux honteux | que la haine te donne 6+6 b
Lorsque ta voix sublime | à la fin t'abandonne, 6+6 b
Toujours maître de toi, | tu luttes en héros, 6+6 a
Toujours roi, toujours fort, | tandis que tes bourreaux 6+6 a
Inventent vingt ténors | devant qui l'on s'incline, 6+6 b
200 Et qui durent un an, | comme la crinoline. 6+6 b
Ah ! Du moins nous avons | la danse, un art divin ! 6+6 a
Et l'homme le plus fait | pour être un écrivain, 6+6 a
Célébrât-il Louis | et portât-il perruque, 6+6 b
Fût-il Caton, fût-il | Boileau, fût-il eunuque, 6+6 b
205 Ne pourrait découvrir | l'ombre d'un iota 6+6 a
Pour défendre à ses vers | d'admirer Carlotta. 6+6 a
Son corps souple et nerveux | a de suaves lignes ; 6+6 b
Vive comme le vent, | douce comme les cygnes, 6+6 b
L'aile d'un jeune oiseau | soutient ses pieds charmants, 6+6 a
210 Ses yeux ont des reflets | comme des diamants, 6+6 a
Ses lèvres à l'Éden | auraient servi de portes ; 6+6 b
Le jardin de Ronsard, | de Belleau, de Desportes, 6+6 b
Devant Cypre et Chloris | toujours extasiés, 6+6 a
A, pour les embellir, | donné tous ses rosiers. 6+6 a
215 Elle va dans l'azur, | laissant flotter ses voiles, 6+6 b
Conduire en souriant | la danse des étoiles, 6+6 b
Poursuivre les oiseaux | et prendre les rayons ; 6+6 a
Et, par les belles nuits, | d'en bas nous la voyons, 6+6 a
Dans les plaines du ciel | d'ombre diminuées, 6+6 b
220 Jouer entrelacée | à ses sœurs les nuées, 6+6 b
Ouvrir son éventail | et se mirer dans l'eau. 6+6 a
Qu'auriez-vous pu trouver | à redire, ô Boileau ? 6+6 a
Une chose bien simple, | hélas ! La jalousie 6+6 b
Nous cache tout ce luxe | et cette poésie, 6+6 b
225 De même qu'autrefois, | par un crime impuni, 6+6 a
Les mêmes envieux | cachaient Taglioni, 6+6 a
Cet autre ange charmant | des cieux imaginaires. 6+6 b
Sombre Junon ! Les dieux | ont-ils donc des colères ? 6+6 b
Aimez-vous les décors ? | On n'en met nulle part. 6+6 a
230 Les vieux servent toujours, | percés de part en part, 6+6 a
Et, par la main du temps | noircis comme des forges, 6+6 b
Ils pendent en lambeaux | comme de vieilles gorges. 6+6 b
Les arbres sont orange, | et dans guillaume tell, 6+6 a
La montagne est percée | à jour comme un tunnel. 6+6 a
235 Le temple de Robert, | ses colonnes en loques, 6+6 b
S'agite aux quatre vents | comme des pendeloques, 6+6 b
Et le couvent a l'air | de s'être bien battu. 6+6 a
Dans la muette enfin, | mirabile dictu ! 6+6 a
L'éruption se fait | avec du papier rouge 6+6 b
240 Derrière lequel brille | un lampion qui bouge. 6+6 b
Le machiniste, un sage, | ennemi des succès, 6+6 a
Imite à tour de bras | le théâtre-français. 6+6 a
Les travestissements, | les changements à vue, 6+6 b
Les transformations | sont comme une revue 6+6 b
245 De la garde civique : | on les manque toujours. 6+6 a
Les français, l'odéon, | sont les seules amours 6+6 a
Du machiniste en chef ; | il a cette coutume 6+6 b
D'étrangler les acteurs | en tirant leur costume. 6+6 b
Quelques-uns sont vivants ; | s'ils en ont réchappé, 6+6 a
250 C'est que le machiniste | une fois s'est trompé, 6+6 a
Et rêvait d'Abufar, | qu'il voit chaque dimanche. 6+6 b
C'est un homme d'esprit | qui prendra sa revanche. 6+6 b
Enfin on voit maigrir, | comme corps de ballet, 6+6 a
Des marcheuses, des rats, | peuple jeune et fort laid, 6+6 a
255 Qui n'ont jamais dansé | qu'à la grande-chartreuse, 6+6 b
Et qui, réjouissant | de leur maigreur affreuse 6+6 b
Les lions estompés | au cosmétique noir, 6+6 a
Prennent des rendez-vous | pour le souper du soir. 6+6 a
Nous qui ne sommes pas | danseurs, prenons la fuite. 6+6 b
260 Allons souper, aussi, | mon cœur, mais tout de suite, 6+6 b
Et tâchons d'oublier | en buvant de bons vins, 6+6 a
Cet hospice fameux, | rival des quinze-vingts. 6+6 a
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