Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
APO_2/APO55
Guillaume APOLLINAIRE
ALCOOLS
1913
Merlin et la vieille femme
Le soleil ce jour-là s'étalait comme un ventre 6+6 a
Maternel qui saignait lentement sur le ciel 6+6 b
La lumière est ma mère ô lumière sanglante 6+6 a
Les nuages coulaient comme un flux menstruel 6+6 b
5 Au carrefour où nulle fleur sinon la rose 4+4+4 a
Des vents mais sans épine n'a fleuri l'hiver 8+4 b
Merlin guettait la vie et l'éternelle cause 6+6 a
Qui fait mourir et puis renaître l'univers 6+6 b
Une vieille sur une mule à chape verte 8+4 a
10 S'en vint suivant la berge du fleuve en aval 4+8 b
Et l'antique Merlin dans la plaine déserte 6+6 a
Se frappait la poitrine en s'écriant Rival 6+6 b
O mon être glacé dont le destin m'accable 6+6 a
Dont ce soleil de chair grelotte veux-tu voir 6+6 b
15 Ma Mémoire venir et m'aimer ma semblable 6+6 a
Et quel fils malheureux et beau je veux avoir 6+6 b
Son geste fit crouler l'orgueil des cataclysmes 6+6 a
Le soleil en dansant remuait son nombril 6+6 b
Et soudain le printemps d'amour et d'héroïsme 6+6 a
20 Amena par la main un jeune jour d'avril 6+6 b
Les voies qui viennent de l'ouest étaient couvertes 6−6 a
D'ossements d'herbes drues de destins et de fleurs 6+6 b
Des monuments tremblants près des charognes vertes 6+6 a
Quand les vents apportaient des poils et des malheurs 6+6 b
25 Laissant sa mule à petits pas s'en vint l'amante 4+4+4 a
A petits coups le vent défripait ses atours 6+6 b
Puis les pâles amants joignant leurs mains démentes 6+6 a
L'entrelacs de leurs doigts fut leur seul laps d'amour 6+6 b
Elle balla mimant un rythme d'existence 6+6 a
30 Criant Depuis cent ans j'espérais ton appel 6+6 b
Les astres de ta vie influaient sur ma danse 6+6 a
Morgane regardait du haut du mont Gibel 6+6 b
Ah! qu'il fait doux danser quand pour vous se déclare 6+6 a
Un mirage où tout chante et que les vents d'horreur 6+6 b
35 Feignent d'être le rire de la lune hilare 6−6 a
Et d'effrayer les fantômes avants-coureurs 4+8 b
J'ai fait des gestes blancs parmi les solitudes 6+6 a
Des lémures couraient peupler les cauchemars 6+6 b
Mes tournoiements exprimaient les béatitudes 4+8 a
40 Qui toutes ne sont rien qu'un pur effet de l'Art 6+6 b
Je n'ai jamais cueilli que la fleur d'aubépine 6+6 a
Aux printemps finissants qui voulaient défleurir 6+6 b
Quand les oiseaux de proie proclamaient leurs rapines 6+6 a
D'agneaux mort-nés et d'enfants-dieux qui vont mourir 4+4+4 b
45 Et j'ai vieilli vois-tu pendant ta vie je danse 6+6 a
Mais j'eusse été tôt lasse et l'aubépine en fleurs 6+6 b
Cet avril aurait eu la pauvre confidence 6+6 a
D'un corps de vieille morte en mimant la douleur 6+6 b
Et leurs mains s'élevaient comme un vol de colombes 6+6 a
50 Clarté sur qui la nuit fondit comme un vautour 6+6 b
Puis Merlin s'en alla vers l'est disant Qu'il monte 6+6 a
Le fils de ma Mémoire égale de l'Amour 6+6 b
Qu'il monte de la fange ou soit une ombre d'homme 6+6 a
Il sera bien mon fils mon ouvrage immortel 6+6 b
55 Le front nimbé de feu sur le chemin de Rome 6+6 a
Il marchera tout seul en regardant le ciel 6+6 b
La dame qui m'attend se nomme Viviane 6+6 a
Et vienne le printemps des nouvelles douleurs 6+6 b
Couché parmi la marjolaine et les pas-d'âne 4+4+4 a
60 Je m'éterniserai sous l'aubépine en fleurs 6+6 b
mètre profil métrique : 6÷6
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